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25/5/08 | Bernard Martoïa |
Constitution : pour une vraie réforme,
il faudra encore attendre ! La réforme constitutionnelle est entrée dans sa phase décisive avec le débat au parlement. Si elle ne passionne pas les Français, elle engage néanmoins leur avenir. Tout d’abord, cette réforme était indispensable en raison du déséquilibre engendré en 2000 par l’abaissement du mandat du président de la république à un quinquennat. Notre dernier roi fainéant n’a pas voulu en tirer les conséquences mais son successeur est prêt à le faire. Pour résumer, il y a seulement deux types de régimes politiques qui fonctionnent correctement dans le monde : présidentiel ou parlementaire. Le nôtre, qui est un mélange des deux, n’a jamais donné entièrement satisfaction. Il fallait donc l’aligner sur l’un ou sur l’autre. Compte tenu de la préférence des Français pour l’élection de leur président au suffrage universel, c’est l’alignement sur le premier qui est à réaliser avec l’actuelle réforme de la constitution. L’alignement du mandat présidentiel sur celui des députés rend tout d’abord obsolète la fonction du Premier Ministre (articles 21 et 22 de la constitution) La dyarchie au sommet de l’Etat, voulue par le fondateur de la V République, est une source constante de frictions et de chevauchements de compétences. Pour autant il ne semble pas que ce hiatus serait effacé… Pourquoi ? L’actuelle constitution est une usine à gaz avec 89 articles. Pour mémoire, la constitution américaine de 1787, qui est la plus vieille en vigueur dans le monde, ne comporte que sept articles ! Toute réforme doit viser la simplicité. Il y a de quoi s’inquiéter avec l’inscription des langues régionales demandée par le parlement français qui ne rate pas une occasion de se discréditer. Il est à craindre que le projet actuel nous laisse sur notre faim. Fixer une limite de deux mandats consécutifs au président va dans le bon sens mais pourquoi ne pas l’étendre aux autres mandats exécutifs (maires et présidents de région) pour lutter contre la corruption endémique ? Le pouvoir corrompt tous les hommes. Nous déplorons également l’absence de la règle du non cumul des mandats pour combattre la corruption. En revanche, nous souscrivons pleinement à l’initiative du président de réduire à quinze le nombre de ministères. Écrire dans le marbre les prérogatives du gouvernement est une excellente chose pour prévenir les chimères socialistes ! Souvenons-nous du ministère loufoque du « temps libre » instauré par Pierre Mauroy. A titre de comparaison, voici la liste des quinze ministères du gouvernement américain. 1 agriculture
2 intérieur * Le Department of Homeland Security a été créé après la tragédie du 11 septembre 2001. Fait notable, il n’existe pas de ministère de l’économie dans la plus grande puissance économique de la planète. L’économie n’a vraiment pas besoin d’énarques pour la piloter. (confer mon article du 20 avril 2008 intitulé « Et si on laissait Dieu gouverner la France ? » et que vous pouvez relire sur mon blog www.droite-conservatrice.com) L’institution d’une vice-présidence est indispensable dans un régime présidentiel. Elle ne figure malheureusement pas dans le projet de Sarkozy. L’intéressé se croit-il immortel ? A-t-il jamais pensé à ses successeurs ? Fâcheux oubli qui démontre, une fois de plus, qu’une constitution imposée par un seul homme a peu de chances de lui survivre. L’histoire de France est un cimetière de constitutions : quinze à ce jour… En ce qui concerne les nouveaux pouvoirs dévolus au parlement, il y a peu de bonnes choses dans ce projet. Bon est le partage de l’ordre du jour ou l’autorisation du parlement sur les interventions des forces armées à l’étranger. Mauvaise est la possibilité offerte aux ministres de retrouver un siège au parlement quand est mis fin à leur fonction. Enfin, l’essentiel est passé sous silence : à savoir le contrôle de la dépense publique par le parlement qui serait assisté par un organisme d’audit indépendant comme c’est le cas au Royaume Uni. Le lobby des énarques prétend que la Cour des comptes suffirait à la tache. C’est oublier que cette vénérable institution est sous leur coupe et que les loups ne se mangent pas entre eux. Autre motif d’inquiétude : la place de la chambre haute. On ne peut faire l’impasse sur le rôle primordial qui est dévolu au sénat dans un système présidentiel. Le sénat américain contrôle toutes les nominations importantes : juges fédéraux, juges à la Cour Suprême et ambassadeurs. C’est lui aussi qui a le dernier mot dans la procédure de destitution du président initiée par la chambre basse. Enfin, le sénat américain assume pleinement sa représentativité territoriale : deux sénateurs par Etat fédéré. Ce n’est pas le cas du sénat français. Pour ce faire, il faudrait instaurer l’élection au suffrage universel direct des sénateurs à l’instar de leurs homologues américains depuis le dix-septième amendement à la constitution adopté en 1913. Ce projet de constitution est l’occasion unique de revoir à la baisse les effectifs pléthoriques du palais du Luxembourg et du palais Bourbon. A titre de comparaison, il y a respectivement 100 sénateurs et 431 députés pour une population de 300 millions d’habitants aux États-Unis. En revanche, il y a 331 sénateurs et 577 députés dans un petit pays comme la France qui ne compte que 62 millions d’habitants. Si nous sommes plus pauvres que les Américains, il ne faut pas chercher plus loin ! Avec l’élection d’un sénateur par département et par DOM-TOM, on ferait l’économie de plus de deux cent sièges dans cette assemblée qui ronronne depuis trop longtemps. Pour l’assemblée nationale, réduisons de moitié son effectif en fixant la barre à 200 000 électeurs par circonscription électorale Tant pis si des départements faiblement peuplés n’auront plus de député puisqu’ils seront mieux représentés par leur sénateur ! La réforme de la justice est oubliée. Il faut impérativement garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire. Tant que cette condition ne sera pas réalisée, on baignera dans une détestable confusion des pouvoirs. La liste des affaires classées est digne d’une république bananière. Le scandale du procès d’Outreau a mis en exergue le crucial besoin de réformer la justice. A quoi ont servi les centaines d’heures d’audition par les parlementaires ? A rien si ce n’est à tromper l’opinion publique. Il y a pourtant une solution toute simple : l’élection des juges. Aux Etats-Unis les juges dans les Etats fédérés sont élus par le peuple et les juges fédéraux, présentés par le gouvernement, doivent être confirmés par le sénat. Des dizaines de juges fédéraux qui ont failli à leur mission, ont été révoqués par le sénat. Au bas de l’échelon judiciaire (comté), la sanction prend une autre forme : le mauvais juge n’est pas réélu par le peuple. Dans cette révision, une place minimale est accordée au peuple souverain. Le référendum d’initiative populaire serait instauré mais avec la condition draconienne de plus de quatre millions de signatures. La barre à un million pour rejeter les initiatives farfelues aurait amplement suffi. Si l’on veut empêcher le peuple de s’exprimer, on ne saurait mieux s’y prendre… Une initiative vraiment libérale serait d’instaurer la procédure de reconvocation du corps électoral (recall election) lorsqu’un élu a failli à sa mission. Cette procédure démocratique est en vigueur en Californie où il faut réunir un million de signatures pour qu’une autre élection ait lieu. Le gouverneur Gray Davis a été incriminé pour sa mauvaise gestion des deniers publics. Il a été battu par Arnold Schwarzenegger lors de l’élection du 7 octobre 2003. Avec cette épée de Damoclès entre ses mains, le peuple exercerait vraiment sa souveraineté. Bernard Martoïa
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