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21/4/06 | Claude Reichman |
Avis de décès de la Sécurité sociale « Je suis oiseau : voyez mes ailes. » On ne sait si Michel Rocard est grand lecteur de La Fontaine, mais il s’est manifestement inspiré de « La chauve-souris et les deux belettes » pour créer la CSG en 1990. S’agissait-il d’un impôt ou d’une cotisation sociale ? Pour pouvoir y assujettir tous les résidents fiscaux en France, il fallait que ce fût un impôt. C’est cette qualification qu’a retenue le Conseil constitutionnel dans sa décision du 28 décembre 1990. Malheureusement pour cette thèse, le Comité CSG veillait. Considérant que la CSG (et la CRDS créée en 1996) financent la Sécurité sociale et doivent donc être qualifiées de cotisations sociales, il a entrepris de contester ces deux taxes au niveau européen. Par deux arrêts du 15 février 2000, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) lui a donné raison. Le gouvernement français en a tiré les conséquences en modifiant par une ordonnance du 2 mai 2001 les conditions d’assujettissement à la CSG et à la CRDS. Désormais n’y sont plus soumis que les résidents fiscaux qui sont assurés pour la maladie à la Sécurité sociale française. Ce qui est logique, puisque la CSG et la CRDS sont des cotisations sociales et que la double cotisation est interdite par les dispositions communautaires. La CSG était frappée à mort, car au même moment la France, suite aux
actions du Mouvement pour la liberté de la protection sociale (MLPS),
finissait par transposer les directives européennes de 1992 qui suppriment
tout monopole social en Europe. A tout citoyen français usant désormais de
la possibilité de s’assurer pour la maladie ailleurs qu’à la Sécurité
sociale, la CSG ne pourrait plus être appliquée. Autant dire qu’elle ne
pourrait plus l’être à personne, car on n’imagine pas que puisse persister
une taxe aussi lourde à laquelle il est aussi facile d’échapper ! C’est la
raison pour laquelle le gouvernement français décida de ne pas respecter les
lois qu’il venait pourtant de faire voter et fit obstacle à l’exercice par
les citoyens de leur droit de quitter la Sécurité sociale. Contraints de poursuivre un combat qu’ils avaient pourtant gagné, le MLPS et le Comité CSG ont dû alors multiplier les actions et les procédures, face à un gouvernement qui n’hésitait pas à mentir effrontément et à des médias dont bien peu se sont intéressés à cette bataille pourtant capitale, puisque de la liberté de l’assurance et de la concurrence entre les assureurs dépend directement l’allègement des charges des entreprises et des particuliers et par conséquent la reprise de la croissance économique sans laquelle la France est condamnée au drame social et humain dont nous voyons se dérouler depuis quelques années les terribles secousses. Mais tout a une fin. Celle du monopole de la Sécurité sociale est
désormais imminente, en même temps d’ailleurs que celle de son principal
moyen de financement, la CSG. Or voilà qu’à l’occasion d’un différend portant sur l’application de la
convention fiscale franco-britannique, la Cour de cassation s’est vue
demander pour avis par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris
si la CSG et la CRDS « doivent être considérées comme des impôts ». La Cour
de cassation pouvait parfaitement répondre que, conformément à la
jurisprudence communautaire et à la sienne propre, il ne s’agit pas d’impôts
mais de cotisations sociales, mais cela n’aurait pas réglé le problème,
puisqu’en matière de contentieux fiscal, c’est le Conseil d’Etat qui est le
juge suprême et que pour lui la CSG est un impôt. Et c’est ainsi que dans quelques mois, 70 milliards d’euros de CSG et 5 milliards d’euros de CRDS vont s’envoler dans la nature, puisque non seulement il sera possible d’échapper à leur application aux revenus d’activité et de remplacement, mais aussi aux revenus de placement, puisqu’on ne peut leur appliquer que des impôts et non des cotisations sociales. Il aura donc fallu quinze ans de combat au MLPS et dix au Comité CSG pour venir à bout du système-social-que-le-monde-entier-nous-envie. Exprimons notre gratitude aux magistrats suprêmes de notre pays dont la discorde sera venue à bout de l’obstination dans l’erreur et de la folie des politiciens français qui se sont imaginés qu’ils pouvaient faire l’Europe tout en restant en dehors ! Et rendons hommage une fois encore au bon La Fontaine qui, dans « L’huître et les plaideurs » avait depuis longtemps tout prévu : « Pendant tout ce bel incident, Claude Reichman
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