J’enrage ! En Europe, on
assassine la démocratie !
J’enrage. Tout va de mieux en mieux. En Italie et en Grèce, des
gauleiters bruxellois viennent de remplacer les élus du peuple sous les
applaudissements frénétiques de tous ceux qui chez nous haïssent et la
démocratie et son pendant, la souveraineté nationale. (Attali, Minc, Duhamel
etc.).
Parallèlement les grondements des révolutions populaires se font de plus en
plus entendre, tant ce coup d’Etat rampant et masqué perpétré par nos
élites bruxelloises exaspère les peuples.
Dans notre monde, la légitimité ne veut plus dire grand chose et pourtant,
chez un homme comme De Gaulle, elle était indispensable à l’exercice du
pouvoir.
D’où peut venir cette fameuse légitimité?
- Du fait que ceux qui ont le pouvoir commandent aux
tanks. C’est le scénario le plus commun historiquement, voir Syrie, Myanmar
etc. Légitimité douteuse à tout le moins.
- De la naissance, et nous nous trouvons dans des
systèmes aristocratiques (Venise au Moyen Age) ou monarchiques (France de
l’Ancien Régime). Cette forme de légitimité n’est plus guère acceptée de nos
jours, si ce n’est dans certains pays à la pointe du progrès du style Arabie
Saoudite. Légitimité historique.
- De la religion. Là, nous nous trouvons dans le cas
d’une théocratie très en vogue en ce moment du côté de l’Iran et bientôt de
la Tunisie et de la Lybie. Légitimité en dehors de ce monde mais réelle pour
les croyants.
- De la compétence technique de ceux qui exercent le
pouvoir. Ce fut le cas de la défunte Union soviétique, où les élites
combinaient à merveille la capacité technique sans pareille des membres du
parti avec le fait que ces mêmes membres étaient les seuls aptes à
interpréter pour le menu peuple les textes sacrés tels que les évangiles
selon Saint Marx. Cette légitimité-là disparaît dès que les résultats
techniques deviennent décevants, ce qui nous amène soit à une révolution
cherchant une autre source de légitimité, soit a la solution numéro un, les
tanks dans la rue et les pelotons d’exécution, ou l’exil pour ceux qui ne
sont pas d’accord.
- Du vote libre exercé par une majorité. C’est ce
qu’il est convenu d’appeler la démocratie, le pire de tous les régimes si
l’on exclut tous les autres, comme le disait Churchill. La souveraineté
appartient au peuple qui la délègue à ses représentants ou mieux encore
l’exerce directement au travers de referendums. C’est dans ce système que la
plupart des pays d’Europe ont choisi de vivre. Depuis un certain nombre
d’années cependant croît a l’intérieur même du système politique un cancer à
évolution lente où des métastases profondément antidémocratiques et
technocratiques se répandent sous le couvert du nécessaire «
approfondissement »de l’unité européenne. Ces métastases mettent en
question la nature même de nos systèmes et amènent à se poser une question
et une seule : en Europe, sommes-nous toujours en démocratie ou avons-nous
déjà basculé vers la technocratie ? La réponse devient hélas de plus en plus
évidente…
Ainsi nous venons de voir se jouer sous nos yeux l’un des plus beaux coups
d’Etat contre la démocratie que j’aie vus depuis l’invasion de Prague en
1968 : deux premiers ministres, Papandreou et Berlusconi, parfaitement
légaux, ont été débarqués sans autre forme de procès pour être remplacés par
des personnalités bruxelloises qui n’avaient jamais été élues à quoi que ce
soit auparavant, au seul prétexte qu’elles étaient compétentes et favorables
à l’Europe non démocratique.
Ce pronunciamiento ne s’est pas fait en envoyant des tanks, mais en menaçant
de couper les crédits à ceux qui vivaient dans le péché, paniquant de ce
fait tous les fonctionnaires dont les prébendes dépendent de ces versements
et les amenant à soutenir ces coups d’Etat.
Sous jacents à ces coups d’Etat, il y a deux présupposés logiques qu’il faut
être aveugle pour ne pas voir.
1. Les élus du peuple sont incompétents. Ce qui est parfaitement possible,
mais la seule façon de s’en débarrasser en démocratie est de voter pour
quelqu’un d’autre, lors d’élections tenues de façon légale
2. Les technocrates sont compétents parce qu’ils ne sont pas sous la
pression des élections. La foutaise ultime, comme l’ont montré les exemples
de Mussolini, de Staline ou plus récemment de tous nos braves technocrates
français ou italiens (Prodi, Trichet, Delors) qui nous ont créé cette
merveille de la technocratie qu’est l’Euro, en train de faire capoter
l’Europe. Et c’est à ces gars-là que l’on donne le pouvoir ?
C’est un peu comme si les Alliés avaient confié le commandement du
débarquement en Normandie à Gamelin, le général qui commandait les armées
française et anglaise en 1940 et qui reçut la raclée que l’on sait. On
imagine le moral des troupes en juin 1944 dans leurs péniches de
débarquement…
La démocratie est en train d’être assassinée et tout le monde s’en fout.
J’enrage.
Et je ne suis pas le seul.
Charles Gave
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