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16/3/09 Claude Reichman

La farce du taux d’épargne des Français

L’entourage du président de la République et Nicolas Sarkozy lui-même ont une grande idée : le taux d’épargne des Français fait qu’ils n’ont pas de véritable souci d’argent et notamment qu’aucun plan de relance de la consommation n’est nécessaire en France, à la différence de ce qui se passe aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne où les ménages sont très endettés. Les mêmes ajoutent qu’il faut contraindre nos compatriotes à utiliser leur épargne pour faire face aux difficultés engendrées par la crise.

Tranchons aussitôt le débat sur la consommation. S’il s’agit de l’alimenter par des distributions d’argent public ou par des hausses de salaires imposées aux entreprises, cela ne peut conduire qu’à la catastrophe. Dans le premier cas, les prélèvements fiscaux ou sociaux prendront d’une main ce que l’autre redistribuera, non sans que la porosité de cette dernière, comme le disait Frédéric Bastiat, ne fasse bénéficier ceux qui gravitent dans les sphères étatiques d’une manne injustifiée. Dans le second cas, les entreprises auront à faire face à des coûts salariaux impossibles à supporter dans un contexte de concurrence généralisée et beaucoup d’entre elles iront au tapis.

En revanche, si les ménages disposent de plus d’argent parce que l’Etat et les organismes sociaux leur en prennent moins, ils affecteront leurs ressources supplémentaires à des besoins qu’ils sont les mieux à même d’arbitrer, au premier rang desquels figure la nécessité de boucler leurs fins de mois, alors que toutes les enquêtes prouvent qu’il s’agit aujourd’hui du souci principal des Français.

Pourtant le message officiel, celui du président de la République, de ses conseillers et des médias qui les relaient fidèlement, consiste à dire que toute hausse du pouvoir d’achat des ménages ne ferait qu’augmenter les acquisitions d’écrans plats et ne favoriserait que les importations de produits étrangers ! Comme si les Français, plutôt que de payer leur loyer, la nourriture de la famille et leurs dépenses de transport allaient se ruer chez les marchands de téléviseurs afin d’y assouvir une irrépressible pulsion ! C’est vraiment mal connaître nos compatriotes - et cette méconnaissance est une des causes principales des erreurs et des fautes des gouvernants du pays, quels qu’ils soient -, même s’il est vrai que chez ceux qui ne vivent que d’assistance de tels comportements puissent parfois être décelés.

Quant à cette fameuse épargne des Français, où la cachent-ils donc au lieu de la dépenser de façon patriotique ? Tout simplement en placements d’Etat. L’argent que les Français économisent mois après mois se porte pour l’essentiel vers l’assurance-vie, les caisses d’épargne et les comptes courants. L’assurance vie, convertie en bons du Trésor, finance les déficits de l’Etat, les sommes placées à la caisse d’épargne sont mises à la disposition de la Caisse des dépôts qui s’en sert pour financer le logement social, et les comptes à vue sont utilisés par les banques pour leurs diverses opérations dans la limite supposée de leur ratio de solvabilité. Qu’en déduire ? Que cet argent n’est évidemment pas disponible.

Si les Français s’avisaient en grand nombre de retirer leurs avoirs de ces différents comptes, le système serait évidemment incapable de les payer et s’effondrerait. L’Etat peut-il rembourser aux épargnants les 1200 milliards d’euros placés en assurance-vie et qui ont en fait disparu dans ses déficits courants ? L’Etat va-t-il vendre le parc des logements sociaux - et à qui ? – pour payer les retraits opérés sur les livrets d’épargne ? Les banques vont-elles remettre leur argent à leurs clients, alors qu’il n’est disponible qu’à raison de 8 % au mieux des sommes déposées ? Evidemment non. Bien entendu, toute panique financière produit les mêmes effets, précisément quand s’établit un doute sur la solvabilité des organismes détenteurs de l’épargne. Et dans le cas actuel, on voit bien que l’argent des Français n’est pas disponible pour ses propriétaires, tout simplement parce qu’il a perdu toute véritable liquidité.

Du coup on en arrive à cette conclusion qui nous fait reculer dans l’échelle du temps : la seule épargne disponible des Français c’est celle qu’ils ont cachée sous leur matelas ou enterrée, sous forme de lingots d’or, dans leur jardin ! Ce n'est certes pas de là que viendra le salut.

La conclusion qui s’impose est donc la suivante : si le président de la République veut pousser les Français à utiliser leur épargne, qu’il commence par leur permettre de la rétablir en diminuant drastiquement les dépenses publiques et sociales dès que la crise le permettra et, en attendant, en utilisant l’argent - emprunté - de la relance à baisser les impôts et les charges afin de redonner des ressources aux Français. Et qu’il sache que cet argent-là sera mieux dépensé que s’il continue d’être confié aux énarques qui dirigent l’Etat, eux dont Coluche avait fort bien dit que si on leur confiait le Sahara, ils ne tarderaient pas à importer du sable !

Claude Reichman
Porte-parole de la Révolution bleue.

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