Etat d’urgence sur les finances
publiques françaises
Banalités de fin de semaine. Le produit intérieur brut de la France s’est
contracté de 1,2 % au premier trimestre 2009. Statistique établie par
l’Insee, hélas pas une surprise, et qui fait dire à Christine Lagarde, dans
un premier commentaire, que finalement la contraction de croissance en
France, tout au long de l’année 2009, ne sera pas de 1,5 % comme prévu par
le gouvernement, mais de – 3 %.
Cela, nous le savions déjà, et depuis un moment. Les seuls qui ne le
savaient pas, pov’ choux, ce sont les parlementaires, députés et sénateurs,
qui ont voté, il y a moins d’un mois, une prévision budgétaire dépassée,
avec des recettes du coup surévaluées, et un déficit du coup minoré. On
l’avait pourtant écrit, mais les parlementaires ne me lisent pas. Dommage.
Remarquez, si moi je l’ai écrit, que le gouvernement sous estimait le choc
de la crise, c’est bien parce que je l’avais lu ailleurs, que d’autres
l’avaient dit. Mais sans doute les parlementaires français, qui font plein
d’autres choses à côté - je ne sais pas si vous le savez - n’ont-ils ni lu
ni entendu ce que disent depuis des semaines plein de gens, des économistes,
des analystes, j’en passe, et pas des meilleurs : le gouvernement français
vit avec des lunettes roses, dans le déni du choc économique que nous sommes
en train de vivre.
Imaginons donc le gouvernement un peu plus lucide, ce matin, sous l’effet
des chiffres de l’Insee. Plusieurs questions demeurent, si du moins l’on
veut bien considérer que les parlementaires, députés et sénateurs, doivent
représenter le peuple dans leur fonction et non pas se contenter des
demi-vérités gouvernementales.
Par exemple, dans le quatrième collectif budgétaire que les élus de la
Nation ont voté - espérons qu’avant le douzième ils se rebifferont un peu -
le gouvernement prévoyait 104 milliards d’euros de déficit budgétaire. Avec
la chute des recettes que va entraîner la perte de croissance annoncée, à
combien désormais le gouvernement va-t-il situer ce déficit ? Lui
posera-t-on au moins la question ? 120 milliards d’euros ? Davantage ? Et
que compte-t-il faire face à cette spectaculaire dégradation des comptes
publics ? Rien ? Quelque chose ? Et dans ce contexte de dégringolade
historique des finances publiques, comment va-t-il préparer le budget 2010 ?
Et les suivants ? Quelles mesures compte-t-il prendre pour tenter d’amortir
ou de limiter la descendante aux enfers ? Compte-t-il en prendre d’ailleurs
? Ou bien continuera-t-il de s’abriter derrière la soi disant Revue générale
des politiques publiques (RGPP) qui permet d’économiser quelques centimes
d’euros sur les gommes et les crayons mais qui ne correspond en rien aux
défis de la tempête que nous traversons ?
S’il existait un parlement en France, c’est-à-dire des élus qui n’auraient
pas l’embarras d’un mandat local en tête, mais uniquement l’intérêt d’une
Nation à l’esprit, ils ne jugeraient pas crédible le discours gouvernemental
répété et réitéré d’un refus d’augmentation des impôts, qui n’est ni
sincère, ni acceptable. Ou bien alors, ces parlementaires qui n’existent pas
en France pourraient tirer le constat d’une inertie gouvernementale grave et
préoccupante pour le futur immédiat du pays.
Si un parlement existait en France, il décréterait, au vu des chiffres
matinaux de l’Insee, l’état d’urgence sur les finances publiques françaises,
déjà désordonnées avant la crise, et désormais en voie de délabrement grave
sous ses coups de boutoir. Au lieu de cela, chaque député et chaque sénateur
entame son week-end qui n’est pas, non, un week-end de farniente mais un
week-end de travail pour ces représentants de la Nation qui sont en réalité
et avant tout, des élus locaux.
Jean-Michel Aphatie
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