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5/1/13 | Claude Reichman |
Ces deux France qui ne se supportent plus ! L’affaire Depardieu a beau tourner à la farce avec l’irruption de Poutine et des éléphants de Brigitte Bardot, elle n’en secoue pas moins l’opinion publique. Ce qu’elle révèle au grand jour, c’est qu’une partie des Français estime n’être plus chez elle dans son pays, au point que l’idée de le quitter ne lui paraît plus insensée. En réalité, deux France s’affrontent depuis longtemps sur le même territoire. Jusqu’à présent, elles avaient cohabité à peu près paisiblement, mais la crise de 2008, qui n’a pas fini de tout bouleverser, les conduit à s’opposer l’une à l’autre de plus en plus violemment. D’un côté, la France des fonctionnaires veut maintenir ses avantages quoi qu’il en coûte au pays. De l’autre, la France du secteur privé subit la tornade sans précédent qui s’abat sur les entreprises et ravage l’emploi, et ne sait plus à quel saint se vouer. C’est précisément à ce moment que le pays a porté M. Hollande à sa tête. Ce choix était aussi logique qu’insensé. Logique, car les socialistes ayant conquis les communes, les départements, les régions et le Sénat, n’avaient plus qu’à s’installer à l’Elysée et à l’Assemblée nationale. Insensé, car faire de la France une principauté collectiviste dans un univers qui ne l’est plus depuis longtemps et où tous les pays commercent librement entre eux revenait à la condamner d’avance à l’effondrement économique et aux drames sociaux. Nous y sommes. Et du coup, les deux France se regardent l’une l’autre et prennent conscience de la différence grandissante de leur mode de vie et de leurs perspectives. La France du secteur privé constate qu’il n’y a ni pauvres ni chômeurs dans la France des fonctionnaires, et que les 1500 chômeurs supplémentaires qui augmentent chaque jour la masse immense des 5 millions de personnes sans travail proviennent tous de son camp. La France des fonctionnaires n’a pas un regard pour ce drame qui ne la concerne pas. Mieux, elle continue d’investir dans l’immobilier, ce qui fait que seuls les salariés du public, assis sur la garantie de l’emploi et de la rémunération, peuvent espérer devenir propriétaires dans notre pays. Prospérité et tranquillité d’un côté, appauvrissement et angoisse de l’autre. A votre avis, cela va-t-il pouvoir durer longtemps ? Evidemment pas. Hollande et ses affidés sentent bien que le climat devient explosif. Il leur faut à tout prix (« coûte que coûte », pour reprendre l’incroyable expression du chef de l’Etat à propos de la lutte contre le chômage lors de ses vœux) des boucs émissaires. Ils sont tout trouvés : « les riches ». Mais voilà : l’affaire Depardieu a réveillé d’un coup non pas « les riches », qui ont depuis longtemps pris leurs précautions et mis une ou plusieurs frontières entre eux et les fonctionnaires qui règnent sur la France, mais les futurs pauvres du secteur privé qui savent bien que le chômage est le plus sûr moyen d’accès au statut de SDF. Pour maintenir l’organisation du pays autour des fonctionnaires et de leurs privilèges, Hollande ne peut faire autrement que d’augmenter les impôts. C’est ce qu’il a fait et continuera de faire tant qu’il ne sera pas chassé par l’émeute. L’autre possibilité qui s’offre à lui consisterait à punir son propre camp en baissant les dépenses publiques. Les observateurs raisonnables - y compris ceux du camp adverse - pensaient qu’il le ferait, tant il n’avait pas d’autre choix pour maintenir la paix civile et tant il est habituel qu’un pays appelle pour faire le ménage le chef du clan qui pose problème. Hélas, hélas, hélas, ce gros benêt de Hollande a cru qu’en étant normal il résoudrait tout ce qu’il y d’anormal en France. Pour lui, c’est maintenant l’heure de vérité. Ou bien il se résout à faire aux dépens du camp des fonctionnaires ce que De Gaulle a fait aux partisans de l’Algérie française. Ou bien le pays sera à feu et à sang avant longtemps. Depardieu, sincèrement désolé, regardera le spectacle dans sa datcha, un verre de vodka à la main. Allez, amis lecteurs, tous mes vœux, courage, et à la bonne vôtre ! Claude Reichman
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