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27/2/11 Thierry Desjardins
       Sarkozy va virer Alliot-Marie à défaut de se
                               virer lui-même !

Nicolas Sarkozy va-t-il virer Michèle Alliot-Marie ce week-end ? Tous les experts en « sarkologie » nous l’affirment, en précisant même qu’elle va être remplacée au Quai d’Orsay par Alain Juppé, lequel sera remplacé rue Saint Dominique par Gérard Longuet ou par Brice Hortefeux, lequel serait remplacé place Beauvau par Claude Guéant.

Après le retour de Juppé, celui de Longuet… Quand verra-t-on revenir, dans cette joyeuse équipe qui prônait la rupture, les Toubon, Carignon, Michel Noir, Perben et autres Godfrain d’antan, espoirs (tous bien décevants) des années 80 ?

Mais ce sont les mêmes experts qui nous avaient annoncé, à l’automne dernier, que le président de la République, conscient de l’ambiance générale du pays et souhaitant repartir d’un nouveau pied à la reconquête des Français, allait procéder à un vaste remaniement ministériel, remercier Fillon et nommer Borloo à Matignon. La sarkologie n’était pas une science exacte. On attendra donc, cette fois, d’entendre la voix impénétrable du seigneur.

Cela dit, tout le monde est d’accord pour reconnaître que Michèle Alliot-Marie ne peut plus rester au Quai d’Orsay, certains allant même jusqu’à se demander ce qu’elle est allée y faire. Sa nomination à la tête de notre diplomatie a, évidemment, été une erreur (de plus). Mais il fallait bien trouver un successeur à Kouchner dont la nomination avait déjà été une erreur, celle-là carrément monstrueuse.

Il est évident que les déclarations de Michèle Alliot-Marie sur l’aide que la France pourrait apporter à Ben Ali avec son « savoir-faire » en matière de maintien de l’ordre, puis ses vacances en Tunisie alors que l’insurrection avait déjà commencé, aux frais d’un corrompu du régime, puis le petit business de ses parents avec ce même corrompu l’ont totalement brûlée, carbonisée, vitrifiée et, en tous les cas, déconsidérée et discréditée.

Non seulement elle ne peut plus représenter la France à travers le monde (mais l’aurait-elle jamais pu ?) mais elle ne peut même plus regarder en face les diplomates français qui sont sous ses ordres au Quai.

Traînée dans la boue par l’opposition, par une bonne partie de la presse, lâchée par la plupart de ses « amis » et ostensiblement méprisée par son administration, elle se retrouve, à peu de choses près, dans la situation d’Eric Woerth, l’année dernière. Woerth avait été « plombé » pendant toute la discussion de la réforme des retraites qu’il devait mener Elle serait tout autant « plombée » pendant toute la présidence du G8 et du G20 par la France.

Il serait donc, en effet, charitable d’abréger son agonie.

Et personne n’aurait l’idée saugrenue de prendre sa défense tant elle a toujours été déplaisante à l’œil et à l’oreille avec son allure sèche, son ton cassant, sa morgue prétentieuse et sa lippe méprisante.

Cela dit, s’il sera assez plaisant de la voir tomber, sans doute à tout jamais, dans la trappe, il faut bien reconnaître qu’elle fait figure de lampiste.

On lui reproche d’avoir proposé à Ben Ali, déjà vacillant sur son trône, l’aide policière de la France. Qui peut croire une seule seconde qu’elle ait d’elle-même pris une telle initiative ? Il est évident que cette idée, aussi scandaleuse que folle et qui mettait en jeu au moins autant le ministère de l’Intérieur que celui ces Affaires Etrangères, venait directement de l’Elysée.

Henri Guaino vient d’ailleurs de rappeler que la politique étrangère était, sous la Vème République, du « domaine réservé » du président de la République.

On reproche ensuite à Alliot-Marie ses vacances de Noël en Tunisie et aux frais de son copain local. On a raison. Mais, au même moment, le premier ministre François Fillon et sa petite famille réveillonnaient… en Egypte… aux frais de Moubarak et Nicolas Sarkozy lui-même réveillonnait avec Carla… au Maroc… aux frais de Mohammed VI.

On reproche, enfin, à la pauvre femme les relations pour le moins étroites qu’entretenait son compagnon, Patrick Ollier, avec Kadhafi. Et il est vrai que ce nouveau et - veut-on croire - bien éphémère ministre des Relations avec le Parlement en a rajouté par le passé dans la compromission avec « le dictateur fou de Tripoli ».

Mais il faut tout de même rappeler que ce n’est pas le modeste député-maire de Rueil-Malmaison qui a accueilli à Paris, à bras ouverts, triomphalement et en l’embrassant sur la bouche, « le dingue de Cyrénaïque » aux mains pleines de sang et organisateur d’attentats épouvantables à travers le monde.

Ajoutons que « ne touchant pas une bille » (comme on ne dit pas au Quai d’Orsay) et à peine installée dans le fauteuil de Talleyrand (en fait, celui de Vergennes), Alliot-Marie peut difficilement être rendue coupable de tous nos échecs diplomatiques de ces dernières années avec, comme l’écrivaient cette semaine quelques diplomates anonymes, « une Europe impuissante, l’Afrique qui nous échappe, la Méditerranée qui nous boude, la Chine qui nous a domptés et Washington qui nous ignore ».

Guaino a raison. La politique étrangère est du domaine réservé du président de la République. C’est bien cela le drame.

Michèle Alliot-Marie s’est rendue coupable de mille choses mais, sans vouloir la défendre, il faut bien reconnaître qu’elle n’était responsable de rien.

Thierry Desjardins



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