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11/7/09 Catherine Arnst

Vous pouvez choisir entre 240 modèles de voiture, pourquoi pas votre assurance maladie ?

Le nouveau gouvernement de Barack Obama a fait de la réforme du système de santé l'une de ses priorités, en prévoyant notamment d'étendre la couverture maladie aux quelque 45 millions de citoyens qui n'en bénéficient toujours pas. Il n'est donc pas surprenant que les experts l'inondent de propositions de réformes. L'ancien sénateur Tom Daschle, que le futur président avait nommé secrétaire à la Santé, [avant qu’il ne doive renoncer à son poste en raison de problèmes fiscaux, NDLR], envisageait même d'organiser des forums dans tout le pays afin de recueillir de « nouvelles idées » auprès de la population.

L'une des voix les plus dérangeantes dans ce débat est celle de Regina Herzlinger, professeur de gestion à la Harvard Business School. Cette femme passe pour une hérétique en matière de santé parce qu'elle est favorable à une couverture maladie qui ne serait fournie ni par l'Etat ni par les entreprises. Elle s'intéresse avant tout aux besoins du consommateur, un point souvent négligé dans les nombreuses discussions sur la réforme de la santé. « Pourquoi le secteur de la santé ne peut-il pas être géré comme celui de la distribution ? » s'interroge-t-elle. Si les hôpitaux, les compagnies d'assurances et les médecins devaient tous se faire concurrence sur le marché pour trouver des clients, elle estime que l'innovation se développerait, que les prix baisseraient et que la qualité s'améliorerait.

Sur la scène politique en matière de santé, Regina Herzlinger, 64 ans, est considérée comme l'une des partisanes les plus engagées d'un système dicté par les consommateurs, où le patient serait considéré comme un client. Dans son monde idéal :
- les consommateurs définiraient leur propre couverture maladie en faisant leur choix sur un marché national de l'assurance ;
- tout le monde serait obligé de contracter une assurance, et l'Etat fédéral exercerait un contrôle étroit afin de garantir l'équité des prix et des services offerts ;
- de petits hôpitaux spécialisés prendraient en charge les patients qui n'ont pas besoin de tous les services proposés par les centres de soins ;
- une base de données nationale stockerait les prix et les performances de chaque hôpital et clinique, afin que les consommateurs puissent faire leur choix en connaissance de cause;
- les particuliers bénéficieraient d'importants abattements fiscaux pour financer leur propre assurance, les ménages les plus pauvres percevant des aides financières.

Aucune de ces idées ne ressemble vraiment à une proposition démocrate ou républicaine, mais Regina Herzlinger conseille des personnalités politiques des deux bords. Dans son emploi du temps, elle jongle entre ses multiples conférences devant des conseillers, des responsables politiques, ou des dirigeants de tous bords, et son cours de gestion, intitulé « Innover dans le secteur de la santé », est très prisé.

Ses détracteurs- et ils sont nombreux -affirment que le secteur de la santé est trop complexe pour que les consommateurs fassent leur propre tri eux-mêmes, et que la couverture maladie est une charge financière trop lourde à supporter pour les ménages.
« Un système de santé dicté par les consommateurs n'est sûrement pas la bonne solution », estime le docteur Robert Galvin, directeur du département santé de General Electric, qui considère que Regina Herzlinger a des idées innovantes mais que les Américains n'ont pas envie de renoncer à l'assurance fournie par leur employeur. Il plaide en faveur d'un « consumérisme encadré », dans lequel les employeurs s'occuperaient de la gestion.

Le pouvoir aux patients

Regina Herzlinger, au contraire, pense que seuls les consommateurs doivent s'en occuper. C'est la condition sine qua non, explique-t-elle, pour que les innovations qui améliorent la qualité se développent pleinement. « Si les gens sont assez intelligents pour choisir entre 240 modèles et marques de voitures, relève-t-elle, pourquoi partir du principe qu'ils ne peuvent pas en faire autant quand il s'agit de leur santé ? » Elle ajoute que ses suggestions sont « relativement peu coûteuses », ce qui les rend encore plus intéressantes en cette période de crise.

Bien qu'inscrite au Parti républicain et membre du Manhattan Institute, club de réflexion libertarien, Regina Herzlinger ne veut pas d'un marché déréglementé. Elle ne croit pas non plus que les comptes d'épargne santé, préconisés par de nombreux républicains, soient la meilleure solution. Ces plans, qui associent d'importants abattements à des exonérations d'impôt, n'ont été adoptés que par environ 6 % des Américains, et elle trouve ça normal. « Les consommateurs devraient disposer de centaines d'options de couverture. »

Dans le livre qu'elle a publié en 2007, « Who Killed Health Care ? » (édité par McGraw-Hill, qui, comme Business Week , fait partie de The McGraw-Hill Companies), elle accuse les hôpitaux, les assureurs, l'Etat, les prestataires de soins réglementés, les entreprises et même ses propres collègues universitaires de s'être ligués contre le consommateur afin de contrôler le secteur de la santé. Du coup, elle se retrouve quelque peu isolée dans ce débat, mais au rythme où elle enchaîne les conférences, elle a le sentiment de faire des adeptes. « Vraiment, insiste-t-elle, comment peut-on être contre le consommateur ? »

Catherine Arnst
(Business Week)

 

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