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6/3/12 | Charles Gave |
Tel le chanoine Fulbert, Hollande veut les couper à Abélard ! Abélard (1079- 1142) est resté dans l’histoire un peu pour les mauvaises raisons qui furent surtout celles de ses amours avec la belle et savante Héloïse. On oublie que sa contribution au développement de la pensée occidentale fut essentielle : formidable logicien, il mit en lumière une distinction fondamentale qui allait permettre, à terme, la séparation entre l’Eglise et l’Etat. Selon Abélard, il existait une distinction essentielle entre le crime et le péché. Le crime n’existait que s’il était reconnu par la loi. Nullum crimen sine lege (pas de crime qui ne soit reconnu par la loi) disait déjà le droit romain, et il était donc du ressort de la puissance publique de le punir et de l’empêcher puisque tout crime est destructeur de l’ordre social. Le péché, en revanche, ressort de la morale privée et il revient à Dieu
de le punir. Chacun doit s’en repentir tout en essayant d’en corriger les
effets par ses actions ultérieures. Que le lecteur se souvienne, à cet égard, de la formule de François Mitterrand, mentionnant « la force injuste de la loi ». Opposer la justice à la loi, c’est réintroduire au cœur de la démocratie la préférence pour une morale collective, voire une religion. A travers ce genre de discours, on perçoit bien que le socialisme n’est rien d’autre qu’une religion cherchant toujours, au nom d’une morale collective, à s’immiscer dans des transactions d’ordre privé. M. Hollande vient de nous donner un nouvel exemple de ce redoutable penchant. Je veux parler, bien sûr, de la proposition formulée par le candidat socialiste de « punir » ceux dont le salaire serait supérieur à 1 million d’euros. Insupportable semble- t-il aux yeux de ce pauvre homme qui, en revanche, n’a jamais trouvé moralement inacceptable de voter des budgets en déséquilibre. Dans un état de droit la « morale » n’existe pas. Seule existe la
légalité. Toutes les dispositions relatives au
paiement de ces sommes versées à des dirigeants ont été prises en fonction
de textes existants et rien ici ne peut être qualifié d’illégal. L’argent
dépensé au titre des ces prestations appartient à des entités relevant du
secteur privé et ayant donc le droit d’allouer ces sommes en fonction de ce
qui leur parait être, à elles, le plus efficace. Si les actionnaires ne sont
pas contents des résultats, ils peuvent soit “voter avec leurs pieds”,
c’est-à-dire vendre leurs titres, soit prendre les dispositions aboutissant
à une révocation de ces dirigeants. Que je sache, le droit de propriété est
reconnu dans la Constitution !
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