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15/4/12 | Claude Reichman |
Cet incident qui marque le
début de la révolution ! Deux institutions vont disparaître : le salariat et l’école. Ceux qui prétendent diriger le pays devraient le savoir et en tirer les conséquences. Le salariat est né de l’industrialisation. Celle-ci requérait des travailleurs réunis en un même lieu et affectés à des postes fixes. Le progrès économique a engendré le progrès social, et les salariés ont bénéficié de protections contre la maladie et pour leurs vieux jours qui ont pris nom de « sécurité sociale ». Mais ces « avantages » n’étaient en fait que des éléments du salaire. C’est l’augmentation régulière des salaires qui a permis la constitution puis le développement de la « sécurité sociale ». L’époque contemporaine a fait voler en éclats le cadre dans lequel s’étaient développés le salariat et la « sécurité sociale ». Les économies modernes sont fondées sur les activités tertiaires, même si l’industrie reste un facteur essentiel de prospérité. Mais quand les deux tiers des emplois sont fournis par le secteur tertiaire et que celui-ci est caractérisé par l’informatisation et par les évolutions très rapides de la société, il n’est plus possible de maintenir des régimes de « sécurité sociale » concernant toute la population active. La « sécurité sociale » universelle a vécu. L’immense majorité des entreprises où travaillent l’immense majorité des salariés sont vouées à des adaptations permanentes qui exigent une organisation souple. La garantie de l’emploi y est devenue incompatible avec la survie de l’entreprise. Inutile donc de s’accrocher désespérément à un statut : il ne peut conduire qu’au chômage. C’est l’explication du drame français : à force de refuser tout assouplissement du contrat de travail et de ses appendices sociaux, on provoque la disparition de l’emploi. L’avenir est donc à des contrats de fournitures de services, le salarié devenant un entrepreneur unipersonnel, assurant par lui-même sa rémunération et sa protection sociale. La souplesse ainsi injectée dans le fonctionnement de l’économie sera la meilleure garantie de son développement et de la prospérité générale. Quant à l’école, elle repose sur une formule plurimillénaire qui a également vécu. Le triptyque « une classe, un maître, trente élèves » va être remplacé par « un ordinateur, un maître, des millions d’élèves ». Ce qui ne veut pas dire que les enseignants vont disparaître, mais qu’ils vont devoir se porter au chevet des élèves pour améliorer leur compréhension et les mettre régulièrement à niveau dans un cadre qui pourra être individuel ou collectif, mais dont les parents seuls ou groupés seront maîtres, et non plus l’Etat. De quelque côté que l’on se tourne, ce sont les statuts qui vont disparaître, ces statuts dont raffole la société française, qui ont exigé une première révolution au 18e siècle et qui en rendent une autre indispensable en ce début de 21e siècle. Bien entendu de tels changements se font toujours dans la douleur. Ils
peuvent même aller jusqu’à provoquer un chaos. Sauf si une élite de la
société fait l’effort d’en préparer la venue et de les expliquer au peuple.
En France, aujourd’hui, on en est loin. Les élites, indignes de ce titre,
préfèrent s’adonner à la chasse aux privilèges et à l’argent, et communient
dans le mépris du peuple. Comme celui-ci s’en rend parfaitement compte, il
ne faudra pas s’étonner qu’il se livre soudain - mais après des décennies de
patience - à ce grand ménage qu’est toute révolution. Il se pourrait bien que l’histoire retienne cet incident comme le début de la nouvelle révolution française. Claude Reichman
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