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L'immobilité de la société française n'est qu'une illusion d'optique |
12/2/05 | Claude Reichman |
Beaucoup de bons esprits sont accablés par le spectacle de Français
amorphes assistant sans réagir à la lente descente de leur pays aux enfers. Ils en
déduisent que leurs compatriotes ne bougeront jamais. Et ils ajoutent que même si
l'envie leur en prenait, ils ne pourraient rien faire tant l'Etat s'est rendu maître de
tous les rouages de la nation et régit le moindre détail de la vie des citoyens. La
simple observation de la situation paraît donner raison à ces observateurs désabusés.
Et chaque jour semble leur apporter la confirmation de leur analyse. Or ils se trompent.
Car ils prennent pour un fait établi ce qui n'est en réalité que l'image d'un passé
évanoui, tout comme la lumière d'une étoile nous parvient alors que celle-ci a disparu
depuis des millions d'années. En vérité, la société française est en train de
changer en profondeur sous l'effet de la révolution de la communication et l'on n'aura
pas à attendre longtemps pour en ressentir les effets. Jusqu'à une période récente,
les Français recevaient l'information exclusivement par la télévision, la radio et les
journaux, et ils la transmettaient et la commentaient à l'occasion de conversations
familiales ou amicales. Autant dire que ceux qui contrôlaient les médias étaient
certains de conserver la haute main sur l'ensemble du processus informatif. Or voilà
qu'en quelques années se sont développés deux phénomènes qui ont tout bouleversé:
Internet et le téléphone mobile. Pratiquement tous les Français ont aujourd'hui un
portable, plus de la moitié des foyers sont connectés à Internet et demain tous le
seront. Nous vivons un moment comparable à celui que l'humanité a connu, au XVe siècle,
avec l'invention et le développement de l'imprimerie. Presque aussitôt alors, l'Occident
fut le théâtre d'une grande fracture religieuse, qui dure encore aujourd'hui, et qui dut
tout à l'accès direct du peuple à la Bible imprimée. Le pouvoir ecclésiastique avait
perdu le contrôle de la société tout entière et se trouvait mis en question et en
concurrence avec les tenants d'une autre vision de l'Eglise. Un formidable contre-pouvoir est né Un formidable contre-pouvoir est né, qui va emporter les bastilles que l'on croyait
les mieux établies. Car nul en France ne s'y trompe : le pouvoir ne règne que par la
contrainte, appuyée sur le mensonge et la désinformation. Que la vérité éclate, et la
menace sombrera dans le ridicule, tandis que ceux qui la proféraient ne devront leur
salut qu'à la vitesse de leurs jambes. Le pouvoir, qu'il soit exercé par la gauche ou la fausse droite, repose tout entier sur une organisation de la société qui date de plus d'un demi siècle. Or pendant cette période, tous les processus de production et de communication ont été bouleversés. L'exemple le plus frappant est celui de la protection sociale. Les 450 milliards d'euros qu'elle prélève et répartit (près du tiers du PIB) sont passés en quelques années, sous l'effet de la construction européenne et de notre action décidée, du domaine public au domaine privé concurrentiel. Le pouvoir politique fait semblant de croire que rien n'a changé, mais il court comme le canard sans tête. En réalité, il vit dans la terreur que le bruit se répande et surtout soit suivi d'effet, c'est-à-dire que les Français usent en masse de leurs nouvelles libertés. Les politiciens ont à peu près autant de chances de garder secrète la nouvelle que cette lady de la meilleurs société londonienne qui, après que Darwin eut publié ses thèses sur l'évolution des espèces, s'écria dans son salon : " S'il est vrai que l'homme descend du singe, faisons en sorte que cela ne se sache pas ! " Or cela se sait, et se saura chaque jour davantage. En retrouvant la libre disposition
d'une grande partie de leur rémunération, les Français recouvreront la liberté qu'ils
ont abdiquée aux mains des dictateurs sociaux, qui leur juraient que leur aliénation
n'était faite que pour leur bien. Et du même coup ils renverront aux ténèbres dont ils
n'auraient jamais dû sortir les politiciens dévoyés et cupides qui n'ont jamais cessé
de les trahir afin de mieux assurer leur confort personnel en faisant allégeance aux
satrapes qui se sont emparés de la République. Claude Reichman
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