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14/1/11 | Maxime Tandonnet |
Immigration : l’aveuglement volontaire
conduit à l'abîme ! Les modes idéologiques passent mais elles se ressemblent. Dans les années 1920 et 1930, il fallait être pacifiste. La plupart des grands noms de la littérature, de l’université et de la presse, par delà les étiquettes de droite ou de gauche penchent pour la paix à tout prix. Le 15 avril 1927, moins de six ans avant l’accession d’Hitler à la chancellerie, cent soixante personnalités, dont Henri Barbusse, Emmanuel Berl, George Duhamel, Pierre Mac Orlan, Jean Prévost, Romain Rolland, signent une pétition qui dénonce le vote de la loi Paul-Boncour sur l’organisation de la Nation en temps de guerre et permettant la suspension des libertés : « Ce texte nous semble abroger, pour la première fois, en temps de guerre, toute indépendance intellectuelle et toute liberté d’opinion, supprimer le simple droit de penser. Nous estimons qu’il constitue l’atteinte la plus grave qui n’ait jamais été portée à la liberté de conscience… ». De même, cent quatre-vingt six intellectuels apportent leur caution au «
Manifeste contre les excès de nationalisme » du 18 janvier 1931. Les auteurs
du manifeste « y affirment que le vrai visage de la France n’est pas de
haine et de guerre, mais de justice et de paix et protestent contre les
excitations chauvines qui tendent à le défigurer. Ils ne mettent pas leur
orgueil dans une politique de prestige ruineuse et périmée, la véritable
mission d’un grand peuple ne devant plus être déterminée par la politique
des armes, mais par celle de la raison. Ils déclarent que si l’on veut la
paix, il faut la vouloir sans hésitation ni ambiguïté, que chacun doit
prendre pour sa part ses responsabilités totales et qu’une guerre où la
France aurait sa part de faute mettrait cruellement le cœur des Français en
contradiction avec leur conscience d’hommes. » Les signataires de ce
texte proviennent de tous les courants de pensée, représentatifs d’un large
éventail de l’idéologie française : Julien Benda, Jean Cocteau, Jules
Romain, Roger Martin du Gard, Jean Paulhan, Raoul Dufy, Jean Giono y
cotoient Pierre Drieu La Rochelle, Alfred Fabre-Luce, Henri Jeanson, Paul
Morand, Bertrand de Jouvenel… Paul Valéry s’interroge dans LeTemps du
23 janvier 1931, deux ans avant l’arrivée au pouvoir des nazis : « Mais
comment, sans avoir perdu l’esprit, peut-on songer encore à la guerre ?
». Tout signe de dissidence face à la pensée dominante voue son auteur à la suspicion d’anticommunisme, voire de suppôt de la réaction. La complaisance envers les crimes des régimes communistes est une règle bien établie. Maurice Duverger, professeur de droit public, estime en 1955 que « la dénonciation des camps soviétiques ne hâte pas d’une seule minute la libération des déportés, mais peut, dans un certain contexte, aggraver les tensions entre les blocs qui tend à perpétuer les camps et les souffrances des déportés. » En somme, le responsable ultime du Goulag, c’est l’anticommuniste… Mai 68 marque l’apothéose du marxisme, dans ses interprétations diverses
– léninisme, trotskisme, maoïsme – comme idéologie des élites. La
contestation de la guerre du Vietnam donne lieu à une mobilisation d’une
ampleur et d’une véhémence sans précédent de l’ensemble des élites
françaises. L’adhésion au marxisme, explicite ou tacite, se mêle à
l’anti-américanisme en vogue. Les prises de position se succèdent, telle la
publication d’un manifeste dans Le Monde du 14 mai 1966, dénonçant un
« génocide du peuple vietnamien » au bas duquel figurent les signatures de
tout ce que la France compte d’écrivains, de philosophes et d’artistes à la
mode. Jean Lacouture, autre référence intellectuelle majeure de la deuxième
moitié du XXe siècle, proche de la gauche modérée, tresse les lauriers de
l’évacuation de Phnom Penh par les Khmers rouges, qualifiée «
d’audacieuse transfusion de peuple »[2], alors que cet évènement marque
le début de l’un des massacres les plus sanglants de l’histoire, celui de
deux millions de Cambodgiens. Quelques années plus tard, son mea culpa signe
la fin d’une époque d’aveuglement envers l’idéologie marxiste: « Pour le
Vietnam, je plaide coupable. Je m’accuse d’avoir pratiqué une information
sélective en dissimulant le caractère stalinien du régime Nord vietnamien.[3]
» Victime innocente de l’esclavage, du colonialisme, le migrant, en tant que tel, apporte avec lui la transformation, le rajeunissement, le rafraîchissement d’une Europe au passé maudit. La révolution ne se fera ni par la violence ni par les urnes, mais par la substitution d’un peuplement à un autre, ce à quoi ni Marx, ni Lénine, ni Jaurès n’avaient songé… Le migrant est à l’angélisme ce que le prolétaire fut au communisme, à la fois la victime et le vecteur d’un avenir radieux. « L’histoire nous enseigne que les migrations améliorent le sort de ceux qui s’exilent mais aussi font avancer l’humanité tout entière »[4] écrivait M. Kofi A.Annan, alors Secrétaire général des Nations Unis. De même : « La migration internationale est l’un des principaux facteurs de transformation du monde dans lequel nous vivons »[5]. L’angélisme est aussi une version contemporaine du pacifisme au sens où
il place les bons sentiments humanitaire au premier plan de ses valeurs. Il
secrète une fausse générosité, fondée sur le principe d’accueil
inconditionnel, sans la moindre considération ni pour le sort réel de celui
qui est accueilli ni pour l’impact de sa venue dans le pays de destination.
Il se nourrit d’hypocrisie, de tartufferie, de bigoterie : l’accueil oui,
mais jamais chez moi, pas dans mon jardin, ni dans mon quartier, ni dans
l’école de mes enfants. Il déteste la vérité, érige en tabous absolus des
questions de société comme celle de l’identité. Il développe enfin une
intolérance, une haine féroce envers ceux qui osent s’en prendre au dogme,
aussitôt insultés, dénoncés, diabolisés, jetés en pâture, traînés dans la
boue ou devant les tribunaux.
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