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20/5/12 | Claude Reichman |
La preuve par l’asperge !
L’asperge est un légume délicieux qui réjouit nos assiettes au printemps. L’Allemagne en est devenue le premier producteur européen, tandis qu’en France les surfaces cultivées ont diminué de moitié en dix ans. Interrogée par Le Figaro, la présidente du syndicat des producteurs de légumes déclare : « La main d’œuvre représente 70 % du coût de production de l’asperge en France. Malgré une baisse récente des charges, le coût horaire d’un saisonnier est presque deux fois plus élevé chez nous qu’en Allemagne. » Et le journal de préciser qu’actuellement le salaire d’un saisonnier, charges patronales comprises, est de l’ordre de 10 euros, tandis qu’en Allemagne il varie entre 4 et 6 euros de l’heure. Dans l’asperge comme dans le reste de la production française, la Sécurité sociale poursuit donc son œuvre maléfique, renchérissant le coût de tout ce qui est produit dans notre pays et massacrant sa compétitivité. La réforme de notre système social devrait être la première préoccupation des gouvernants français et le premier sujet de débat dans les médias. Nous venons de vivre une campagne présidentielle où le sujet n’a même pas été abordé, pas plus qu’il ne le sera pendant les semaines qui nous séparent des élections législatives. Nous sommes donc de toute évidence dans le domaine du tabou. Celui-ci se définit comme une prohibition à caractère sacré. Le simple fait d’évoquer les problèmes créés par le poids abusif de notre système social vous met au ban de la société. Ou du moins de son expression officielle. L’exemple le plus frappant en a été donné par les deux derniers présidents de la République qui se sont proclamés l’un, Chirac, « garant » de ce système, et l’autre, Sarkozy, comme celui qui en avait maintenu toutes les prestations. Et c’est précisément pendant leurs deux quinquennats que la France a décroché de l’Allemagne, avec qui elle faisait jeu égal au début de la décennie et dont elle est aujourd’hui séparée par 10 points de dépenses publiques supplémentaires en France, tandis que notre voisin et partenaire affiche un excédent commercial de 170 milliards d’euros et nous un déficit de 70 milliards. Le débat public sur ce constat accablant ne porte jamais sur sa cause unique : le coût de la Sécurité sociale pour l’économie française, ni, par conséquent, sur le remède à y apporter. L’agriculteur qui produit des asperges, l’industriel qui fabrique des automobiles, le médecin qui doit se passer d’assistante et de secrétaire pour pouvoir maintenir son exercice, le jeune homme et la jeune fille qui voudraient bien trouver un emploi et fonder une famille, le quinquagénaire poussé hors de l’entreprise et qui se sent vieux tout d’un coup alors qu’il pourrait encore travailler pendant une bonne vingtaine d’années, tous ces Français que rien ne voue à l’échec, qu’il s’agisse de leur intelligence, de leurs capacités d’adaptation, de leur courage, y sont condamnés par un système maléfique dont personne dans la France officielle et dans la classe parlante n’ose dire qu’il faut le réformer d’urgence si notre pays veut éviter la catastrophe qui est en train de le pousser à l’abîme. La victoire d’un socialiste à l’élection présidentielle et la captation de tous les pouvoirs par ce parti politique est la conséquence de l’échec d’une droite incapable d’assumer la mission traditionnelle qui lui incombe et qui consiste à privilégier l’esprit d’initiative et la responsabilité individuelle, sans lesquelles il ne peut y avoir aucun progrès économique et social. Une fois de plus, l’adage qui veut qu’on préfère l’original à la copie se trouve vérifié. Giscard, Chirac et Sarkozy sont encore vivants et peuvent contempler leur œuvre. La France, qui n’en est pas à sa première catastrophe ni à sa première résurrection, doit maintenant trouver en son sein celui ou celle qui lui rendra sa chance dans le monde tel qu’il est devenu et non dans l’univers fantasmagorique où ses « élites » le font vivre et croupir. Le premier acte de ce nouveau sauveur national sera aussi simple et beau que celui du semeur. Il rendra leur argent à ceux qui l’ont gagné, leur dira qu’ils sont assez grands pour en faire le meilleur usage et se protéger raisonnablement contre les aléas de l’existence, promettra à chacun de ceux que la vie a blessés qu’il veillera à ce qu’ils aient secours et soutien de la société, qu’il en sera, à bon droit cette fois, le garant, et que pour le reste l’amour de son pays et la possibilité d’y vivre en homme libre remplaceront avantageusement toutes les doctrines fallacieuses et mortifères qui avaient instauré la dictature de la collectivité. Je propose, quand ce jour sera venu, qu’on institue, au printemps, une journée de grâce pour la liberté retrouvée où chacun mettra sur sa table un plat d’asperges. Pour se souvenir du temps où elle ne poussait plus chez nous. Claude Reichman
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