Immigration : la vérité ne
s’avoue qu’en privé !
Dans toute cette affaire, il est une chose à laquelle je ne parviendrai
jamais à m’habituer : l’hypocrisie. Pour avoir tout simplement déclaré au
Figaro Magazine qu’il souhaitait « réduire l’immigration régulière
», M. Claude Guéant est confronté à une nouvelle tornade d’indignation : «
Attaque contre les immigrés » (Fabius) ,« Discours de
stigmatisation » (Sopo, SOS racisme), « Vision nationaliste et
raciste » (Kader Arif, PS), « Bas instinct de l’électorat d’extrême
droite » (Voynet), « Concours des propositions les plus stupides
» (Dartigolles, PCF).
Or, le ministre de l’Intérieur, par ses propos, a tout bonnement pris acte
de ce que le taux de chômage des étrangers non communautaires atteint 23,4 %
et que la France n’a pas de travail à leur offrir. Il a constaté que 100 000
jeunes Françaises et Français se présentent chaque année sur le marché du
travail à la sortie de leurs études et que l’économie française ne produit
pas assez d’emplois pour leur fournir un travail !
On peut ne pas souscrire à ce raisonnement, mais pourquoi le caricaturer, le
lapider, le diaboliser ? Ce genre de débat a eu lieu en Espagne, en
Grande-Bretagne, en Allemagne dans un climat de consensus et sans déchaîner
une telle polémique haineuse. Dans quel pays vivons-nous ?
D’ailleurs, il faut le savoir, le clivage habituel entre immigration
régulière (supposée bonne) et immigration clandestine (mauvaise) est
artificiel : une grande partie de l’immigration régulière provient de la
régularisation de migrants clandestins.
Les donneurs de leçon qui poussent des cris d’orfraies aux propos du
ministre de l’Intérieur baignent dans l’hypocrisie. Ils savent bien que la
France ne peut pas accueillir tout le monde, n’en a pas les moyens. Ils le
savent, mais se donnent des airs de modernité, d’ouverture et de générosité
en accablant les déclarations de M. Guéant. Ils sont bien contents, au fond,
que d’autres fassent le « sale boulot » pour eux en essayant de contrôler le
flux migratoire.
J’aimerais raconter une anecdote dont je certifie l’authenticité, au mot
près, sur mon honneur. En mai 2006, nous sommes à l’Assemblée nationale.
J’accompagne, en tant que fonctionnaire, le ministre de l’Intérieur qui
défend le projet de loi sur l’immigration dont l’objectif est de limiter le
regroupement familial : désormais, un étranger qui voudra faire venir sa
famille en France devra disposer d’un revenu d’un travail équivalent au
minimum au SMIC et d’un logement adapté au nombre de ses enfants.
Un député PS se déchaîne dans l’hémicycle, devant les autres parlementaires
présents, le public, la presse et les chaînes de télévision, contre ce
projet de loi. Je ne me souviens plus de son nom mais je le vois encore :
grand, mince, la soixantaine, petite moustache, lunettes, élu d’une
circonscription du nord de la France. Il hurle dans le micro : « Votre
projet est une honte pour la France. Il rappelle les heures les plus sombres
de l’histoire. C’est un projet nauséabond, xénophobe, pétainiste. Une fois
de plus vous stigmatisez les étrangers dans notre pays. Une fois de plus
vous cherchez à déchaîner les passions haineuses et racistes en désignant
des boucs émissaires à la vindicte populaire ! »
Ce brave Monsieur, je le retrouve deux heures plus tard environ à la buvette
de l’Assemblée nationale. Il s’avance vers moi, jovial, sympa, un verre à la
main. Il m’offre un coup à boire et nous échangeons, en tête à tête. Je
m’attends à une engueulade. Or, ses paroles, qui viennent le plus
naturellement du monde, me laissent totalement pantois.
« Vous savez, chez moi, dans la ville dont je suis maire, l’immigration,
c’est une véritable catastrophe. Je ne sais plus quoi faire. Ils viennent de
tous les côtés, je n’ai rien à leur proposer, pas de boulot, pas de logement
social… Les gens (mes électeurs) n’en peuvent plus …
- Mais c’est un peu la raison pour laquelle nous proposons cette loi… »
Je m’attends, presque à coup sûr, à ce qu’il se remette à aboyer.
Stupéfaction :
« Oui, je sais, vous avez raison. Mais ce sera difficile vous savez, pour
remettre de l’ordre dans tout ça. Tant mieux si vous réussissez, je vous le
souhaite, il faut absolument faire quelque chose, mais ce ne sera pas
simple… »
Voilà. On peut me croire ou ne pas me croire bien sûr. J’ai plein de défauts
mais je ne suis pas menteur. Je donne ma parole à mes lecteurs de l’absolue
authenticité de cette anecdote qui en dit long sur l’hypocrisie ambiante…
Maxime Tandonnet
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