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15/5/09 | Claude Reichman |
Lettre ouverte au président Obama sur la réforme de l’assurance maladie aux Etats-Unis Monsieur le Président, Vous avez l’intention de réformer la couverture maladie des Américains. Présidant depuis 1991, en France, le Mouvement pour la liberté de la protection sociale (MLPS) que j’ai fondé, je crois être en mesure de vous soumettre le fruit de nos réflexions concernant le système d’assurance maladie des Etats-Unis et sa nécessaire réforme. La situation actuelle n’est pas satisfaisante. Les salariés des plus grandes entreprises bénéficient d’une assurance maladie qui leur est fournie par leur employeur. Les autres salariés, pour l’essentiel ceux des petites et moyennes entreprises, doivent payer leur assurance eux-mêmes. Beaucoup ne le font pas. Ils représentent l’essentiel de la quarantaine de millions de personnes que les médias étrangers citent sans cesse à l’appui de leurs démonstrations visant à prouver que les Etats-Unis sont un enfer social. Rappelons à ces contempteurs du pays de la libre entreprise que celui-ci n’a pas poussé le libéralisme jusqu’à se désintéresser des pauvres et des personnes âgées. Les unes et les autres bénéficient d’une assurance maladie qui leur est fournie par des organismes d’Etat (Medicaid et Medicare), qui n’ont rien à envier au régime français de sécurité sociale, réputé le plus protecteur au monde. Alors où est le problème ? Tout simplement dans l’illusion selon laquelle ce serait les entreprises qui « offrent » une assurance maladie à leurs salariés. En réalité, les entreprises n’offrent rien du tout. Elles se contentent d’amputer les salaires d’un certain montant qu’elles versent pour le compte de leurs employés à des sociétés d’assurance. Et ce sont bien les salariés qui supportent le coût de leur assurance maladie. Si les petites entreprises ne peuvent le faire, c’est parce que leur profitabilité ne leur permet pas de payer des salaires élevés et que ceux qui sont versés ne sont pas suffisants pour supporter une amputation destinée à fournir une assurance maladie. Il n’est pas inutile de rappeler que cette situation résulte de l’entrée en guerre des Etats-Unis lors du deuxième conflit mondial. Les prix et les salaires étant bloqués, les entreprises ne pouvaient améliorer la situation de leurs employés qu’en leur accordant des avantages en nature, comme par exemple une assurance maladie. Deux tiers de siècle plus tard, cet expédient est devenu permanent, ce qui prouve une fois de plus que la « tyrannie du statu quo » stigmatisée par Milton Friedman n’est pas une vue de l’esprit. La réforme à mettre en œuvre est donc évidente. Il faut que les sommes consacrées par les entreprises à l’assurance maladie de leurs salariés soient versées à ces derniers, dont la rémunération sera dès lors complète. Il leur appartiendra alors de contracter une assurance maladie à titre personnel. Ils pourront d’ailleurs, s’ils le souhaitent, se regrouper au sein d’associations, de syndicats ou de mutuelles qui concluront avec les assureurs des contrats de groupe dans des conditions le plus souvent avantageuses. Il va de soi qu’il ne s’agit en aucune manière de remplacer une carte forcée par une autre et que l’adhésion à un groupe quel qu’il soit sera libre et révocable à tout moment dans les conditions habituelles des contrats privés. Cette solution offre des avantages qui sautent aux yeux. Tout d’abord, les salariés découvriront ce qu’ils « valent » vraiment, et ce qu’ils coûtent à l’entreprise. Redevenus propriétaires de leur salaire complet, ils auront soin d’en faire le meilleur usage et y regarderont à deux fois avant de souscrire un contrat d’assurance maladie. Enfin les assureurs seront placés dans un marché redevenu vraiment concurrentiel, alors que dans le système actuel, le principal intéressé, à savoir l’assuré, est absent de la négociation des contrats. Qui dit concurrence dit baisse des tarifs. Cela permettra à beaucoup de salariés des petites et moyennes entreprises d’acquérir enfin une assurance maladie. Ajoutons que la baisse généralisée des coûts de l’assurance maladie améliorera grandement le pouvoir d’achat des salariés, ainsi que leur capacité d’investissement, et que cela renforcera la croissance de l’économie américaine. Une réforme de ce type est en cours d’application en Europe, à la suite de deux directives communautaires de 1992. Mais elle se heurte, là encore à la « tyrannie du statu quo », notamment dans les pays les plus socialisés, comme la France, à qui l’idée de rendre au travailleur le fruit complet de son labeur paraît une abomination libérale. Espérons que les Etats-Unis sauront revenir aux grands principes de leur société, tels que les ont énoncés les Pères fondateurs, et procéder à cette réforme pour le plus grand bien de tous leurs citoyens. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments de haute considération et de mes voeux de réussite. Claude Reichman |