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23/6/12 Thierry Desjardins
             Le piège s’est refermé sur Hollande !

La France vient de vivre des mois de campagnes électorales, c’est-à-dire que les Français ont pu se distraire et s’amuser du spectacle que leur offraient les différents protagonistes de la compétition, en oubliant un peu les réalités.

C’était comme à la foire avec le stand de tir, la femme à barbe, les autos-tamponneuses, la cartomancienne et l’illusionniste. Sur leurs petites estrades, ils ont évoqué n’importe quoi, du mariage des homosexuels au vote des étrangers, en passant par le permis de conduire. Un seul des candidats a osé aborder les vrais sujets, la dette et la compétitivité. C’était François Bayrou. Il a été ridiculisé à la présidentielle, éliminé aux législatives.

Malgré la crise épouvantable qui frappe le pays, jamais sans doute une campagne présidentielle n’avait été aussi médiocre. On l’a dit mais il faut le répéter. Tout s’est fait « sur la tête du client ». Les Français ne supportant plus Nicolas Sarkozy pour mille raisons (le bling-bling, le président des riches, le président zigzag, le flirtichonneur avec l’extrême-droite, l’ancien ami de Kadhafi et d’Assad, etc.). François Hollande, en leur promettant « le changement maintenant », leur offrait simplement de changer de président et de remplacer une tête par une autre, la sienne en l’occurrence. Du coup, il a été élu, de justesse seulement d’ailleurs.

Mais maintenant il se retrouve vainqueur mais gros jean comme devant, à la tête d’un pays qui, lui, n’a pas changé. Il se dit « normal », mais il ne peut plus faire le malin. Comme son prédécesseur, il a en face de lui plus de 4 millions de chômeurs et 10 millions de pauvres (et ça va s’aggraver), des entreprises qui, par centaines, licencient, se délocalisent ou ferment carrément (et ça va s’aggraver), une dette qui se creuse chaque jour davantage.

Comme son prédécesseur, il n’a pas le choix. Il lui faut de toute urgence réduire les dépenses et augmenter les recettes, tout en relançant l’économie.

L’illusionniste devient funambule.

Réduire les dépenses c’est réduire le nombre des fonctionnaires. Comme il avait promis d’embaucher des enseignants, des policiers et des magistrats, il va lui falloir « taper » dans les autres ministères qui ne sont pas « prioritaires ». Mais il s’était engagé à ce que les services de l’Etat retrouvent tout leur rôle et à écouter les syndicats qui, ne représentant plus que les fonctionnaires, ne vont évidemment pas tolérer ces coupes claires qu’il veut faire dans leur clientèle.

Il y a aussi les fonctionnaires territoriaux, qu’une décentralisation incontrôlée a multipliés dans des proportions stupéfiantes. Mais les régions, les départements et les grandes villes sont tous pratiquement tenus par ses amis socialistes. On voit mal la région Poitou-Charentes, le département de la Corrèze ou les villes de Nantes ou de Lille accepter de réduire leurs effectifs pléthoriques de ronds-de-cuir locaux. D’ailleurs on a transféré de nombreuses compétences à ces collectivités locales (sans pour autant réduire le nombre des fonctionnaires d’Etat).

Il ne faut pas oublier non plus, et les syndicats ne se priveront pas de le rappeler, que réduire le nombre des fonctionnaires c’est aussi, ipso facto, accroître le nombre des chômeurs.

Augmenter les recettes - il faut trouver 10 milliards dans les prochaines semaines pour boucler le budget- c’est augmenter les impôts. Hollande avait annoncé qu’il ferait cracher les riches (qu’il n’aime pas) au bassinet au nom de « la justice fiscale ». Mais les riches qui ne sont pas encore partis pour Londres, Bruxelles ou Genève ne sont plus si nombreux, et puis ce sont tout de même eux qui investissent, si tant est qu’on veuille vraiment relancer l’économie et l’innovation.

Il va donc falloir annoncer de bien mauvaises nouvelles dans les jours qui viennent aux classes moyennes. Même s’ils ont l’habitude d’être pressurés et de voir leur niveau de vie dégringoler, certains de ceux qui ont voté avec enthousiasme pour la gauche vont rapidement regretter leur naïveté.

Hollande, qui n’est pas un imbécile, doit savoir que l’état de grâce dont il bénéficie (relativement) depuis son élection va bien vite se terminer. Sans doute le jour où Jean-Marc Ayrault prononcera son discours de politique générale devant la nouvelle Assemblée et annoncera toutes les mauvaises nouvelles.

Comme tous ses prédécesseurs sans exception (Balladur, Juppé, Jospin, Raffarin, Villepin, Fillon), le Premier ministre affirmera que « ceux d’avant » lui ont laissé le pays dans un triste état, qu’il est à la tête d’un Etat « en faillite » (le mot de Fillon) et qu’il ne pouvait pas soupçonner que la situation soit aussi catastrophique (alors pourtant que c’étaient deux de ses amis socialistes qui présidaient, l’un, la Cour des Comptes, l’autre, la Commission des Finances de l’Assemblée).

Les Français ne vont évidemment pas être dupes. On leur a trop souvent fait « le coup de l’héritage ». Ils vont sans doute s’apercevoir, une fois de plus, qu’en face des cruelles réalités les meilleures intentions sont aussi inutiles que les pires des boniments.

Ils vont aussi comprendre que désormais un président de la République, aussi bien élu soit-il, n’a plus guère de pouvoir. Hollande avait deux grandes idées : la mutualisation européenne des dettes et la taxe sur les transactions financières. Mais Angela Merkel ne veut pas payer pour les autres et l’immense majorité des chefs d’Etat du G20 ne veut pas entendre parler d’une telle taxe sur les transactions financières.

On voit mal ce que notre président « normal » va bien pouvoir nous dire dans les prochaines semaines. Peut-être que « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille », qu’il va « ouvrir un chantier de réformes », qu’avec sa « force tranquille » il va s’attaquer à « la fracture sociale » en allant « chercher la croissance avec les dents » et qu’il entrevoit « le bout du tunnel » car « les clignotants commencent à passer au vert ».

Mais les Français ont déjà entendu tout cela. Il faudrait donc trouver une nouvelle formule.

Thierry Desjardins


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