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15/3/13 Thierry Desjardins
                             Habemus Papam !

Une fois de plus les spécialistes et les bookmakers se sont complètement trompés. Ils nous avaient annoncé un pape jeune, peut-être de couleur, voire même favorable au mariage des homosexuels et des prêtres, à l’avortement et à l’euthanasie. Mais les voies du Saint Esprit et du Conclave sont plus difficiles encore à prévoir que celles de tout autre électorat.

Le successeur de Benoit XVI a 76 ans, il est argentin mais blanc de peau et fils d’Italiens immigrés et, tout jésuite qu’il soit, semble très à cheval sur les grands principes. Comme le titre assez drôlement, et sans doute à regret, Libération, il est « argentin mais pas gaucho ».

En fait, ce qui semble surprendre les premiers commentateurs, c’est que ce nouveau pape a l’air de croire en Dieu et aux Saintes Ecritures. Il croit que la vie est un don de Dieu et que l’homme ne peut donc pas y attenter avec l’avortement ou l’euthanasie ; il pense que les prêtres doivent offrir leur vie à Dieu et à leur troupeau et qu’ils doivent donc faire vœu de chasteté et de célibat ; il est convaincu que Dieu a créé l’homme et la femme pour former un couple et donc que le mariage homosexuel est une offense au Créateur.

Bref, avant longtemps nos bons esprits vont faire de Sa Sainteté le Pape François un réactionnaire de la pire des espèces et ressortir de vieilles rumeurs qui l’accusent de n’avoir pas eu une attitude irréprochable en face de la dictature argentine. Mais peut-on vraiment reprocher à un pape de croire en Dieu et de respecter la parole divine ? Et à l’ancien archevêque de Buenos Aires de ne pas être entré dans le combat politique ?

On peut espérer au moins qu’on lui accordera son désir d’être « le pape des pauvres ». Pendant toute sa vie, en Argentine, il a voulu être proche des malheureux et aider les plus défavorisés et il n’a pas choisi le prénom de Saint François d’Assise par hasard.

Contrairement à ce qu’affirment certains, l’Eglise fait déjà beaucoup pour venir en aide aux plus pauvres et jusque dans les moindres villages. Mais il est évident que si le successeur de Pierre prenait la tête d’une véritable croisade contre la misère qui dévaste chaque jour davantage certaines régions du Tiers-Monde comme certains quartiers de nos propres banlieues, l’aura qui l’entoure permettrait - peut-être - de faire un peu bouger les choses.

La lutte contre la pauvreté, la faim, l’illettrisme, les épidémies est un combat autrement plus urgent à mener qu’une réforme de la Curie romaine, que la lutte contre les évangélistes ou même qu’une condamnation (qui s’impose) de la pédophilie, les trois missions que la presse semble attribuer à François.

Alors que le monde entier est plongé dans une crise économique sans précédent, qu’en jouant au bonneteau avec l’argent-roi les banques ont jeté à la rue des masses considérables de pauvres gens, que les organisations internationales, les agences de notation et les gouvernements affolés imposent aux peuples une rigueur qui les conduit à la famine et qu’on apprend qu’il y a de plus en plus de milliardaires sur cette planète, il est bon que le chef de plus d’un milliard de catholiques se présente en « frère des pauvres ».

Cela dit, on ne voit pas très bien ce que, face au FMI, à la Banque mondiale, à Wall Street et à la City, le pape pourrait bien faire. A part exprimer des vœux pieux, bien sûr, et prêcher dans le désert.

Peut-être pourrait-il tout au plus donner mauvaise conscience à certains et surtout ouvrir les yeux des « maîtres du monde » en leur répétant inlassablement que tout cela ne pourra pas durer indéfiniment et qu’ils pourraient bien connaître un premier châtiment avant même le jugement dernier. Ce serait déjà beaucoup.

On peut d’ailleurs parier qu’avant longtemps, « les puissances d’argent » vont accuser François d’être, en effet, un affreux réactionnaire sous prétexte que, non content de s’en prendre aux homosexuels, il voudrait aussi s’en prendre au Veau d’or, ce qui est autrement impardonnable.

Thierry Desjardins

 

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