Retraite par répartition : la plus grande
escroquerie de l’histoire de France !
Le 14 mars 1941, « aux heures les
plus sombres de notre histoire », selon la formule consacrée, était
édictée une loi « relative à l'allocation aux vieux travailleurs
salariés », par laquelle :
« Nous, Maréchal de France, chef de l'Etat français,
Le conseil des ministres entendu,
Décrétons :
Article 9
§ 1er - Les retraites et pensions de vieillesse des assurances
sociales sont constituées sous le régime de la répartition. »
Le but de cette loi inique était de spolier du jour au lendemain des
millions de Français de l’épargne qu’ils avaient patiemment constituée
dans des fonds de pension depuis des décennies.
Non content d’avoir, pendant plus de 70 ans et au travers de deux
républiques, entériné cette loi vichyste et élargi son champ
d’application à d’autres catégories professionnelles, le pouvoir
législatif crut bon, par une nouvelle loi du 20 janvier 2014 de «
réaffirmer solennellement le choix de la retraite par répartition ».
Estimons-nous heureux que la représentation nationale n’ait pas «
réaffirmé solennellement » d’autres « acquis sociaux » de la même
époque, comme la loi portant statut des Juifs signée par le même
ministre René Belin…
Mais intéressons-nous au détail de cet article L111-2-1 du Code de la
sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi du 20 janvier 2014.
Outre le fait de « réaffirmer solennellement » son attachement à un «
acquis social » du régime de Vichy par ailleurs tenu pour le Mal absolu,
outre le très étonnant besoin de « réaffirmer solennellement » un
système de retraite entré dans les faits depuis plus de 70 ans, il y a
un autre point qui ne manque pas de surprendre dans cet article, c’est
l’objectif assigné à quatre reprises ( !) à ce système de retraite par
répartition : celui d’assurer une équité entre les générations.
- « …le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social
qui unit les générations »
- « Les assurés bénéficient d'un traitement équitable au regard de la
durée de la retraite comme du montant de leur pension, quels que soient
… la génération à laquelle ils appartiennent. »
- « La Nation assigne également au système de retraite par répartition
un objectif de solidarité entre les générations… »
- « La pérennité financière du système de retraite par répartition est
assurée par des contributions réparties équitablement entre les
générations … »
Equité entre générations, au regard donc à la fois des cotisations (des
« contributions ») et des prestations (durée de retraite et montant de
pension).
Or, comme nous allons le voir, cet objectif d’équité entre générations
n’a jamais été assuré effectivement pendant les 75 ans d’histoire de ce
régime par répartition, tout simplement parce que c’est le principe même
de la répartition qui est incompatible avec une telle équité.
D’après les chiffres officiels du Conseil d’orientation des retraites (Évolutions
et perspectives des retraites en France, Rapport annuel du COR, juin
2015 ), l’évolution des taux de remplacement est la suivante :
- pour un cas type de salarié du privé non-cadre à carrière
complète et sans interruption, le taux de remplacement net à la
liquidation passe de 80% pour la génération 1940 à 72% pour la
génération 1963, et sera comprise entre 63 et 72% pour la génération
1990 suivant les scénarios retenus.
- Pour le même cas-type, le taux de remplacement net moyen sur le cycle
de vie passe de 77% pour la génération 1940 à 73% pour la génération
1955 et sera compris entre 55 et 70% pour la génération 1990 suivant les
scénarios retenus.
Toujours d’après les chiffres du COR et concernant cette fois les
indépendants (https://www.cor-retraites.fr/IMG/pdf/doc-150.pdf) :
- pour un exploitant agricole avec un revenu net fiscal de 0,9 SMIC, le
taux de remplacement passe de 58% en 2000 à 39% en 2040
- pour les médecins, le taux de remplacement passe de 54,8% en 2000 à
35,6% en 2040.
Dans toutes les catégories socio-professionnelles, et malgré les
augmentations de taux de cotisations passées et prévues, les taux de
remplacements diminuent fortement au fil des générations (à la notable
exception près des fonctionnaires bénéficiant d’un taux de remplacement
remarquablement constant).
A vrai dire, ces chiffres ne font que confirmer une évidence
mathématique, à savoir que les taux de remplacement (de même que les
taux de cotisations et les durées de retraite) ne peuvent respecter une
équité entre générations dès lors que le ratio entre actifs et retraités
n’est pas fixe et évolue au fil des générations.
Que dire d’une loi qui affirme dans le même article deux principes
contradictoires et incompatibles entre eux, celui de la retraite par
répartition et celui de l’équité entre générations, sinon qu’elle bafoue
le principe constitutionnel de clarté, d’intelligibilité et de
non-contradiction de la loi ?
Plus grave, cette inégalité de traitement entre générations,
inhérente au principe même de retraite par répartition, constitue une
discrimination liée à l’âge, non justifiée par un motif légitime
(puisque le motif légitime affiché dans le même article est justement
celui de l’équité entre générations).
Cette discrimination liée à l’âge est contraire :
- au principe d’égalité reconnu par la Constitution et découlant des
articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de
1789 ;
- à l’article 14 et au protocole n° 12 de la Convention de sauvegarde
des droits de l’homme et des libertés fondamentales (interdiction de
discrimination) ;
- à la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un
cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi
et de travail, transposée par la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant
diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le
domaine de la lutte contre les discriminations.
Deux points de procédure sont intéressants à souligner :
- Premièrement, que le juge national chargé d’appliquer les dispositions
du droit de l’Union a l’obligation d’en assurer le plein effet en
laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition
contraire ; que s’il se déclarait néanmoins incompétent, il lui
appartient de saisir lui-même la Cour de justice de l’Union européenne à
titre préjudiciel.
- Deuxièmement, concernant la charge de la preuve en matière de
discrimination, qu’il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il
n’y a pas eu violation du principe de l’égalité de traitement.
Quand les Français se réveilleront et comprendront qu’ils ont été
victimes de la plus grande escroquerie de l'histoire de
France, la terre tremblera dans notre pays.
Dr Jean-Nicolas Boullenois