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12/7/11 | Pierre Jovanovic |
Le système financier mondial est mort ! Si l'on devait résumer à l'extrême la Bible, Ancien et Nouveau Testament, on pourrait dire que cela commence dans un jardin où une femme condamne l'humanité pour avoir croqué dans une pomme, et qu'elle se termine par l'Apocalypse de saint Jean dans laquelle des Anges fous de rage déciment l'humanité. Certes, c’est un raccourci radical mais c'est exactement ça. Cette crise économique, elle, se résume à la seule histoire des crédits dérivés et ne court que sur une vingtaine d'années. L'Ancien Testament commence donc par la Bankers Trust et le Nouveau se termine par l'Apocalypse selon Blythe Masters. Et, aussi extraordinaire que cela puisse paraître, c'est Alan Greenspan lui-même qui va nous expliquer la fin du monde financier. En 2009, réalisant que Brooksley Born fut la seule à annoncer le désastre et à avoir mené la bataille devant le Congrès pour réguler les crédit default swaps, les politiques, penauds, lui attribuèrent le prix John Kennedy ( en quelque sorte le prix Victime publique ) avant de la nommer présidente de la Commission d’enquête sur les raisons qui ont déclenché la crise, outil imaginé par les sénateurs, Nancy Pelosi, chef de file du parti Démocrate en tête, pour lui permettre de prendre sa revanche. En tant que présidente, Brooksley Born a donc convoqué Alan Greenspan à la barre des témoins ! Cette fois, les rôles étaient inversés. La roue de la Fortune avait tourné. Extrait de l'audition publique d'avril 2010: « Vous avez échoué, lui a lancé Brooksley Born ! Monsieur Greenspan, vous avez échoué à empêcher la bulle immobilière... Vous n'avez rien fait pour interdire les scandaleux prêts bancaires prédateurs... Vous n'avez rien fait pour empêcher toutes les activités financières qui ont mené le pays quasiment au bord de la faillite... Vous n’avez rien fait pour empêcher un certain nombre de nos banques de se consolider... Maintenant elles sont si importantes que ces banques sont devenues trop grandes ou trop interconnectées pour tomber. Votre opinion sur la dérégulation, votre profession de foi ont donc contribué à échec de la Fed de réussir son mandat ». Imaginez ce qu'a dû ressentir Greenspan, lui qui avait vu le monde entier manger dans sa main, lui qui avait été surnommé par la presse mondiale « L'Oracle », lui qui a servi sous plusieurs présidents américains, dont certains n'avaient même pas osé toucher à un seul de ses rares cheveux, de peur de déclencher une dépression économique immédiate. Lors de l'audition, le journaliste David Dayen constata que la fureur de l'ancien patron de la Fed fut d'une telle intensité que les lumières au-dessus de lui dans la salle d'audience se sont éteintes d'un coup à cause de sa rage soudaine ! Sommé de s'expliquer comme un vulgaire criminel devant la barre, Alan Greenspan en a avalé sa chemise de chez Brook's Brothers et même son costume. A son tour, devant les caméras, il a été publiquement humilié, diminué et aplati comme un junk bond par celle-là même qu'il avait humiliée dix ans plus tôt. Et sous le coup de sa rage, sans s'en rendre compte, Greenspan donna, par inadvertance, une information stratégique, terrifiante et ultra confidentielle : « Nous n'avons pas compris le risque potentiel que [les crédit défaut swaps] représentaient, et ils n’ont jamais été testés... Cela veut dire que nous avons sous-capitalisé les banques pendant 40 ou 50 ans. » Techniquement, il venait simplement de reconnaître que le système
financier est mort puisque les véritables réserves fractionnelles de toutes
les banques ne sont que peau de chagrin, et cela depuis 50 ans. Avec
l'apparition des crédits dérivés, la réserve fractionnelle, le matelas de
réserve, aurait dû automatiquement passer de 8 à 40 % pour encaisser les
impayés en cascade sans mettre les banques en faillite. Ce n'est pas le cas
comme tout le monde le sait, leurs réserves sont toujours à 8 %, sachant que
les nouveaux accords de Bâle qui entreront en vigueur aux calendes grecques
ne changeront rien. De plus, si on met le décodeur Greenspan en marche, il a
donc dit : « Les banques, en ce moment même, ne sont rien de plus qu'un
tas de bombes nucléaires baignant dans de la nitroglycérine en attente de
l’explosion finale... » La messe est donc dite, par l'abbé Greenspan en
personne. Pierre Jovanovic Extrait de « Blythe Masters » (Le jardin des Livres).
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