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7/3/11 | Ivan Rioufol |
Le peuple veut être star ! L'institution qui, dans l'immédiat, a le mieux compris l'air du temps, c'est-à-dire la prise de pouvoir de l'opinion silencieuse contre les élites bavardes, est à rechercher du côté de la mode. Dior, en effet, a magistralement géré la déchéance de son créateur John Galliano, devenu la caricature obscène de l'auto-contentement et du mépris des gens. Immédiatement évincé du groupe après ses dérapages alcooliques et racistes, la maison de couture a maintenu son défilé de mode, vendredi dans l'enceinte du musée Rodin, en faisant monter sur scène, en clôture, l'ensemble des "petites mains" des ateliers, toutes habillées de leur blouse blanche. Les observateurs ont noté l'émouvante ovation debout réservée, comme jamais paraît-il, à cette mise en scène d'une humilité et d'un hommage rendu aux anonymes travaillant dans l'ombre. L'éviction de la star déjantée, cloitrée dans son univers jusqu'à en perdre la tête, et la promotion parallèle de ces lumineux artisans attachés à préserver leur savoir faire, illustrent bien, me semble-t-il, cette lassitude des Français d'avoir à subir des dirigeants qui ne semblent décidément rien comprendre de la vie que mène le peuple. Oui, il y a beaucoup de petits Galliano dans le monde politique et médiatique. Certes, ceux-là se garderont bien de justifier Hitler comme le fit, dans un bistrot parisien, le couturier imbibé et provocateur. Mais ces autres puissants, isolés semblablement dans leurs bulles idéologiques, peuvent déraper tout pareillement en n'ayant comme objectif, faute d'arguments, que d'humilier et de diaboliser leurs contradicteurs. Ceux-là seront donc traités de racistes, de fascistes, de pétainistes, d'escrocs et j'en passe. Ces procédés sont d'ailleurs devenus des lieux communs chez ceux qui en appellent généralement au respect de l'Autre. Aussi ne faut-il pas s'étonner de voir l'opinion marquer de plus en plus ses distances vis-à-vis de ces donneurs de leçons, mais aussi de ceux qui les redoutent et filent doux. Marine Le Pen, qu'un sondage publié dimanche donne en tête du premier tour de la présidentielle (23%), bénéficie actuellement de ce rejet des partis traditionnels. Elle continuera à fédérer d'autres petites mains, tant que les politiques, attirés par eux-mêmes, regarderont de haut ce qu'attendent les Français. Ivan Rioufol
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