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	Les taux d’intérêts négatifs nous conduisent  
	                                  
	à la faillite ! 
	  
	Dans ma jeunesse, il y a bien, bien longtemps j’ai fait des 
	études d’économie à Toulouse. 
	L’une des premières questions qui fut soumise à notre sagacité (extrêmement 
	restreinte à l’époque) fut : « Mais pourquoi devons-nous payer des intérêts 
	quand nous empruntons de l’argent, et pourquoi exigeons-nous de toucher des 
	intérêts quand nous en prêtons ? ». 
	 
	Ce que j’ai retenu jusqu’à ce jour de cette question est que, dans le fond, 
	je reçois des intérêts sur mon épargne pour me compenser d’un futur 
	incertain. Après tout, je pourrais consommer toute mon épargne aujourd’hui 
	et ne plus souffrir d’aucune incertitude sur la façon de le dépenser dans le 
	futur, et donc compenser la souffrance considérable causée par cette 
	incertitude me semblait raisonnable. 
	 
	Je dois avouer qu’à l’époque cela ne m’était pas apparu comme 
	extraordinairement important, tant je n’avais pas d’épargne et tant il me 
	semblait improbable que quiconque d’un peu sensé me prête le moindre argent. 
	 
	Mais enfin, ayant toujours été attiré par les propositions intellectuelles 
	pour peu qu’elles soient spéculatives, j’avais trouve l’idée intéressante au 
	moins sur le plan de la réflexion théorique. 
	 
	En ce début d’article, je vais donc retenir l’hypothèse que mes chers 
	professeurs de l’époque (Cluseau, Lettinier… le premier ne jurait que par 
	Schumpeter, et le second était un élève de Sauvy) savaient de quoi ils 
	parlaient, ce qui est certainement exact. De fait, ils étaient infiniment 
	plus compétents que les professeurs d’aujourd’hui puisqu’ils étaient 
	professeurs d’économie politique et non de «sciences économiques». 
	 
	En fait, après 50 ans passés à essayer de comprendre pourquoi les taux 
	d’intérêts existent et pourquoi ils montent ou baissent, je suis arrivé à la 
	conclusion qu’en effet ils sont là pour nous compenser contre l’incertitude 
	du futur et que cette incertitude est loin d’être une constante. 
	 
	Et donc leur explication, quoique imprécise, était la 
	bonne, ce qui m’a appris aussi qu’il valait mieux ne pas rechercher une trop 
	grande précision dans les définitions. Obscures et courtes aurait dit 
	Napoléon… 
	 
	Ce qui m’amène au désastre qui plombe toutes nos économies, la prépondérance 
	des keynésiens dans les cénacles de banquiers centraux. 
	 
	Pour eux, plus les taux d’intérêts sont bas, plus je dois consommer 
	aujourd’hui, et moins je dois épargner. 
	 
	Faire « baisser les taux » m’amènerait logiquement donc à «avancer» ma 
	consommation dans le temps, et si tout le monde faisait la même chose en 
	même temps que moi, voilà qui amènerait à une «reprise» de la consommation 
	et donc de la croissance économique, reprise qui pourrait n’être que 
	temporaire cependant, ce qui n’a aucune importance puisque sur le long terme 
	nous serons tous morts…(Keynes). A ce propos, j’aimerais faire remarquer que 
	Keynes est mort et que nous sommes dans le long terme. 
	 
	Le Seigneur nous a chassé du Paradis en nous disant « tu gagneras ton pain à 
	la sueur de ton front », ce qui en termes clairs signifie, si tu bosses, tu 
	auras (peut-être) de quoi manger. 
	 
	Heureusement Keynes est arrivé et a renversé les termes de la malédiction, 
	nous ramenant ainsi au Paradis terrestre. Si tu consommes toutes tes 
	réserves, tout ira mieux immédiatement. 
	 
	Le petit paragraphe ci-dessus résume assez bien (et sans aucune mauvaise foi 
	bien sûr) la « doxa » keynésienne, totalement dominante à notre époque, bien 
	qu’elle n’ait jamais marché nulle part, qui recommande de baisser les taux 
	dès que l’économie ralentit, ce qui en soi n’est pas totalement stupide et 
	arriverait naturellement de toutes façons, mais nous amène inexorablement à 
	l’étape suivante, consistant à garder des taux perpétuellement bas pour ne 
	jamais favoriser l’épargne, cette mère de toutes les dépressions. 
	 
