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30/6/14 Sascha Lehnartz
Le principe de Hollande : «Donnez-moi encore un paquet de Gitanes et, ensuite, j’arrêterai de fumer »

Paris et Rome demandent à nouveau «plus de souplesse» dans la décrue des déficits budgétaires. Avec un peu de temps, tout ira mieux. A la vérité, ils parlent comme des fumeurs invétérés qui tentent de nous faire croire qu’ils veulent arrêter de fumer.

Matteo Renzi s’entend parfaitement avec François Hollande. La chancelière devrait le ressentir lors du Conseil européen à Bruxelles. Les deux coquins vont réclamer «plus de flexibilité» dans l'interprétation du Pacte de Stabilité. Renzi a l’avantage sur Hollande de ne pas s’embarrasser de rhétorique creuse avec son slogan « Mille jours pour changer l'Italie et l'Europe ».

Avant le début de la présidence italienne de l'UE, cela sonne comme un ambitieux chantier mais avec un très faible éclairage. Le président français a, quant à lui, réintroduit une «initiative de croissance» dont la caractéristique marquante est qu’elle n’apporte rien de neuf, avec son refrain en faveur de «plus de flexibilité.»

Dans ces deux langues latines, on entend par «flexibilité» non pas une adaptabilité des facteurs de production à la concurrence ; mais l'extensibilité maximale de la réglementation en vigueur dans le but d'éviter tout effort. «Nous avons besoin de plus de temps pour mener à bien les réformes ! » Selon leur argument, il faudrait autoriser ces deux pays à s’endetter davantage à court terme. Après cela, tout ira bien.

François Hollande est le Wolfang Koeppen de la politique européenne

Nous connaissons ce refrain dans d’autres domaines, comme celui du tabac. «Donnez-moi juste un dernier paquet de Gitanes, et après, je le jure, j’arrêterai de fumer.» La France rate depuis des années les exigences de Bruxelles en raison de son manque de volonté politique de réformer le pays. Si vous accordez à Hollande un autre sursis, il ne se produira comme d’habitude absolument rien. Mais la prochaine fois, la France réclamera encore un peu plus de souplesse.

Dans les années cinquante, il y avait un auteur à la mode dans l’ancienne République fédérale, Wolfgang Koeppen . Il avait écrit trois romans prometteurs. Son éditeur rêvait de faire avec lui un gros coup avec un «Ulysse» à la sauce allemande. Koeppen tint en haleine son éditeur pendant des décennies sur ce grand projet, alors que ce dernier lui versait régulièrement des acomptes sur cette œuvre magistrale. Quand Koeppen mourut en 1996, son éditeur découvrit avec effroi que l'Ulysse en question n’avait même pas été ébauché.

François Hollande est une sorte de Wolfgang Koeppen de la politique européenne, mais à une différence près : contrairement à cet auteur allemand, il n’a jamais écrit de sa vie une œuvre prometteuse pour nous tenir en haleine. (1)

Sascha Lehnartz

Notes du traducteur

(1) Comme son grand prédécesseur à l’Elysée, qui nous a longtemps assommés de discours creux sur un ton comminatoire, le locataire actuel aime donner à chaque sommet européen sa petite leçon économique à nos partenaires qui ont choisi l’horrible voie libérale pour se désendetter et renouer avec la croissance. Comment se fait-il que ces bornés Teutons n’aient pas encore compris notre géniale économie dirigiste, concoctée par nos indépassables énarques ? C’est à désespérer du genre humain. Sur le bus de l’équipe de France de football qui effectue son épatante tournée brésilienne avec la complicité des journalistes français, le slogan suivant apparaît en bonne place : «Impossible n’est pas français», lequel préfigure une grande victoire (Wagram ou Waterloo ? A vous de choisir) lors de la finale du 13 juillet prochain au stade de Rio de Janeiro.
Sur l’avion présidentiel qui transporte « Sa Suffisance» dans toutes les capitales du monde, le slogan suivant devrait être arboré en toute simplicité : «Le ridicule ne tue pas en France. J’en suis la preuve irréfutable.»



 
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