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12/2/09 Jean-Michel Aphatie
Pourquoi Total gagne autant de pognon et pas nous?

Qu’est-ce qu’une bonne nouvelle ? Et qu’est-ce qu’une mauvaise nouvelle ? Fastoche. Une bonne nouvelle, c’est une bonne nouvelle. Par exemple, votre patron vous demande de passer dans son bureau, vous entrez, il vous annonce : « Je vous augmente », bingo, bonne nouvelle. Autre exemple : le tirage du loto. En quinze ans de pratique régulière, vous n’avez jamais gagné. Pour une raison mystérieuse, sur laquelle d’ailleurs spéculent beaucoup les organisateurs du loto, vous êtes persuadé que le grand jour, les 40 millions d’euros, c’est pour ce soir. La roue tourne. Et puis non, vous avez bien le 2 et le 36, mais les autres numéros, tout à côté de la plaque, ce sera pour la semaine suivante. Donc, mauvaise nouvelle.

Deux exemples, simple, clair, bonne nouvelle, mauvaise nouvelle. Mais là, vous dites quoi? Total, le pétrolier, le mazoutier, totalise un gain de 13,9 milliards d’euros en 2008. Bonne ou mauvaise nouvelle ? Pas simple du tout. Si on aime le capitalisme, constater qu’une entreprise française pulvérise tous les records et amasse un paquet de pognon, c’est une excellente nouvelle. Mais en France, qui aime le capitalisme ? A part Paul-Loup Sulitzer, personne. Donc, ces 13,9 milliards d’euros suscitent davantage d’aigreur et de questions que de bonheur et de félicitations.

Qu’est-ce qu’il vont en faire, chez Total, de tout ce pognon ? A qui ils vont le donner ? Combien de bonus ils vont se distribuer ? Et puis, est-ce bien moral d’enregistrer de tels gains en temps de crise, de manière ponctuelle, au regard des principes élémentaires de la philosophie kantienne de manière générale ?

Comme d’habitude, tout le monde va s’en mêler. Des responsables politiques vont s’indigner, d’autres vont conseiller, d’autres encore réclamer. Les syndicats vont puiser là un motif d’indignation, les philosophes vont critiquer, les journalistes vont ricaner, Marianne va s’indigner, Pierre Péan va bougonner. Evidemment, les patrons de Total vont, à la fois et en même temps, laisser passer l’orage, faire le dos rond, hausser les épaules, écarquiller les yeux devant tant d’incompréhension, et finalement s’en foutre totalement au point de faire avec ces 13,9 milliards d’euros exactement ce qu’ils avaient prévu d’en faire avant que tout le monde s’en mêle. Ce qui veut dire qu’ils susciteront en retour beaucoup de frustrations, et peut-être même de la colère.

Conclusion : Total enregistre un profit record pour 2008 de 13,9 milliards d’euros et c’est une très, très, très, mauvaise nouvelle.

Jean-Michel Aphatie
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