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28/7/10 | Thierry Desjardins |
Carla tourne dans un film américain, Nicolas dans
un film français ! Carla Bruni-Sarkozy a commencé à tourner le petit rôle que Woody Allen lui a accordé dans son nouveau film. Et son mari qui est accessoirement président de la République continue, lui, à faire du cinéma. Aujourd’hui, à l’Elysée, il y avait à l’affiche : les gens du voyage et les islamistes du Sahel. Beau programme, varié et haut en couleurs ! On se demande, naturellement, quelle mouche a bien pu piquer Sarkozy pour qu’il décide d’ouvrir brutalement le dossier de ces gens du voyage. Un petit délinquant a forcé un barrage routier de la gendarmerie, il a été abattu par les gendarmes, ses amis ont saccagé plusieurs communes de environs. Une histoire de violences comme nous en connaissons beaucoup en ce moment. Mais comme le petit délinquant appartenait à la communauté des gens du voyage, Sarkozy a décidé de frapper un grand coup. Il allait régler son compte à cette communauté de 4 à 500.000 personnes. Personne ne conteste que ces gens du voyage posent un problème d’intégration dans notre société. Ce sont des marginaux. En principe, même s’ils sont français, ils habitent des roulottes, ils n’ont pas de revenus bien précis, on les soupçonne de tous les larcins, on ne sait pas très bien d’où ils viennent. Roms, Romanichels, Tziganes, Gitans, on mélange tout. Le petit délinquant à l’origine de ces événements habitait une maison «
en dur », dans un petit village du Loir-et-Cher où sa famille est installée
depuis deux générations et possède même une tombe dans le cimetière local.
Des gens du voyage qui ne voyageaient plus depuis longtemps. Mais
qu’importe. Sarkozy sait que les gens du voyage ne sont pas populaires. Il a donc sauté sur l’occasion pour tenter de faire croire à l’opinion qu’il était toujours le grand spécialiste de la sécurité et de la protection des personnes et des biens et qu’il n’hésitait jamais, lui, à prendre les décisions « courageuses » qui s’imposaient. L’avocat qu’il fut jadis a totalement oublié qu’en France et dans tout Etat de droit, « la peine ne peut être qu’individuelle ». Pas collective. Il veut sanctionner tous les gens du voyage parce qu’un des leurs a forcé un barrage et qu’une poignée de ses amis ont vandalisé la région. Le même week-end, à Grenoble, c’était un truand arabe qui avait attaqué un casino et sa mort qui avait provoqué des violences. Va-t-il organiser aussi à l’Elysée une réunion pour prendre des mesures contre le comportement de certains Arabes et l’ensemble de cette communauté qui, elle aussi et à une toute autre échelle, pose des problèmes comme l’avait remarqué le ministre de l’Intérieur « Un, ça va, c’est quand ils sont plusieurs que ça pose des problèmes » (sic). Ce qui est dérisoire dans l’attitude du chef de l’Etat c’est que chacun sait – lui le premier - que quelles que soient les décisions prises, elles n’auront évidemment aucun effet. La police va faire évacuer quelques campements illégaux, on va demander aux communes de plus de 5.000 habitants de respecter la loi et donc d’aménager des espaces pour accueillir les gens du voyage. Les « évacués » vont s’installer quelques centaines de mètres plus loin, et les communes vont rappeler qu’elles n’ont pas les moyens financiers d’aménager ces lieux d’accueil. Ajoutons que, pour la plupart, ces 4 ou 500.000 gens du voyage sont français et que les autres sont des ressortissants de pays européens et ont donc le droit de circuler librement en France. A moins d’imaginer une loi faisant obligation à chacun de se sédentariser, ce qui serait une atteinte à la liberté que condamnerait immédiatement le Conseil Constitutionnel, on ne voit pas comment on pourrait régler le problème des Gens du voyage. Mais Sarkozy aura « fait son cinéma ». Autre scène élyséenne du jour : les islamistes du Sahel et les suites à donner à l’assassinat de Michel Germaneau. La première des préoccupations est évidemment de tout faire pour que les Français n’accusent pas Sarkozy d’avoir provoqué la mort de notre otage en lançant son opération de commando ratée contre les rebelles. L’Elysée s’est aperçu qu’il était absurde de continuer à raconter que Germaneau était « peut-être mort depuis plusieurs semaines ». Alors on s’entête à répéter que « les rebelles refusaient toute négociation » et qu’« ils n’avaient même pas fait connaître leurs exigences ». C’est tout aussi absurde. Il est évident que tous les preneurs d’otages veulent toujours obtenir quelque chose et qu’ils le font toujours savoir. Il aurait été plus simple de reconnaître que les hommes de l’Aqmi exigeaient la libération d’un certain nombre de leurs amis détenus dans plusieurs prisons des pays de la région et que ces pays refusaient de libérer ces criminels qui avaient commis des assassinats chez eux. Sarkozy veut maintenant châtier les assassins de Germaneau. « Ce crime ne restera pas impuni ». Il réunit donc les militaires et nos meilleurs spécialistes de nos services secrets. Pour faire quoi ? Pour attraper quelques dizaines de fanatiques islamistes qui, depuis des années, se baladent en toute impunité à travers des déserts plus immenses que l’Europe toute entière. Certes, notre aviation pourra détruire quelques campements de nomades perdus dans les dunes en Mauritanie, au Mali, au Niger. Mais on ne saura jamais si les morts de ces raids aériens étaient des militants de l’Aqmi responsables de la mort de Germaneau et nous ouvririons ainsi une « mini guerre » dont les expatriés français (et les intérêts français) dans ces différents pays seraient les premières victimes. Pendant des années, l’aviation française a pilonné, en vain, au nord du Tchad, les bandes de rebelles dirigés par Hissein Habré (qui avait, lui aussi, pris des otages français et en avait fusillé un) et finalement Habré est devenu président du Tchad et a été reçu avec tous les honneurs dus à un chef d’Etat à Paris. Les « gesticulations » de Sarkozy sont ridicules, irresponsables. Stigmatiser toute une communauté (contre laquelle on ne peut rien faire), annoncer des opérations de châtiment (contre des rebelles introuvables), ce sont des coups de menton qu’on peut faire devant une caméra pour un film de série B, mais pas quand on est chef d’Etat. Thierry Desjardins
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