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29/10/07

Claude Reichman

Attachez vos ceintures !

Les émissions politiques du week-end ont ceci d’instructif qu’elles permettent de mesurer l’état clinique des princes qui nous gouvernent et des médias qui nous restituent leur chanson de geste. Le dimanche 28 octobre, on nous parlait des retraites sur une chaîne et de la réforme de la constitution sur une autre. Concernant les retraites, on nous a dit que les régimes spéciaux n’étaient pas tenables. A propos de la constitution, M. Balladur, chargé par M. Sarkozy de proposer, avec une commission nommée à cet effet, une réforme, a intelligemment exposé quelques-uns des résultats de ces cogitations. Mais ce qu’on n’a pas appris, c’est comment, une fois les régimes spéciaux réformés, on ferait face au krach de l’ensemble des retraites, qui se déroule sous nos yeux et qui va se traduire par la ruine des retraités, ni ce qui, une fois les suggestions de la commission Balladur inscrites dans le marbre, pousserait les gouvernants de la France à prendre les problèmes à bras le corps et à dire la vérité aux Français.

Si nos compatriotes n’ont pas le moral, c’est parce que le pouvoir ne répond pas à leurs inquiétudes sur ces sujets. Et qu’ils ont en outre l’angoissante sensation que non seulement on ne veut pas, en haut lieu, leur parler sans détours, mais que surtout ni les gouvernants ni les opposants, ni les journalistes, même spécialisés, n’ont la moindre idée de ce qu’il faudrait faire. Et ce qu’on a pu constater ce week-end comme les autres jours, c’est que les uns et les autres tournent sur les plateaux de radio et de télévision comme des mouches dans un bocal.

On se demande combien de temps cette comédie va encore durer. Chaque jour qui passe voit les emplois disparaître ou se délocaliser, les déficits s’aggraver, l’insécurité et la violence gagner du terrain, et cela semble ne susciter aucune réaction des gouvernants ni des citoyens. Comme si tout le monde semblait convaincu qu’il n’y a plus rien à faire sauf à attendre la catastrophe finale qui emportera le régime et rebattra toutes les cartes. Quand une société ne parvient pas à résoudre ses problèmes, elle n’a de choix qu’entre la guerre et le chaos, l’un n’empêchant d’ailleurs pas l’autre. La France n’a pas de projet guerrier en magasin, il ne lui reste donc plus que le chaos, puisque la réforme est impossible.

M. Sarkozy avait bien compris que seule l’idée de la rupture pouvait lui faire gagner l’élection présidentielle. Mais du contenu et surtout des moyens de cette rupture, il n’avait pas la moindre idée. D’où l’incroyable flottement de sa gouvernance, qui le voit s’agiter comme un ludion sans qu’il ne donne jamais l’impression de savoir où il va. Les Français ont d’ores et déjà compris qu’il n’y aura pas de rupture. On continue d’appliquer des mesures technocratiques, on les retire dès qu’une opposition se manifeste, on fait des gestes qui se veulent forts mais qui n’ont pas de véritable contenu et qui ne sont que des trucs pour épater la galerie, bref on fait semblant de gouverner.

« A quand l’émeute ? » s’interrogeait M. Martin Hirsch à la une du Monde avant de devenir quelques semaines plus tard, « haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté ». Ni ce qu’il fait dans ses fonctions, ni ce que font ses collègues du gouvernement n’éloigne l’émeute. Ou ce qui en tiendra lieu, car il y a des dissidences plus silencieuses mais non moins puissantes, comme par exemple celle des Japonais qui cessent de payer leurs cotisations de retraite parce qu’ils sont sûrs de ne rien toucher le moment venu et qui accélèrent d’autant la désagrégation du système. Ou comme ces Français découragés qui vont chercher à l’étranger un avenir que leur propre pays ne leur permet plus d’espérer, le privant ainsi des ressources que leur esprit d’entreprise lui aurait procurées.

A l’arrivée, le résultat sera celui qu’on peut dès à présent apercevoir : un effondrement économique et social, dont ne pourra que naître une crise politique majeure. Il semble bien qu’aujourd’hui il n’y ait plus d’autre issue. Attachez vos ceintures, nous allons traverser un sacré trou d’air.

Claude Reichman
Porte-parole de la Révolution bleue.

 

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