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22/10/12 | Charles Gave |
La France est une ineptocratie ! (expression savante signifiant « pays de cons ») Il y a quelques mois, j’ai écrit un article dans lequel je rappelais les trois justifications intellectuelles qui pouvaient être apportées au prélèvement de l’impôt. L’impôt peut être levé pour payer des dépenses nécessaires : 1. Pour le défraiement des services régaliens que l’Etat offre et qu’il peut seul offrir (Défense, Justice, Police, Diplomatie…), ce qui correspond peu ou prou aux recommandations des Lumières à la fin du XVIII ème siècle. Pas de discussion possible, si ce n’est sur la façon la plus efficace de prélever ces impôts, c’est-à-dire sur celle qui gênera le moins possible le processus productif. 2. Pour investir dans des domaines où le secteur privé ne peut ou ne veut pas aller. Ici l’on peut penser à des choses comme la construction d’infrastructures diverses et variées, pas immédiatement rentables au niveau de l’infrastructure elle même mais très rentables au niveau de la communauté en raison des externalités qu’elles comportent. On peut penser aussi à des usines d’armement qui serviront à la Défense nationale ou à l’Ecole polytechnique. Voilà qui est déjà beaucoup plus discutable comme concept, mais enfin on peut en discuter entre gens de bonne compagnie. 3. Pour faire régner la « justice fiscale » et « l’égalité » (voir le grand discours à ce sujet de notre nouveau président), et là, on ne peut s’empêcher d’être inquiet, très inquiet. Hayek avait coutume de dire que plus de gens avaient été ruinés ou massacrés par des hommes politiques qui cherchaient cette « justice sociale » que par n’importe quoi d’autre dans l’histoire ( Savonarole à Florence, Robespierre, l’URSS, la Chine de Mao, le Vietnam, le Cambodge, l’Ethiopie etc.), tant ce concept est fumeux, antiéconomique et s’appuie exclusivement sur le pire des sept péchés capitaux, l’envie. Tous les sociologues savent en effet qu’une société où l’envie se donne libre cours ne peut qu’exploser, et en cela ils rejoignent l’un des dix commandements : « Tu n’envieras ni la femme ni la maison de ton voisin ». Comme on faisait remarquer au président Obama qu’une augmentation
d’impôts qu’il préconisait allait amener à des recettes fiscales en baisse,
il avait répondu : « Je le sais, mais c’est une
question de justice sociale. Plutôt le chômage que l’injustice sociale telle
que je la définis ». Telle est la pensée dominante des gens qui
croient à cette calembredaine. On passe là, comme chacun peut le voir, d’une
conception de l’impôt qui sert à payer les fonctionnaires ou des
investissements à une conception qui cherche à punir les ennemis politiques,
ou le fait que l’on soit né laid et bête, ou les deux à la fois, et l’on
quitte donc la démocratie pour rentrer dans la démagogie. Il faut dans leur esprit que tout soit taxé de la même façon… A revenu égal, impôt similaire. Et pourtant cette égale taxation est une insulte à l’économie, à l’intelligence et en fin de parcours à …la justice elle-même. Prenons trois contribuables qui tous les trois gagnent 200 000 euros par
an. • Le deuxième, un cadre d’un niveau élevé, est arrivé à ce haut niveau de rémunération à la force du poignet. Ce salaire lui est garanti tant qu’il n’est pas viré, remplacé par un jeune Turc plus compétent et moins cher ou que sa société ne fait pas faillite, auquel cas il aura droit aux indemnités de chômage pendant assez peu de temps, ne pouvant retourner dans son « corps d’origine » comme nos chers fonctionnaires lorsqu’ils sont battus aux élections. D’où la nécessité de se constituer une épargne (un capital) pour pouvoir faire face à des situations dans le futur dont chacun d’entre eux sait pertinemment qu’elles peuvent être très dangereuses et survenir à tout moment. Ce cadre, après avoir payé des impôts sur le revenu, devra payer des impôts sur le capital, sur les revenus du capital et sur les plus values éventuelles qu’il aura réalisées sur ses investissements, ce qui rend la constitution de ce capital quasiment impossible. • Le troisième est un entrepreneur qui a créé et dirige une entreprise. Après avoir payé tous les salaires, couvert toutes les charges, réglé tous les impôts (toutes dépenses certaines), à partir d’un chiffre d’affaire qui, lui, est totalement incertain (les clients ne vont chez lui que parce qu’ils le veulent bien, et il ne peut pas envoyer les gendarmes pour les forcer à acheter ce qu’il cherche à vendre), il lui reste à la fin de l’année, au titre des profits, 200 000 euros, qui pourront être 400 000 l’année suivante ou zéro , voire devenir une perte l’année d’après. Il lui faut donc mettre en réserve la plus grosse partie de ces 200 000 euros pour pouvoir faire face à une ou plusieurs années déficitaires, au cas ou cette éventualité se réaliserait. Si M. Hollande, dans sa recherche de l’égalité, décide de taxer ces trois
hommes de la même façon, je soutiens que c’est à la fois injuste, idiot et
que cela va conduire notre économie à un désastre sans précédent. • Dangereux, parce que si le cadre sait qu’il peut être viré à tout moment et qu’il ne peut pas se constituer une épargne de précaution pour faire face à cette éventualité, il va vouloir aller se faire taxer ailleurs, sous des cieux plus cléments (à Londres ou à Hong-Kong), et cette épargne ne sera plus recyclée en France. Comme sur le long terme, l’épargne est égale à l’investissement (i=s), cette baisse du taux d’épargne va déclencher une baisse du taux d’investissement et donc une baisse structurelle du taux de croissance ainsi qu’une hausse tout aussi structurelle du chômage. • Désastreux, parce que si notre entrepreneur ne peut mettre en réserve que 100.000 euros (taux d’imposition à 50%) à la place des 200.000 qu’il avait gagnés, lors de la prochaine récession son entreprise ne pourra peut être pas faire face à la baisse du chiffre d’affaires et il devra déposer le bilan, mettant à la porte non seulement notre cadre mentionné plus haut mais aussi tous les autres employés. Considérer donc que ces trois revenus doivent être imposés de façon équivalente est à la fois, injuste, inefficace, dangereux et stupide. Dans un pays normal, c’est-à-dire dans un pays non gouverné par des
fonctionnaires qui gèrent bien sûr à l’avantage exclusif des…
fonctionnaires, MM. Jospin et Juppé seraient taxés à 50 % au moins, notre
cadre à 25 % au plus, et notre entrepreneur pas du tout, surtout si et quand
il revend son entreprise dans laquelle il a investi tout son capital et tous
ses efforts depuis toujours. On en rit de peur d’en pleurer ! Charles Gave
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