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12/9/09 | Claude Reichman |
Deux heureuses catastrophes politiques ! Ceux qui bâtissent des scénarios politiques devraient savoir que « toujours l’inattendu arrive ». Ce titre d’un livre d’André Maurois est fort justement devenu une expression proverbiale, dont on peut régulièrement vérifier la pertinence. Car de même que le marché sera toujours plus efficace que l’Etat pour orienter l’économie, de même la variété des comportements humains mettra toujours à l’épreuve et confondra la prétendue science des politologues – du moins de ceux qui ne voient dans l’avenir que la prolongation du présent. C’est ainsi qu’au cours de la même semaine le paysage politique français vient d’être bouleversé alors que rien ne le laissait prévoir. Un livre est venu montrer que l’élection de Martine Aubry à la tête du parti socialiste, en novembre dernier, était gravement entachée de fraude électorale « scientifique », tandis que Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, tenait à l’université d’été de l’UMP des propos aux relents racistes qui tournent en boucle sur Internet et mettent la majorité dans le plus grand embarras. Ce n’est évidemment pas d’aujourd’hui qu’au PS on bourre les urnes ni que des politiciens dérapent, mais si ces deux affaires ont tant de retentissement, c’est parce qu’elles mettent en lumière l’incroyable tartufferie de la vie publique française. Rappelons que le titre complet de la pièce de Molière est « Tartuffe ou l’Imposteur », et que Tartuffe est un imposteur parce qu’il est un faux dévot. Mme Aubry, comme les autres dirigeants socialistes, n’ont que le mot « valeurs » à la bouche, tandis que ceux de la majorité se posent volontiers en parangons de l’antiracisme, n’hésitant pas, comme M. Hortefeux vient de le faire, à suspendre sans enquête préalable un préfet soupçonné d’avoir tenu des propos qualifiés de racistes. Or ce que les Français viennent de découvrir en quelques jours c’est qu’au PS on viole les règles les plus élémentaires de la démocratie et que le ministre de l’Intérieur, quand il s’exprime spontanément, n’hésite pas à dire qu’il y a trop d’Arabes en France ! D’un coup d’un seul c’est tout l’édifice du mensonge, construit depuis des décennies dans notre pays, qui s’effondre. La classe politique française a bâti son pouvoir sur une double imposture : celle qui tente de faire croire aux citoyens qu’ils choisissent démocratiquement leurs représentants, alors que les manipulations et les magouilles sont la règle, et celle qui leur serine que « l’immigration est une chance pour la France », alors qu’elle est un grave problème. Il y a longtemps que les citoyens savent qu’on les trompe et que, pour parler clairement, ce type de « démocratie » les dégoûte, mais rien ne vaut une magnifique démonstration sur le vif pour transformer les soupçons en certitudes et bouleverser la donne. Ces deux évènements concomitants constituent chacun une catastrophe politique pour les partis qu’ils concernent mais aussi pour le système qui régit la France. Qu’ils soient survenus, d’ailleurs, ne doit rien au hasard. Quand un organisme est malade, il est toujours frappé d’affections dites « opportunistes », c’est-à-dire qu’il est victime de germes habituellement non pathogènes mais que l’affaiblissement des défenses immunitaires rend agressifs. Le système est malade parce qu’il a été construit dans une phase où il existait des frontières économiques étanches. La mondialisation a tout changé. On sait aujourd’hui d’une part que celle-ci continuera en dépit de la crise actuelle, et d’autre part que seuls les pays qui s’y adapteront survivront économiquement et socialement. La France vit actuellement les premiers soubresauts de la révolution qui va la rendre apte à affronter le monde moderne. Ses grandes entreprises s’y sont depuis longtemps adaptées. La classe politique avait jusqu’à présent désespérément interdit au reste du pays de faire de même. Elle va y laisser sa peau. Tant mieux pour tout le monde ! Claude Reichman
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