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7/5/12 | Claude Reichman |
Le « modèle social français » a tué Sarkozy ! Il y a un contrat non écrit entre les Français et la droite : celle-ci doit faire marcher l’économie. Sarkozy y a échoué. C’est pour cela qu’il a perdu. On peut évidemment ajouter de nombreuses autres causes à sa défaite, mais aucune n’aurait suffi à la provoquer. Et c’est parce que Hollande n’inspire aucune confiance en matière économique que sa victoire n’apparaît acquise que par défaut. C’est parce qu’il a voulu maintenir le « modèle social français » que Sarkozy a échoué. Rappelons que les dépenses sociales représentent 650 milliards d’euros sur un total de 1000 milliards de dépenses publiques. Un pays moderne, inclus dans l’ensemble européen et confronté à la concurrence mondiale, ne peut pas supporter un tel poids sans compromettre toutes ses chances de croissance économique. C’est pourtant le choix que Sarkozy a fait dès les premiers pas de son quinquennat, en nommant un conseiller social, Raymond Soubie, qui occupait déjà les mêmes fonctions sous Giscard et qui était en quelque sorte le garant de la continuité. Une continuité qui allait se révéler fatale. Profondément déséquilibré, le « modèle social français » était insoutenable dès avant la crise de 2008. Il a mis la France au tapis dès que celle-ci a éclaté. Quand on tient un bistro, il ne faut pas « boire le bar » si l’on ne veut pas faire faillite. Quand on dirige un pays, il ne faut pas que ses dépenses de fonctionnement étouffent les entreprises, qui sont les seules à créer de la richesse et de l’emploi. En France, depuis des années, on assiste à une véritable hécatombe d’entreprises, qui s’accompagne de plans sociaux et d’un accroissement inexorable du chômage de masse. Sans que le pouvoir politique ne prenne le taureau par les cornes, n’informe le pays de l’état réel de son économie et n’assume les mesures de sauvegarde qui s’imposent. C’est désormais la mission qui incombe à François Hollande. Le fait qu’il soit socialiste peut lui faciliter la tâche. Le peuple supporte mieux les privations quand elles lui viennent de ceux qui, par doctrine, en refusaient la mise en œuvre et qui, pour cette raison, ont capté les suffrages d’une majorité. Si le nouveau président de la République emprunte cette voie, comme le général de Gaulle avait imposé à la droite la perte de l’Algérie, il aura accompli ce que le pays peut attendre de lui. Sinon - et c’est l’hypothèse la plus probable - son mandat sombrera dans le chaos. La route de François Hollande est balisée par les dispositions que ses prédécesseurs - et au premier rang d’entre eux François Mitterrand - ont inscrites dans les lois françaises sans se résoudre à les appliquer. Il s’agit de transformer la protection sociale des Français en y instaurant la concurrence, ce qui n’interdit nullement la solidarité du moment que celle-ci se fait au bénéfice des plus démunis et par la voie la plus conforme, qui est celle de l’impôt. La Sécurité sociale est le principal handicap de la France. Elle détruit l’emploi, créant une insécurité économique qui rend impossible toute véritable protection sociale. Le nouveau président de la République doit se souvenir de ce qu’avait dit François Mitterrand à la télévision dans les années 90, quand répondant à Anne Sinclair qui lui demandait ce qu’il pensait de nos options consistant à redonner aux Français la totalité de leur salaire et à les laisser libres d’assurer eux-mêmes leur protection sociale, loin de s’insurger, il avait susurré : « Ca peut se discuter. » Et pour cause : il venait de signer, avec les autres chefs d’Etat et de gouvernement européens, les directives supprimant le monopole de la sécurité sociale et qui sont devenues depuis, sous notre pression, des lois françaises ! Quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse, les réalités s’imposent. François Hollande, dès le lendemain de son élection, y est confronté. Nicolas Sarkozy a passé cinq ans à tenter de les écarter par mille artifices, à commencer par une politique de communication qui n’était rien d’autre que le mensonge permanent assorti d’une autocongratulation qui ne convainquait que lui. Sa campagne de 2012 n’a été qu’un remake de celle de 2007. Les Français lui ont en quelque sorte donné raison en choisissant la rupture …avec lui. Et en chargeant de cette mise à jour du pays un homme, François Hollande, qui n’a jamais su pratiquer, dans sa carrière politique, que les demi-mesures et le compromis. Il paraît que la fonction, parfois, transforme l’homme. Pour la France, il serait bon que l’adage se vérifie ! Claude Reichman |