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24/12/12 I.Landauro, D. Kinch
                     ArcelorMittal en déroute !
L’aciériste va enregistrer une perte colossale de 4,3 milliards de dollars  
                                     
au 4e trimestre 2012
 

La société ArcelorMittal, qui enregistre une perte de 4,3 milliards de dollars pour sa seule division européenne, dit qu'elle a peu d'espoir d’une amélioration de l'économie européenne dans un avenir proche. Basée au Luxembourg, ArcelorMittal, premier sidérurgiste mondial, a déclaré que cette perte sera incluse dans son bilan du quatrième trimestre. Cette nouvelle entraîne une nouvelle décote de la société par Fitch : c’est la troisième dégradation par une agence de notation depuis août.

La demande d'acier en Europe a chuté de 8% cette année et de 29% au cours des cinq dernières années. « Il y a des signes que l'affaiblissement de la demande persistera à court terme et à moyen terme en Europe », a déclaré ArcelorMittal. L’étendue du désastre vécu par cette société, qui représente à elle seule 6% de la production mondiale, est apparue ces derniers mois. ArcelorMittal fonctionne avec seulement 14 hauts fourneaux sur les 25 qu’elle possède en Europe. Elle est en train de fermer définitivement deux fourneaux à Liège, en Belgique, et elle a mis en sommeil deux fourneaux à Florange, en France, après avoir cherché à les fermer. (1)

L’agence de notation Fitch a déclaré que le déclassement d'ArcelorMittal « reflète un environnement plus difficile que prévu précédemment concernant les perspectives du marché européen d'acier en 2013 ; ce qui engendre à son tour un ralentissement du rythme d'amélioration du ratio d’endettement du groupe au cours des deux à trois prochaines années ». Fitch a abaissé la dette d'ArcelorMittal au rang de junk bond (obligation pourrie).

ArcelorMittal, qui a également été rétrogradée au statut de junk bond par Moody's et par Standard & Poor’s, a répondu aux conditions de marché fortement défavorables en Europe en vendant des actifs pour réduire son énorme dette, principalement constituée pour financer des acquisitions au cours de la dernière décennie. La dette de la société s'élève à 23,2 milliards de dollars au troisième trimestre. (2)

En octobre, la société a enregistré une perte, plus importante que prévue, de 709 millions de dollars pour son bilan du troisième trimestre, qui comprenait des charges liées aux hauts fourneaux belges et français. (3)

La décote d’ArcelorMittal intervient en même temps que des annulations de projets dans le secteur des métaux. Au cours des deux dernières semaines, Vale S.A. au Brésil et ThyssenKrupp A.G. en Allemagne ont toutes deux annulé des milliards de dollars d'investissements alors que l’offre de métaux non ferreux et d’acier continue à l'emporter sur la demande.

Wolfgang Eder, directeur de l'aciériste autrichien Voestalpine A.G. et président de l'Association européenne de l'acier, a appelé les politiques européens à organiser une opération coordonnée de coupes dans la production d’acier en Europe. « L'industrie sidérurgique pourrait retomber dans l'erreur commise dans les années 1980, quand elle exigeait des subventions pour conserver des haut-fourneaux obsolètes pour des raisons sociales et politiques », a-t-il déclaré dans un récent entretien. (4)

Les analystes prédisent que la perte enregistrée par ArcelorMittal va probablement accélérer la réorientation stratégique de l'entreprise vers les États-Unis, où la demande d'acier pourrait augmenter de 10 % en 2013. «Peu à peu, la société réoriente ses activités de l'Europe vers l'Amérique du Nord », a déclaré l'analyste de Nomura, Neil Sampat, en soulignant que la compagnie n’a prévu pratiquement aucun investissement en Europe pour la production d'acier ou de minerai de fer. (5)

L’analyste de Barclays David Gagliano a déclaré dans un rapport (6) que « si des gains sont attendus pour la production d'acier en Amérique dans un environnement mondial qui reste déprimé, il n’y a aucun signe de reprise en Europe ».

Inti Landauro et Diana Kinch

Notes du traducteur

(1) A qui la faute ? A Mittal ou aux deux gouvernements français qui l’ont empêché de les fermer définitivement pour faire des économies ?

(2) A qui la faute ? A l’ambition débordante de Lashkmi Mittal (la grenouille voulant se faire bœuf) ou au commissaire européen de la concurrence de l’époque, Mme Neelie Kroes (2004-2010), qui a donné son aval, en 2006, à cette fusion ? Plus généralement, peut-on se passer des services de la Commission européenne pour assurer la libre concurrence au sein du marché européen ? N’est-elle pas redondante avec l’Organisation mondiale du commerce (O.M.C) pour assumer ce rôle de gendarme ? Sans compter les 27 juges de la Cour de Justice européenne qui aurait très bien pu être saisie pour déterminer si cette fusion faussait ou non la concurrence en Europe. A chaque faillite des autorités de tutelle du marché, nos politiciens réclament encore plus de réglementations inutiles en rejetant toujours la faute sur le marché, assimilé à « la loi de la jungle », sur le libéralisme «débridé », ou sur le capitalisme « sauvage ».

(3) Dans ma note du 9 décembre 2012, j’étais trop modeste au sujet des pertes essuyées par ArcelorMittal pour « faire plaisir à tout le monde en France à l’exception notoire de ses actionnaires ». Ce n’est pas 20 millions de dollars qui sont partis en fumée à Florange mais une centaine. Cela ne va émouvoir personne en France qu’une entreprise essuie de telles pertes, jusqu’au jour où elle n’aura d’autre recours que de licencier des milliers de personnes. (confer mon article sur Alcatel-Lucent). C’est ce qui va bientôt arriver car Mittal préfère investir en Amérique où la croissance repart et où la flexibilité du marché du travail est bien meilleure qu’en Europe.

(4) Les vieux démons sont de retour en France. Le ministre du redressement productif, qui est un farouche adversaire du capitalisme, prône un retour à la nationalisation de l’acier. C’est une erreur qui pourrait coûter cher au contribuable français pour sauver des emplois condamnés par le marasme persistant en Europe.

(5) Cette information est en contradiction avec les promesses qui circulent en France à propos d’un plan de 180 millions d’investissement sur le site de Florange.

(6) Ce rapport sert au moins à quelque chose. On ne peut en dire autant de ceux publiés par le Conseil Economique, Social et Environnemental qui était une planque notoire des syndicalistes avant son extension aux écologistes battus aux élections.


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