La bulle des LBO est en train
d’exploser !
Il y trois ans, le prix des logements a commencé a chuter dans les
états américains du Nevada, de Californie, de Floride et d'Arizona.
Largement ignorée à l'époque, cette information était un fait porteur
d'avenir. On y voyait les prémices de la crise des "subprimes" qui
allait se déclencher en février 2007, et de son effet dévastateur. Les
graves difficultés de l'entreprise Monier, un fabricant de toitures, et
le "bouillon" qu'elles occasionnent pour son propriétaire, le fonds
d'investissement Paribas Affaires Industrielles, pourraient bien être
l'un de ces événements précurseurs, annonçant une nouvelle secousse
financière.
Jusqu'en 2007, les rachats d'entreprise par endettement se sont
multipliés, à des prix toujours plus élevés, pour des centaines de
milliards de dollars. Certaines firmes ont changé de propriétaire
plusieurs fois dans l'année, exactement comme une tonne de cuivre sur le
marché des matières premières. Emprunts faciles, rémunérations
délirantes, naïveté incroyable : les artistes du "private equity" qui
réalisaient ces montages périlleux ont succombé aux mêmes illusions que
Wall Street.
Soulignons l'esprit d'à propos de Paribas Affaires Industrielles, qui
achète Monier en février 2007, c'est-à-dire presque au plus haut. Ou
encore celui de Wendel, qui monte au capital de Saint-Gobain encore plus
tard. Ces gogos du LBO sont comme des Cendrillons à l'envers : ils sont
montés dans le carrosse à minuit moins deux. Et ils vont passer la nuit
dans la citrouille.
La bulle des "Leverage Buy Out", ces rachats d'entreprise financés par
emprunt, est en train d'exploser, sous l'effet de l'effondrement de la
conjoncture et de la raréfaction du crédit. Comme pour les "subprimes",
le dénouement des positions va se traduire par des créances
irrécouvrables et des pertes bancaires. Nous voici au mieux à mi-chemin
de la crise, trois ans après son commencement : les bulles boursières et
immobilières ont crevé, celle de l'endettement se dégonfle seulement.
Restera la fille de toutes les bulles, plus grosse que les mères, celle
de la dette des états.
Pour soigner ces spéculations, il n'y a qu'un remède, mais il est
toujours efficace : la baisse des prix. Si une crise est longue, c'est à
cause de notre réticence psychologique à accepter les ajustements - le
déni. A cause de notre désir de retrouver le monde d'avant. Le temps de
la crise est celui de l'esprit humain, de la difficulté qu'il éprouve à
accepter que le carrosse soit devenu citrouille.
François Lenglet