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Les   vraies causes du déclin français

2/1/04 Claude Reichman
Les "élites" françaises n'aiment ni la liberté, ni le capitalisme. Et, bien entendu, elles fuient leurs responsabilités. Telles sont les vraies causes du déclin français, comme on peut en juger aux exemples suivants.

Un magistrat indépendant sanctionné

Dans son édition datée des 28 et 29 décembre 2003, le journal Le Monde révèle que le juge Thierry Brunet, de Nîmes, a vu sa promotion au poste de vice-procureur de la République à Toulon annulée par le ministère de la justice. La raison officielle de cette annulation serait un incident survenu entre le juge et deux gendarmes lors de sa précédente affectation à Toulon, le magistrat ayant grillé un feu rouge et ayant été verbalisé alors qu'il n'avait pas ses papiers sur lui, ce qui lui avait valu une réprimande du Conseil supérieur de la magistrature. L'incident ayant eu lieu il y a plus de dix ans, il est évidemment couvert par deux amnisties présidentielles. Si bien qu'il faut chercher ailleurs la raison de cette sanction. Elle réside en fait dans un jugement rendu en avril 2003 par le juge Brunet et confirmant pour la première fois en France l'abrogation du monopole de la Sécurité sociale. Inutile de préciser que le gouvernement, qui voyait ainsi son mensonge officiel voler en éclats, n'a pas apprécié et a attendu l'occasion de faire payer son indépendance au magistrat.

Dehors, les technocrates !

Chassez le naturel, il revient au galop. Enarque passé dans le privé et devenu président de la Société générale, Daniel Bouton a publié dans Le Monde un long article comprenant " treize propositions pour la réforme de l'assurance maladie ". Hormis une brève allusion finale à la nécessité d' " introduire des éléments de concurrence " dans la gestion de la Sécurité sociale, l'article est un véritable chef d'œuvre de délire administratif. M. Bouton, qui fut directeur de cabinet d'Alain Juppé au ministère du budget de 1986 à 1988, n'a manifestement rien appris ni rien compris. Sa proposition la plus abracadabrantesque consiste à prôner " l'institution au profit de la Sécurité sociale d'un droit à récupération sur les successions des dépenses médicales des dernières années de la vie ". Comme si les personnes âgées et malades n'avaient pas cotisé toute leur vie quand elles étaient jeunes et bien portantes, ce qui est le principe même de la " solidarité entre les générations " telle que l'a organisée le système français de sécurité sociale. Si celui-ci est aujourd'hui en faillite, c'est en raison de son monopole, qui lui a permis d'échapper à toutes les règles prudentielles et de bonne gestion. Une fois de plus, les technocrates qui dirigent la France ne voient pas d'autre solution que de faire payer au peuple leurs monstrueuses erreurs. Il est grand temps que le peuple fasse payer aux technocrates leurs fautes, dont beaucoup sont des crimes, en les chassant définitivement du pouvoir.




A bas le capital !

Les acheteurs d'actions des entreprises publiques françaises privatisées au cours des dix dernières années ont, dans l'ensemble, fait de bonnes opérations. Plusieurs de ces titres, comme la BNP, Rhône Poulenc, Crédit Lyonnais, Elf Aquitaine, les AGF, Renault, la CNP et Pechiney cotent au moins deux fois plus que lors de leur introduction en Bourse. D'autres réussissent à sauver la mise initiale, comme Air France, Aérospatiale, Seita, EADS, Orange ou ASF. Parmi les perdants, France Télécom, Thomson Multimédia, Wanadoo et surtout Bull, dont l'action ne vaut plus que 0,77 € alors qu'elle se négociait à 5,49 € lors de sa mise sur le marché en 1997. De manière générale, ce sont les actions les plus anciennes qui se révèlent les plus profitables, justifiant la règle qui veut qu'un placement boursier se juge à long terme. Selon l'enquête de l'Insee sur le patrimoine des ménages, " si le pouvoir d'achat du capital augmentait au rythme moyen observé de 1951 à 2000, soit 5 % pour les obligations et 9 % pour les actions, le capital investi doublerait en 14 ans et 7 mois pour les premières et seulement 8 ans et 5 mois pour les secondes ". Quelle bonne idée d'avoir choisi, pour la retraite des Français, la répartition plutôt que la capitalisation !

Que d'eau, que d'eau !

Les inondations à répétition dans le Midi ne doivent rien au hasard. Les fortes précipitations sont habituelles en cette saison. Ce qui leur donne des conséquences catastrophiques, ce sont les méthodes agricoles qui, depuis un demi-siècle, ont tassé les sols et supprimé les talus qui retenaient les eaux, l'urbanisation, qui a réduit la capacité d'absorption des excédents d'eaux en raison du goudronnage généralisé, et surtout le développement de la construction dans les zones à risque. La responsabilité de ceux, préfets ou maires selon l'époque, qui ont accordé de tels permis de construire est accablante. On ne comprend pas que des procès exemplaires ne leur soient pas encore intentés. Certes, ils pourraient se prévaloir de la forte demande et de la pression que celle-ci a exercée sur eux, mais le rôle d'un responsable n'est pas de céder à n'importe quelle revendication. A cette occasion comme en bien d'autres, on doit constater une très dangereuse perversion de la vie publique en France. Les sinistrés peuvent s'estimer victimes de la démagogie et de l'irresponsabilité, bien plus que des colères de la nature. Aujourd'hui, il ne leur reste que les yeux pour pleurer et qu'à augmenter de leurs larmes le niveau des eaux.

Claude Reichman

 

 

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