Quand on construit sur des sables
mouvants, un jour tout s’enfonce
Que dire de plus que ce qui a déjà été dit sur la crise qui nous assaille
? Que dire d’utile, qui ne soit ni pessimiste, ni apocalyptique, ni
défaitiste ? Que dire de sensé, d’intelligent, sur ce monde qui déraille ?
Oui, certainement, il y aura des leçons à tirer de tout ceci. L’argent pas
cher par exemple. Qu’est-ce qu’on nous a gavé, et pendant des années, avec
cette politique américaine des taux d’intérêts bas, de l’emprunt facile des
ménages. Je me souviens de responsables politiques français qui jugeaient
drôlement formidable les présidents de banque centrale américaine, eux au
moins ils savaient baisser les taux d’intérêts alors que notre Jean-Claude
Trichet était dépeint comme un benêt, accroché à l’inflation, alors que
l’inflation, ah, ah, ah, ce n’est pas le problème...
Avez-vous oublié les noms de ces stratèges financiers qui ont accablé le
débat public de leurs certitudes ? L’argent pas cher aux Etats-Unis a eu une
vertu : les années d’expansion et de croissance. Il n’a qu’un défaut : à un
moment, pour une cause mal identifiée ou pas anticipée, tout explose.
L’économie a ceci de certain : quand on construit sur des sables mouvants,
un jour tout s’enfonce.
La France vit à crédit depuis trente ans. L’Etat vit à crédit depuis trente
ans. Des batailles sémantiques épuisantes ont fini par faire triompher
l’idée dans le public que ce n’était pas grave, que l’Etat ce n’est pas les
ménages, et qu’il faut être sot pour s’alarmer de la situation. Ben
voyons...
L’Etat, justement, devra s’endetter bientôt, très bientôt, et beaucoup, très
beaucoup. La dernière idée à la mode, qui n’est pas fausse, c’est bien le
drame, concerne ce « fonds de garantie » que l’Europe devra bien finir par
créer pour ramener de la confiance sur les marchés. Notre « plan Paulson » à
nous. L’argent public achètera des obligations pourries pour nettoyer les
marchés. Les banquiers peuvent dormir tranquilles, leurs fautes seront
rachetées, et cher.
Pour alimenter ce fonds, il faudra verser des sous. Of course. Beaucoup de
sous. Of course. Chaque Etat devra verser environ 3% de son PIB dans ce
fonds sans fond. Pour la France, ce sera de l’ordre d’une cinquantaine de
milliards d’euros. D’où les sortirons-nous ? De quel chapeau de magicien ?
Abracadabra... emprunt ! C’est, et de loin, ce que nous savons faire de
mieux en France. Et dans l’urgence, il se trouvera toujours des docteurs «
tant pis » pour nous faire avaler la potion.
Jean-Michel Aphatie
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