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Les attentats de Madrid mettent la France face à ses faiblesses

15/3/04 Claude Reichman
Les terribles attentats de Madrid prouvent que le premier devoir des démocraties est de se défendre. La tâche est pour elles particulièrement difficile parce que le pouvoir y est par définition limité à la fois par des règles de droit et par les dissensions politiques qui ont toute latitude de s'y exprimer. C'est bien pourquoi le roi d'Espagne Juan Carlos en a immédiatement appelé à "l'unité, à la fermeté et à la sérénité dans la lutte contre le terrorisme, avec tous les instruments de l'Etat de droit, en redoublant nos efforts pour en terminer avec cette plaie ", tandis que le président du gouvernement sortant, José Maria Aznar, promettait de vaincre le terrorisme "grâce à l'autorité de la loi et à l'unité de tous les Espagnols ". On peut faire confiance à l'Espagne pour mener ce combat avec toute la détermination et tous les moyens nécessaires. Elle a la chance d'avoir un grand roi, qui garantit l'unité de la nation, et une authentique formation politique de droite sûre de ses idées et sans complexe, et qui  saura réagir à son injuste défaite électorale du 14 mars 2004. L'Espagne vaincra le terrorisme et continuera à donner le spectacle d'un pays au passé ancien et prestigieux qui a réussi à épouser la modernité sans renoncer à son être ni à sa tradition.

Ah ! si la France pouvait s'inspirer de cet exemple ! Notre pays, hélas, est en plein désarroi. Mal gouverné depuis trente ans, déchiré par les égoïsmes catégoriels, saigné à blanc par les exigences des prébendiers, au premier rang desquels figure la classe politique, désinformé en permanence par des médias qui déshonorent le métier de journaliste, démoralisé par des marginaux animés de la détestation d'eux-mêmes, qui ne voient d'issue à leur déréliction que dans la destruction du pays et le malheur de ses habitants et à qui la presse offre complaisamment ses tribunes que leur absence totale de représentativité ne justifie en rien, tandis que les authentiques représentants du peuple en sont impitoyablement écartés, tel est le sombre tableau que la France offre aux regards de l'univers. Tout ce malheur nous vient d'une cause principale, que nous avons cent fois dénoncée, et qui est la captation du pouvoir par la caste des énarques, appuyée sur l'armée des fonctionnaires subalternes, qui sont deux fois plus nombreux que dans tous les Etats comparables et qui ne prospèrent que sur la ruine des actifs et des entreprenants, lesquels sont opprimés au point qu'ils n'ont plus ni l'idée ni le temps de s'occuper de la politique de leur pays, abandonnant son sort et le leur à la clique la plus malfaisante qui l'ait jamais dirigé.

Résister à la barbarie

Mais voilà que ces trois misérables décennies sont sur le point de s'achever par la déroute du régime. Déjà il a perdu le contrôle de la situation économique. M. Raffarin avait eu raison, dans un bref moment de lucidité, de diagnostiquer, en janvier 2003, " une rupture de croissance ". Oui, c'est bien d'une rupture qu'il s'agit, et non d'une crise passagère. La France ne retrouvera le progrès économique qu'après une purge monumentale au cours de laquelle elle se débarrassera de tous les mécanismes et les coûts sociaux qui font qu'il est impossible d'entreprendre et de gagner de l'argent dans notre pays. Comment nos compatriotes pourraient-ils devenir conscients des véritables causes de leurs malheurs quand, dans " Cent minutes pour convaincre ", la principale émission politique que la télévision publique a prévu de programmer à l'occasion des élections régionales, pas une seule fois les leaders des formations en lice n'ont évoqué la liberté économique (à l'exception de M. Le Pen, qui a indiqué avoir dirigé une PME pendant trente ans, mais à qui le présentateur n'a pas songé à demander quelle leçon il en tirait) ? Or c'est bien ce manque total de liberté économique, en raison d'une pression administrative et sociale délirante, qui empêche la France de bien se comporter dans la compétition internationale.

Il convient d'y ajouter le poids d'une immigration incontrôlée et dont les pouvoirs publics s'acharnent à dissimuler l'ampleur. Plutôt que d'avouer qu'il y a au moins 20 % d'immigrés récents dans la population française actuelle et d'organiser à ce sujet un grand débat national au cours duquel les Français auraient à dire d'une part s'ils souhaitent que se poursuive ce flux migratoire ou s'il convient d'y mettre un terme, et d'autre part quelles mesures il convient de prendre pour assimiler ces personnes, les gouvernements successifs - et celui de M. Raffarin ne fait pas exception à la règle - n'ont pas cessé d'avancer des estimations mensongères, alors qu'il existe au ministère de l'intérieur et dans divers organismes officiels des statistiques qui permettent de connaître les véritables chiffres de l'immigration, que nous avons plusieurs fois publiés.

La vérité que les attentats de Madrid viennent de lancer au visage de l'Europe, c'est qu'elle a eu grand tort de vivre dans l'illusion de la paix éternelle que la construction communautaire était censée lui procurer, et de s'alanguir dans la paresse et le laisser-aller moral générés par les folles largesses de l'Etat-providence. Face à un tel défi, il faut des citoyens debout. Et à la tête de la nation, non pas des politiciens faillis mais des chefs exemplaires. Quelques pays de l'Union européenne en sont dotés, pas la France. Ils existent dans le peuple. A celui-ci, dès aujourd'hui, de prendre la parole. Et de porter au pouvoir ceux qui, " soldats aux cheveux gris, contraints par la nécessité ", comme les décrivait Homère, auront pour tâche immédiate de résister à la barbarie. Un mot que les Grecs employaient pour désigner ce qui était étranger à leur civilisation.

Claude Reichman

 


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