Retraites
: la capitalisation va s’imposer !
Les défilés de mardi, qui ont compté dans toute la France un peu plus d'un
million de personnes selon l'Intérieur, donnent des ailes aux syndicats qui
assurent avoir dénombré plus de deux millions et demi de manifestants. Pour
une démonstration de force rassemblant très majoritairement des salariés de
la fonction publique et toute la gauche antisarkozyste, unis pour l'occasion
dans un même refus obstiné du réel, je ne trouve pas ce résultat si
impressionnant. Je doute qu'il inquiète vraiment Nicolas Sarkozy, qui passe
à bon compte pour le réformateur audacieux qu'il n'est pas.
Même si la pilule sur les retraites est amère pour tout le monde, la
majorité des Français a compris qu'il était devenu nécessaire de travailler
et de cotiser plus longtemps. De ce point de vue, François Bayrou confirme
son peu de courage politique quand il explique, ce mercredi, que l'ampleur
des mobilisations a «changé l'ambiance» et oblige à «des corrections fortes»
du projet gouvernemental, notamment concernant le report à 67 ans de la
retraite à taux plein.
À dire vrai, le manque de courage est, sur ce dossier, le lot de tous les
hommes politiques. Aucun d'entre eux n'ose avouer, en effet, que le système
par répartition, créé par Vichy en 1941 dans une France homogène, n'est plus
viable à terme, ne serait-ce qu'à cause de l'écart croissant entre les
cotisants, de moins en moins nombreux, et les pensionnés. La véritable
injustice de cette réforme, qui veut perpétuer un système à la Madoff, est
de faire peser sur les jeunes générations le poids de cotisations toujours
plus lourdes dont rien ne dit qu'elles en toucheront tous les fruits.
D'ailleurs, quand le PS propose d'en appeler aussi à la fiscalité sur le
capital, il reconnaît implicitement l'incapacité des actifs à perpétuer,
entre eux seuls, leur propre solidarité. Pourquoi dés lors défendre un
système périmé ?
À l'évidence, la solution de la capitalisation va devoir s'imposer, en
complément de la répartition voire en remplacement. Je note d'ailleurs que
l'Assemblée nationale a adopté, mardi en commission, plusieurs amendements
UMP visant à favoriser ce type de retraites, déjà choisies par d'autres pays
d'Europe. Mais la pesanteur idéologique est telle, en France, que la
capitalisation reste un mot défendu. Je rappelle pourtant qu'en mars
dernier, L'Humanité a publié un sondage montrant que 53% des jeunes de moins
de trente ans souhaitaient une retraite par capitalisation. Plutôt que de
chercher à faire revivre un vieux système coûteux et inefficace dont, malgré
les réformes, tout le monde sait qu'il n'ira pas au-delà de 2018, ne
serait-il pas temps de réformer en profondeur l'État providence et ses
avatars, semblablement surendettés ?
Ivan Rioufol
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