Le grand bazar de l’outre-mer pourrait gagner la métropole

Des transferts publics considérables, avec un effet incertain. Des marchés intérieurs cartellisés, qui se traduisent par des prix à la consommation élevés. De fortes inégalités, partiellement compensées par un système social coûteux et vétuste. Des incitations fiscales qui profitent aux plus riches sans avoir pour autant une utilité avérée. Des difficultés pour trouver une spécialisation économique compatible avec des coûts du travail élevés et une monnaie forte. Des syndicats irrédentistes qui n'hésitent pas à paralyser le pays. Des fonctionnaires surnuméraires. Ce tableau désolant n'est pas seulement celui de la France, mais celui de la petite France, celle de l’outre mer.

Vous avez aimé la crise métropolitaine, vous adorerez la crise ultramarine. C'est la même. En pire. Car la situation des départements d'outre mer est une sorte de caricature des maux français. Si le feu couve en Guadeloupe et en Martinique, c'est à cause des revendications touchant au pouvoir d'achat. Au moins en surface. Car, « au delà du pouvoir d'achat […] nos compatriotes expriment un problème plus profond de société. La société antillaise […] a le sentiment aujourd'hui, qu'elle n'est pas entendue », expliquait hier un expert fort clairvoyant

Que n'a t on au pouvoir de tels beaux esprits, qui résoudraient en un tour de main ces difficultés nous ressemblant tant ! Le problème, c'est que l'expert cité ici n'est autre que Nicolas Sarkozy, qui s'exprimait sur la crise des DOM, lors du Conseil des ministres. Et que le président, après un diagnostic si pénétrant, a sorti une arme quelque peu émoussée par le temps et l'incrédulité générale : la création d'un « Conseil interministériel de l'outre mer ». Très probablement, le Conseil sera assorti de l'habituelle distribution de millions qui suit les éruptions du bon peuple de France. À crise bien française, réponse qui l'est tout autant.

Certes, il serait injuste de reprocher le grand bazar d'outre-mer à l'actuel président de la République. Il hérite d'une situation calamiteuse. Reste que la leçon qui nous parvient, à travers les mers, vaut la peine d'être écoutée, parce qu'elle pourrait servir demain en métropole. Lorsqu'on promet « la croissance avec les dents », « le pouvoir d'achat », le « volontarisme », lorsque l'on suscite un espoir de « rupture », on peut s’exposer à quelques désagréments si les résultats ne sont pas là.

François Lenglet