L'élection est passée, le
reste est à venir, les beaux
jours sont devant nous
L’élection européenne est derrière nous. Il faut attendre maintenant que
les acteurs en tirent les conséquences.
La rumeur rapporte que Nicolas Sarkozy devrait le faire dans quelques jours.
« Il prépare un gros coup », rapportent même certains articles du jour,
citant des conseillers anonymes qui, si ça trouve, racontent n’importe quoi
sous la commode couverture de l’anonymat. Un gros coup ? Quel gros coup ?
Débauchage ? Embauchage ? Sans doute très insuffisant pour modifier en
profondeur une situation économique, sociale, budgétaire, qui requiert des
traitements de fond autrement plus complexes à élaborer et à appliquer que
ne le sont quelques recettes de communication.
Le président de la République devra aussi trancher un autre problème, en
apparence mineur, mais qui devrait renseigner sur la franchise avec laquelle
les dirigeants politiques battent la campagne. Pas plus tard que tout à
l’heure, c’est-à-dire il n’y a pas longtemps, José-Luis Barroso, président
sortant de la Commission européenne sortante, c’est-à-dire l’exécutif de
l’Union européenne, excusez du peu, José-Luis Barroso, donc, a dit
officiellement qu’il repartirait bien pour un second mandat. Jusqu’ici,
Nicolas Sarkozy a peu caché l’agacement que lui procurait le personnage, pas
assez réactif à son goût, et trop libéral selon son jugement. Seulement, le
jeu des diplomaties fait que le président français comme les autres
dirigeant européens, devrait s’accorder sur le nom de José-Luis Barroso pour
ce second mandat. Et alors les députés européens de l’UMP devraient dire si
oui ou non ils donneront leurs voix, le moment venu, pour son
renouvellement, question qu’ils ont tous soigneusement fuie durant tout la
campagne.
De l’art d’obtenir un mandat aux contours flous, sans trop se mouiller,
sinon en promesses vagues et générales, ce qui n’est pas fait pour
réconcilier les citoyens avec l’action politique.
Des leçons, on en attend aussi à gauche. Avec la mesure que ce peuple et ses
journalistes portent à la chose politique, Daniel Cohn-Bendit est devenu
dans les journaux de ce matin un être supérieurement intelligent qui avait
tout prévu et autour duquel désormais tout va s’organiser. Puisque des
journaux le disent, c’est sans doute vrai. Très vite, donc, Europe Ecologie
va clarifier sa ligne politique, adapter son discours européen généreux – «
il faut créer 10 millions d’emplois verts en Europe », ben voyons, et
pourquoi pas onze ? - aux réalités françaises, répondre aux multiples
questions qui se posent à l’intérieur de nos frontières, sécurité,
immigration, fiscalité, coût du travail, financement de la sécurité sociale,
dégradation constante du commerce extérieur, et on en passe, inventer des
structures partisanes capables de réguler la créativités des Verts, des
pacifistes, d’Eva Joly, des altermondialistes, des végétariens et des
autres, désigner une direction, et un chef, et le tout, pourquoi pas, avant
le 14 juillet puisque après ce sont les vacances et qu’il faudra être en
forme à la rentrée.
Parfois, la politique, c’est plus simple que simple. Nous aurons sans doute
l’occasion d’en reparler dans quelques semaines.
En revanche, les socialistes, eux, ne se font pas d’illusions. Ils savent
que leur chemin sera encore long. Ils sont lucides. Leur longue marche a
commencé en 2002. Depuis, ils ont beaucoup cherché, beaucoup essayé, et au
final, ils n’ont rien trouvé. Les dirigeants de ce parti qui fut grand se
réunissent ce soir, à Paris, dans une formation qui leur est propre, appelée
Conseil national. Qu’attendent-ils exactement de cette réunion, et plus
spécifiquement de Martine Aubry, leur première secrétaire, qui demeurera en
poste vu que personne ne veut la remplacer ? « Des propositions audacieuses
», lit-on, « de l’audace », précise-t-on ailleurs, « de l’innovation »,
ajoute-t-on encore. Bien sûr c’est évident, il faut innover, inventer,
bousculer, surprendre. Autrement dit, débrouille-toi Martine, et encore, je
suis poli. C’est vous dire où en est rendu le parti socialiste.
Ses dirigeants ne savent plus quoi dire, et d’abord sur le fond. Faut-il que
ce parti jadis de gouvernement rejoigne dans sa tonalité les Besancenot,
Mélenchon, communistes, altermondialistes, José Bové, tiens, comme on les
retrouve, tous prêts à acheter aux capitalistes la corde avec laquelle ils
les pendront ? Ou bien les socialistes d’aujourd’hui doivent-ils se tourner
vers le sauveur de Washington, incarnation de ce qu’ils n’aiment pas au fond
d’eux-mêmes, mais en période de déboussolement total, Washington ou la
planète Mars, tout est utile quand on se noie.
L'élection est passée. Le reste est à venir. Les beaux jours sont devant
nous.
Jean-Michel Aphatie
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