	Et donc suivre une politique de taux bas perpétuellement est bien entendu la 
	recommandation de tous les keynésiens, et chacun a pu constater le succès de 
	cette politique au Japon depuis vingt ans, ou en France avec nos chers 
	énarques. 
	 
	Fort bien, mais j’aimerais faire ici une petite remarque de nature sociale : 
	les «riches» ont des actifs (immobilier, valeurs boursières etc.) qui 
	montent quand les taux baissent. Les «pauvres « ont une épargne liquide (en 
	cash), et donc des taux bas favorisent les riches et pénalisent les pauvres. 
	 
	Maintenir des taux bas artificiellement est donc une politique profondément 
	antisociale, et j’ai toujours été surpris que les keynésiens, qui se 
	flattent haut et fort de se situer à gauche de l’échiquier politique, soient 
	en faveur d’une telle mesure violemment anti-pauvres. Mais la raison en est 
	simple : les keynésiens ne sont pas «pour aider les pauvres», mais pour 
	favoriser la croissance du poids de l’Etat dans l’économie et s’emparer des 
	postes de commandement, ce qui n’est pas la même chose. Et des taux bas 
	favorisent cette croissance de l’Etat…Nos keynésiens, de gauche, ne 
	recherchent dans le fond que leurs intérêts personnels, ce qui ne surprendra 
	que ceux qui ne les connaissent pas. 
	 
	Continuons à dérouler la logique de nos amis les faux prophètes keynésiens. 
	 
	Si on met les taux à zéro, je n’ai plus aucune raison d’épargner et je dois 
	consommer séance tenante toute mon épargne. Encore une fois, voilà qui est 
	complètement idiot. Dans la réalité, je vais sans doute me mettre à épargner 
	plus, tant la baisse de rentabilité de mon épargne risque de me terrifier. 
	Ce que je décris ici n’est pas la réalité, mais le monde « magique », 
	c’est-à-dire non scientifique, qui préside aux analyses keynésiennes. 
	Mais il y a pire, bien pire : la BCE, et d’autres banques centrales ont 
	décidé maintenant de passer en taux d’intérêts négatifs, ce qui veut dire 
	que je dois payer pour placer mon argent. Et de ce fait, nous nous trouvons 
	dans un monde complètement différent, à la limite surréaliste. 
	 
	Si les taux d’intérêts positifs sont là pour me compenser de « l’incertitude 
	du futur », alors des taux négatifs veulent dire en termes philosophiques 
	que le futur est plus certain que le présent, ce qui, à mon humble avis, est 
	totalement idiot. 
	 
	Le futur ne peut pas être plus certain que le présent, voila une proposition 
	logique qui me paraît incontestable. 
	 
	Et donc toute la politique monétaire de la zone euro me laisse complètement 
	pantois. 
	Non seulement elle s’appuie sur une pensée «magique» et non pas 
	scientifique, mais en plus elle pousse le bouchon jusqu’à un point où non 
	contente d’être magique, elle devient complètement stupide et contre le sens 
	commun. 
	 
	Et je dois dire que j’ai du mal à comprendre comment une politique à la fois 
	non scientifique, magique et idiote va amener à des résultats favorables. 
	 
	Mais j’ai dû avoir de mauvais professeurs à Toulouse il y a bien longtemps… 
	 
	En dépit de ces remarques «de détail», continuons de dérouler le 
	raisonnement apparemment logique des fous qui nous gouvernent. 
	 
	La chose logique dans un monde de taux d’intérêts négatifs serait bien sûr 
	d’emprunter plutôt que d’épargner, puisque l’on est pénalisé si l’on épargne 
	et subventionné si l’on emprunte. 
	 
	Emprunter certes, mais à qui ? 
	 
	Dans nos systèmes, heureusement, il existe des stocks d’épargne à long terme 
	(caisses de retraite, assurance vie etc.) que l’on va pouvoir tranquillement 
	vider de toute substance. Oh certes cela prendra du temps, mais comme ces 
	institutions ont des obligations d’Etat en face de leurs dépenses à venir, 
	on peut penser que d’ici cinq ans, elles seront à sec puisque maintenant il 
	faut payer pour détenir des obligations d’Etat, ce qui n’est ni plus ni 
	moins qu’un nouvel impôt mis sur l’épargne. 
	 
