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16/6/15 | Henri Dumas |
Mon chien est intelligent, mais n’a aucun
patrimoine ! Le patrimoine est nécessaire au pillage, il est même sa raison d’exister. Pour que les uns pillent, il faut que les autres accumulent. Situation finalement cocasse puisque le pillard moderne ne manque pas de dénigrer celui qui accumule alors que sans lui il ne pourrait pas piller. Tout comme le paysan engraisse son cochon pour en faire du boudin, le pillard – Bercy – devrait enrichir ses cibles pour mieux les tondre. Mais, bon, restons clean. L’accumulation qui amène au patrimoine est-elle réellement critiquable, au-delà de la propagande indécente des pillards qui la fustigent ? Nous allons démontrer que non. En premier lieu, chassons l’idée – actuellement répandue – que l’homme serait une individualité unique, autonome, un tout à lui seul. Cette idée est fausse, l’homme n’est qu’un maillon, une partie d’un ensemble multiple qui commence dès l’idée de famille, pour aller jusqu’à la globalité de l’humanité. L’homme n’existe qu’en référence aux ensembles auquel il appartient. La réalité de ces ensembles lui est transmise par leurs patrimoines, intellectuels, moraux, matériels, culturels, etc. Le fait qu’untel ou tel autre, partie de cet ensemble, soit le dépositaire de ce patrimoine n’a aucune importance. Le fait essentiel est que ce patrimoine existe. Qu’il soit entre les mains du roi, du riche, du camarade du parti, peu importe, mais il doit être pour qu’existe l’ensemble auquel nous sommes rattachés. J’entends bien que cet impératif qui légitime le patrimoine ne désigne pas qui doit en être le détenteur. Certains pensent que ce devrait être la collectivité, d’autres que ce doit être les plus riches, pour ma part je pense que le mieux est que le patrimoine référent soit entre les mains des plus efficaces, d’abord pour le créer, le faire fructifier et ensuite pour le conserver. Sur ce sujet la discussion reste ouverte, si l’on accepte en préalable l’absolue nécessité du patrimoine. Cela admis, peut-on créer un patrimoine sans accumuler ? Si cela était possible, j’imagine que mon chien aurait un capital. Il n’en n’a pas. Je ne vais pas trahir un secret en vous disant que mon chien, quand il n’a pas faim, dort ou s’amuse. Quand il a faim, il remue la queue et vient me demander à manger. A aucun moment ne lui vient l’idée de mettre des croquettes de côté pour le repas du lendemain. Mon chien n’a aucun patrimoine parce qu’il n’accumule pas. La différence entre mon chien et moi n’est pas au niveau de l’intelligence – pour certaine choses il est plus intelligent que moi — elle est au niveau de la capacité à accumuler un patrimoine, donc à devenir un être social, le maillon de la chaine des hommes. Dénigrer celui qui accumule, alors qu’il est la base même de notre humanité est stupide. De quoi se compose le patrimoine social ? De tout ce qui reste et peut se transmettre. La particularité du patrimoine, ce qui en fait un marqueur, c’est justement que sa durée de vie est supérieure à celle de celui qui le crée. C’est ainsi qu’il sert de greffon à l’arbre de vie de tel ou tel groupe. En ce qui concerne sa composition citons, pêle-mêle et de façon non exhaustive, la culture, les sciences, la philosophie, les monuments, les grands évènements et leur histoire, et, bien évidemment, celui sans qui tout cela aurait du mal à s’articuler : le capital. Qui le crée, qui le détient ? C’est ici que les choses se compliquent. Enfin, seulement dans la tête des collectivistes. Ils prétendent que le patrimoine ne peut être conservé et généré que par ce qu’ils appellent l’Etat, dont la définition est pour eux, il faut le dire, à géométrie variable. L’Etat, cette abstraction, devrait donc créer et gérer le patrimoine. Le peut-il ? Sachant que déjà il le pille, peut-il être celui qui le crée ? Le beurre et l’argent du beurre en quelque sorte ? Tout le monde s’accorde à penser qu’en ce qui concerne les arts, la philosophie, la culture en règle générale, la liberté est meilleure conseillère que l’Etat. Par contre, pour le pillage, les siècles passés ont apporté la preuve que l’Etat est un opérateur privilégié. Concernant la science, les monuments et les grands évènements, l’histoire prête à confusion. Ici, l’Etat collectiviste n’accumule pas les performances, mais lorsqu’il est conduit par quelque individu éclairé — despote ou non — la puissance de feu de l’Etat permet quelque fois l’accumulation patrimoniale. Cependant, en termes de résultat global, la somme issue des patrimoines privés des sociétés libérales dépasse largement le patrimoine accumulé par les sociétés collectivistes. Disons, de façon tout à fait pragmatique, sans porter de jugement personnel, que du fait d’un important patrimoine, les sociétés libérales sont un meilleur terreau pour l’épanouissement de la vie que les sociétés collectivistes. Et le pillage alors ? Pour les mêmes raisons, les sociétés libérales sont un excellent terrain de jeu pour les pillards. Les collectivistes sont donc pris dans leur propre système. Ils doivent favoriser les sociétés libérales s’ils veulent pouvoir les piller. Reconnaissons-le, ce n’est pas un exercice facile. S’ils se laissent aller à installer le collectivisme, le patrimoine s’étiole, les voilà dépourvus de n’avoir plus à plumer que des pauvres. Mais où sont donc les riches d’antan ? finiront-ils par dire. La conclusion de tout cela est que le patrimoine est essentiel, que ceux qui l’accumulent non seulement ne méritent pas les sarcasmes des pilleurs, mais au contraire le respect de tous, car sans eux pas de patrimoine et sans patrimoine pas de société. Henri Dumas |