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30/3/09 | Jean-Louis Caccomo |
Quand les cerveaux sont en grève au pays des Lumières … On sait déjà depuis Jean-Baptiste Say, Frédéric Bastiat et Adam Smith que, quand les responsables politiques interviennent dans l'économie, il y a nécessairement des effets que les sages considèrent comme logiques quand les ignorants ou les pseudo-savants les qualifient de « pervers ». Le qualificatif « pervers » de ces fameux effets non désirés vient seulement du fait que ceux qui interviennent à coups de massue dans le système complexe que constitue une économie ne les avaient pas prévus, ce qui est une indication de leur ignorance ou de leur insolence. On peut toujours postuler comme hypothèse de travail - à l’instar des nouveaux modèles de croissance - l’existence d’un régulateur bienveillant et omniscient qui aurait la capacité de dompter l'économie en optimisant une fonction de bien-être social. Dans la réalité, une telle entité est une chimère et cette hypothèse frise le scientisme. Par principe de précaution, auquel les responsables politiques semblent si attachés par ailleurs, on ne devrait donc pas intervenir dans l'économie lorsqu’on n’est pas en mesure de prévoir la somme infinie des effets qui vont se déployer... et qui se retournent souvent contre l’objectif initialement visé. Tout marché fonctionne sur le principe d'une dynamique d'ajustements sans fin entre prix et quantités. Si on prend une mesure dont l'effet est d'accroître le pouvoir d'achat des ménages, et si les ménages utilisent ce pouvoir d’achat retrouvé, cela aura pour effet normal d'accroître la demande (et/ou l’épargne). Si la demande augmente, l'offre étant donnée, le prix augmente normalement (mais pas nécessairement lorsqu'il y a une offre disponible). Ce n’est pas un effet pervers, c’est normal ! D’autant que l'augmentation du prix n'est pas en soi une mauvaise chose. L’augmentation des prix, c'est le signal qui va provoquer à son tour une réaction de l'offre. Si le prix monte, cela incite les offreurs à accroître les capacités offertes sur le marché, ce qui était l'objectif de la mesure initiale. C’est pourquoi tous les pays qui ont supprimé la liberté des prix sont entrés dans une économie de pénurie. Dans une économie de liberté, il faut accepter la première règle fondamentale du fonctionnement des marchés : pour que les quantités s’adaptent, les prix doivent être flexibles. Et cela est valable pour tous les prix (comme le salaire ou encore le taux d’intérêt). Sur certains marchés, les prix vont parfois baisser (ce qui va inquiéter les producteurs), tandis que sur d’autres marchés, les prix seront amenés à monter (ce qui va affoler les consommateurs). Mais l'Etat, garant de l'intérêt général, ne doit prendre le parti ni des uns ni des autres. Quand on écoute les commentateurs, c’est la crise dans l’immobilier lorsque les prix montent sans cesse ; mais quand le marché se retourne et que les prix baissent, ils concluent à nouveau que c’est la crise. On me parlait déjà de la crise quand j’étais étudiant en économie. Croire que l’économie est perpétuellement en crise, c’est montrer simplement que l’on ne saisit pas l’essence des mécanismes que l’on cherche à mettre sous les feux de l’actualité. Lorsque le prix d’un actif A augmente, son rendement va nécessairement diminuer puisqu’il faut sortir une plus grosse somme d’argent pour obtenir le même flux de revenus lié à la possession de cet actif. Ainsi, la hausse des prix a nécessairement une limite : lorsque le rendement sera jugé trop faible en comparaison avec d’autres placements, les investisseurs se tourneront vers d’autres actifs en vendant l’actif A. Il en découle une baisse du prix de l’actif A. Si la baisse se poursuit alors le rendement va se redresser… Que telles évidences fassent encore débat au pays des Lumières nous montre tout le chemin qui reste encore à parcourir en matière de compréhension de l’économie. Mais quand les cerveaux sont en grève… Jean-Louis Caccomo |