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30/11/10 | Bernard Martoïa |
La panique financière gagne l’Europe ! Le 16 juin 1940, deux jours après la parade de la Wehrmacht sur les Champs- Élysées, la Chambre des Communes proposa l’union des gouvernements du Royaume-Uni et de la France pour « continuer la défense commune de la justice et de la liberté. » Le 30 novembre 2010, on entend sonner le même tocsin sur le marché obligataire européen alors que la situation est désespérée. Le marché ne croit plus les pusillanimes dirigeants européens Alors que la contagion de défaut de paiement gagne le vieux continent, le site de Market Watch (1) vient de mettre en ligne un papier qui résume les attentes de Wall Street pour sauver la zone euro : « If bond yields continue to rise sharply, we may see a much faster move toward a de facto fiscal union with a central debt management office and single European government bond, possibly under the auspices of the European Financial Stability Facility, initially.” Traduction : Si le rendement sur les bons européens continue de grimper fortement, nous pourrions assister à une union fiscale de facto avec un office central de management de la dette et un seul type d’émission de la dette, probablement sous les auspices du Fonds européen de stabilité financière, dans un premier temps. Le marché ne croit plus les pusillanimes dirigeants européens. Il réclame tout simplement le même sacrifice qu’offrit, trop tard, la Chambre des Communes pour venir en aide à la France. Il n’y avait que dix divisions anglaises sur le sol français, le 10 mai 1940, lors de l’attaque foudroyante, à revers dans les Ardennes, de la Wehrmacht. C’est la même chose qui est train de se produire sous nos yeux. L’ennemi d’hier est aujourd’hui le soutien indispensable à la monnaie unique, mais il n’a pas dépêché assez de divisions pour stopper l’attaque massive des requins. Comme je l’ai écrit lors de la création du Fonds européen de stabilité financière (2), cette cage en fer, décidée par les hautains Européens qui n’ont que mépris pour le marché, n’arrêtera pas les requins. Le barreau de la Grèce vient de tomber au fond de la mer Égée avec le rééchelonnement de sa dette en 2020. Ce pays n'honorera pas sa dette. Il ne l’a jamais fait par le passé, comme nous l’a appris l’excellent livre de Reinhart et de Rogoff (3), que nos dirigeants incapables n’ont pas lu. Un autre barreau est tombé au fond de la mer d’Irlande avec le sauvetage coûteux de ce pays. Les requins s’engouffreront dans la brèche avec la disparition prochaine du barreau espagnol. Ce sera la curée des petits poissons qui se croyaient à l’abri dans leur cage-providence. Un adage de Wall Street dit qu’un marché bearish ne fait pas de prisonniers. Les bons soldats mourront comme les autres. Des poissons français paniquent. Ils se délestent de leur portefeuille boursier et achètent à n’importe quel prix un appartement miteux à Paris. Le prix moyen du mètre carré dans la capitale dépasse 7000 €. Cette bulle immobilière crèvera comme toutes les autres. Mieux vaut rester liquide qu’acheter n’importe quoi ! La peur est mauvaise conseillère. Le plan B pour l’Europe Même si l’Allemagne acceptait le sacrifice suprême réclamé par Wall Street, cela ne serait pas suffisant pour sauver l’euro. Au risque de me répéter (4), le salut de la zone euro, comme celle de tout État pris dans la spirale de la dette, est de renouer avec une croissance de 5% par an. Les docteurs Knock de Paris et de Berlin exigent une saignée en contrepartie d’une aide financière versée aux PIGS. C’est exactement le contraire de ce qu’il convient de faire. Sans une baisse massive d’impôts et de charges sociales, il n’y aura pas de retour d’une croissance forte à même de générer des recettes fiscales pour enrayer la spirale de la dette. C’est le message adressé de Prague, où il est en tournée, par Nouriel Roubini. Celui que la presse américaine surnomme doctor Doom, est l’un des rares économistes à avoir prédit, dès 2005, l’éclatement de la bulle immobilière dans son pays d’adoption. D’origine turque, doctor Doom enseigne l’économie à l’université gauchiste de New York. (NYU) Le pot de terre et le pot de fer Le rapport de forces n’est pas en faveur d’une politique de l’offre. Les Keynésiens, qui sont omnipotents à Washington et à Bruxelles, préfèrent la courbe de Phillips à celle de Laffer. Ils croient qu’un peu d’inflation (5%) ferait baisser le chômage et redonnerait des marges de manœuvre en matière budgétaire. Ils ne veulent pas entendre parler de la courbe de Laffer qui montre que le rendement de l’impôt augmente avec la baisse du taux d’imposition. Depuis l’élection funeste de Woodrow Wilson, en 1912, aux Etats-Unis, le camp occidental est devenu progressiste. C’est sous sa présidence que la Fed et la progressivité de l’impôt sur le revenu ont été créées. Malheureusement pour l’Occident, le Tiers Monde pratique, depuis 1989, avec l’effondrement du camp communiste, une politique opposée. On sait comment se termine la fable du pot de terre et du pot de fer. Bernard Martoïa (1) Market Watch : « Contagion crisis intensifies ; Spain yield soars”. (2) Archive du 27 juillet 2010 : « La cage en fer, devisée par les Européens, n’arrêtera pas les requins. » (3) « Cette fois c’est différent : huit siècle de folie financière », de Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff. (4) Archive du 23 novembre 2010 : « Le plan B pour l'Europe. »
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