www.claudereichman.com


Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme

A la une

6/10/08 Jean-Christophe Mounicq

Vers la Grande crise

Dans cet article, publié en octobre 2002, Jean-Christophe Mounicq annonçait la crise majeure qui frappe actuellement la finance et l'économie mondiales. Saluons sa lucidité, et déplorons qu'elle n'ait pas ouvert les yeux de tant de dirigeants irresponsables.


Le spectaculaire effondrement des bourses, même s'il corrige les excès passés, conforte le sentiment d'une crise économique majeure. Quoi qu'en disent les commentateurs officiels - à la solde du système, et donc fonctionnellement optimistes - la chute de la valeur des portefeuilles boursiers aura des conséquences négatives sur l'activité économique. Beaucoup de retraités et futurs retraités comptaient sur la valeur de leurs actions pour entretenir leurs biens immobiliers et consommer. Ils devront se serrer la ceinture. Partout dans le monde, la croissance diminuera et le chômage augmentera.

Par-delà ces conséquences, le krach boursier peut annoncer et précipiter une crise majeure beaucoup plus grave. Les forts déséquilibres de l'économie mondiale, présents depuis de nombreuses années, laissent envisager d'autres corrections. Depuis 1998 - année de crise en Asie du sud-est, en Russie et en Amérique latine - l'économie mondiale est au bord de la déflation. La déflation est une baisse du niveau général des prix. Historiquement, cette baisse se constate dans les périodes de récession, où se cumulent baisses de la production et de la croissance. Une spirale dont il est très difficile de sortir. La baisse des prix entraîne une baisse de l'investissement, de la croissance et une hausse du chômage. S'ensuit une baisse de la consommation qui, à son tour, provoque une nouvelle baisse des prix. Et ainsi de suite…

Actuellement, la plupart des indicateurs montrent que la croissance a disparu. L'effet cyclique lié aux technologies s'est estompé, puis retourné. L'action du gouvernement des États-Unis n'a pas résorbé les causes de la crise. Elle a repoussé leurs effets dans le temps. Aujourd'hui, le ralentissement de l'économie américaine ne lui permet plus de soutenir l'économie mondiale. Cette dernière risque de s'effondrer sous le poids de ses déséquilibres.

Car, c'est bien le déséquilibre qui caractérise la plupart des économies de la planète. Les principales d'entre elles sont, peu ou prou, dirigées par des socialistes, avoués (Allemagne, Angleterre) ou non (France, Japon). Même en période de forte croissance mondiale, ces gouvernements n'ont pu équilibrer recettes et dépenses. Ainsi, la France n'a pas connu de budget équilibré depuis trente ans. Que dirait-on d'une entreprise accumulant des pertes sur une si longue période ? Qu'elle va faire faillite ! Dans les années à venir, l'État français peut fort bien faire faillite.

La France n'est pas seule. Aujourd'hui, les dettes accumulées par les États sont colossales. Une faible croissance mondiale plongera les États mal gérés dans une spirale accélérée de l'endettement qui peut les conduire à la banqueroute. Le Japon ne pourra pas continuer à accumuler chaque année des déficits publics proche de 10 % de son PIB. La France et l'Allemagne ne pourront pas faire face au poids de leurs fonctionnaires, de leurs assistés, et surtout de leurs retraités.

En attendant l'effondrement général.

En octobre 1998, Maurice Allais écrivait dans " Le Figaro " : " La Grande Dépression a été considérablement aggravée par le surendettement qui s'était développé avant le krach boursier de 1929 ". Notre Prix Nobel d'économie faisait référence aux dettes des particuliers et des entreprises mais aussi à l'endettement des États et des collectivités publiques. Dans la situation présente, l'endettement public pose le problème le plus crucial. " En fait, toutes les grandes crises des XVIIIe, XIXe et XXe siècles ont résulté du développement excessif des promesses de payer et de leur monétisation ". Or la plupart des États ont fait des promesses, notamment à leurs retraités, qu'ils sont incapables de tenir. Si l'économie mondiale et notamment l'économie américaine ne redémarrent pas, de nombreux États, dont la France, peuvent, sur le moyen terme, faire faillite. Les épargnants, qui détiennent majoritairement des créances sur l'État à travers contrats d'assurance vie et autres SICAV monétaires, seraient ruinés.

Le mois dernier, lors d'un voyage aux États-Unis, j'ai pu discuter cette hypothèse avec le Professeur James Buchanan. Le Prix Nobel d'économie partageait cette crainte d'un effondrement de nombreux États occidentaux. Une reprise de l'économie américaine donnerait de nouvelles années de répit. Mais, les tendances lourdes demeurent : stérilisation des économies par le socialisme et endettement insupportable des États. La crise sera d'autant plus difficile à éviter que de nombreux systèmes politiques sont verrouillés à gauche. La France semble condamnée tant son incapacité à se réformer est grande. Il faut d'autant plus s'y préparer (achat d'or, d'immobilier, travaux…) que la chute des bourses la rend plus probable. Cette crise s'accompagnera d'une forte chute du niveau de vie de certains. Mais rien ne sert de se lamenter : elle donnera aux pays qui la subiront l'occasion de construire de nouveaux systèmes sur des bases plus saines, plus justes et plus pérennes.

Jean-Christophe Mounicq

 

Accueil | Articles | Livres | Agenda | Le fait du jour | Programme