	L’épargne est donc ponctionnée au profit de l’Etat, voilà qui va sans aucun 
	doute accélérer la croissance économique tant chacun sait que seul l’Etat 
	est compétent pour dépenser mon argent mieux que moi. 
	 
	Je rentre des Pays-Bas où j’ai été rendre visite à mes clients, les fonds de 
	pension hollandais. Ils étaient tous absolument terrifiés et se demandaient 
	comment ils allaient pouvoir faire face à leurs échéances (c’est-à-dire 
	payer les retraites), avec des taux négatifs. Je leur ai répondu qu’ils ne 
	pourraient pas et qu’ils devaient se préparer à faire faillite. Ils me 
	payent pour leur dire la vérité et non pas pour leur raconter des 
	calembredaines. Le niveau de vie des retraités va donc absolument s’écrouler 
	puisque l’Etat s’est lancé dans une politique absolument centrale dans le 
	keynésianisme, celle de l’euthanasie du rentier. 
	 
	Et donc non seulement mon épargne mais celle de toutes institutions à long 
	terme passera à zéro. Et comme sur le long terme, l’épargne est égale à 
	l’investissement (I=S), l’investissement va s’écrouler et avec lui notre 
	niveau de vie. 
	 
	Et nous redécouvrirons que Dieu avait raison, que bouffer son blé en herbe 
	n’est pas très intelligent, et que Keynes avait tort. 
	 
	Mais Dieu n’a pas fait d’études économiques, ce qui explique pourquoi le 
	monde va aussi mal, sauf bien sûr quand il est géré par ceux qui en ont 
	fait, comme on le voit en ce moment. 
	 
	On peut se demander pourquoi des hommes soi-disant aussi éminents suivent 
	des politiques aussi ridicules? A cette question une seule réponse : ne 
	jamais sous estimer le rôle de la bêtise dans l’Histoire ainsi que 
	l’habitude des classes dirigeantes à mépriser le bon sens. 
	 
	Abraham Lincoln avait coutume de dire que l’on ne pouvait enrichir les 
	pauvres en appauvrissant les riches. Nous avons fait des progrès depuis ces 
	temps reculés. Nos banquiers centraux suivent depuis des années une 
	politique visant à appauvrir les pauvres pour enrichir les riches (et j’ai 
	appelé cela le capitalisme de connivence). Ils vont découvrir qu’appauvrir 
	les pauvres pour enrichir les riches ne marche pas non plus, et que les 
	pauvres ont une fâcheuse tendance à se révolter lorsque les laquais des 
	riches les ont par trop pressurés. Nous y sommes en Grèce, au Portugal, en 
	Finlande…. 
	 
	En réalité les taux d’intérêts négatifs sont contraires à tous les principes 
	juridiques et moraux qui sous-tendent nos sociétés. 
	 
	Ils attaquent le droit de propriété. 
	 
	Ils favorisent la croissance de l’Etat. 
	 
	Il s’agit d’impôts déguisés, qui n’ont été votés par personne et qui 
	frappent les pauvres plus que les riches. 
	 
	La BCE n’a aucun droit à prélever des impôts. C’est pourtant ce qu’elle 
	fait, ce qui est profondément illégitime et illégal. 
	 
	Prélever un impôt sans vérification du Parlement, payer les frais de l’Etat 
	par la création monétaire sont des atteintes pures et simples à la 
	démocratie, et sont des pratiques contraires aux traités européens. 
	 
	Ils vont amener à terme à un écroulement économique inéluctable, à la 
	résurgence des dissensions européennes et à la domination de l’Allemagne sur 
	le reste de l’Europe, ce qui se terminera mal comme cela s’est passé chaque 
	fois qu’un Etat européen a été dominant. 
	 
	Et tout ça pour préserver la vanité de quelques grands incompétents et 
	jamais élus par quiconque, tels Delors ou Trichet qui nous ont collés dans 
	cette aventure démente qu’est l’euro. 
	 
	« Errare humanum est, perseverare diabolicum ». 
	 
	Charles Gave 
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