Descendants Léon Blum recherchés en vue
entrée gouvernement
C'est donc le gouvernement "Rubik's cube" que celui qui a été présenté
hier soir, sur le perron de l'Elysée. Nicolas Sarkozy a fait tourner ses
fidèles comme les faces colorées du célèbre casse-tête, pour changer leurs
attributions sans faire de révolution. Une exception de taille, les deux
titulaires de Bercy, Christine Lagarde et Eric Woerth, respectivement
ministre de la Récession sans précédent depuis la guerre, et ministre
délégué en charge des Déficits historiques, restent en poste.
Si nos deux martyrs ne sont pas relevés de leur supplice, c'est que personne
ne se précipite pour les remplacer. Et qu'ils se sont diablement bien tirés
de leur mission jusqu'ici. Christine Lagarde notamment, qui sait même
annoncer les mauvaises nouvelles en anglais. Cette stabilité est fort
bienvenue pour les relations avec nos partenaires européens, après les
changements incessants de ministres des Finances durant les mandats
chiraquiens. Surtout à l'heure où il va falloir vendre à Bruxelles la
théorie aventureuse de Sarkozy sur le "bon" déficit budgétaire. Christine
Lagarde devra apprendre à parler aussi la langue de Goethe. Car il n'est pas
sûr que les syllogismes élyséens soient accueillis outre-Rhin avec la
tolérance qu'ils inspirent chez nous.
Côté ouverture, on voit bien que la mer dans laquelle pêche le président est
moins poissonneuse. C'est le problème de l'épuisement de la ressource, bien
connu des pêcheurs en colère. Si Frédéric Mitterrand à la Culture donne
l'apparence d'une belle prise, c'est d'abord grâce à son patronyme, qui
rappelle vaguement quelqu'un. C'est assez chic de pouvoir installer un
Mitterrand à la table du Conseil qu'on préside. Pourquoi, du reste,
s'arrêter en si bon chemin ? Le président Giscard d'Estaing a aussi des
enfants. Et Léon Blum a sûrement des descendants.
L'ex-animateur d'"Etoiles et toiles" aura au moins le mérite de réconcilier
le président avec le petit monde des stars de cinéma, la "gauche homard", le
caviar étant un peu de mauvais goût en ces temps où s'allongent les cohortes
de chômeurs. Sarkozy ne joue plus ici au "Rubik's cube", mais au billard à
trois bandes. Et si les puristes de l'ouverture regrettent ce matin qu'il
n'y ait pas, dans le gouvernement Fillon IV, de "vrais" socialistes, il faut
dire que le président a une bonne excuse : c'est une espèce en voie de
disparition.
François Lenglet
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