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24/12/09 | Christian Makarian |
La Bible en pleine lumière ! Le moindre des miracles de la Bible n'est pas d'être constamment réimprimée, sous toutes les formes et dans tous les formats. Inusable best-seller, insondable réservoir d'images, incomparables paroles de vérité. Deux parutions diamétralement opposées viennent confirmer que le livre saint est toujours susceptible de recouvrer une nouvelle jeunesse. Avec le précieux coffret que publient les Editions du Cerf, le lecteur est invité à une redécouverte du gigantesque patrimoine artistique que les scènes et les personnages bibliques ont engendré au fil des siècles. A l'heure où l'on confond volontiers toutes les religions au nom d'un faux universalisme qui bafoue la culture, l'héritage et l'appartenance, il est bon de feuilleter ce monumental ouvrage (400 illustrations !), très aéré et étonnamment accessible, pour mesurer combien la civilisation occidentale est redevable à ses sources juives et chrétiennes. En trois volumes, dignement reliés et admirablement illustrés, le texte (traduction de l'Ecole biblique de Jérusalem) apparaît en pleine lumière, flanqué de reproductions très soigneusement choisies et, le plus souvent, assez peu connues. Tel ce psautier byzantin (Xe siècle), magnifique allégorie, retenu pour représenter le passage de la mer Rouge : on y voit la fureur des Egyptiens, engloutis par les flots, au-dessous d'un peuple serein qui marche droit, guidé par Dieu. Qu'on se rassure, les admirateurs de Michel-Ange, de Poussin, ou de tous les grands maîtres, comme tous ceux qui ont fait des cauchemars après avoir contemplé Judith et Holopherne d'Artemisia Gentileschi seront comblés. Trois habiles commentateurs, Grégoire Aslanoff, Jean-François Colosimo et Isabelle Saint-Martin donnent vie à ces peintures, parchemins ou vitraux en signant des textes brefs et vivants qui scandent avec bonheur la lecture. De la Genèse aux Epîtres, un travail exceptionnel qui offre à l'oeil sa récompense. Le Dictionnaire amoureux de la Bible, de Didier Decoin, est une autre gratification, un exercice libre, passionnant, dont on ressort enrichi en évitant les voies catéchétiques. Fasciné par la beauté du récit biblique, par la puissance du Verbe, par la profusion épique, le romancier revisite les deux Testaments en suivant, à travers livres, un chemin buissonnier qu'il parsème de pensées personnelles, qui ont jailli de ses innombrables lectures, ou de souvenirs de voyage éclairants. Il a raison au sujet de Caïn (et d'Abel) de nous ouvrir les yeux en s'appuyant sur la version de lord Byron, assez blasphématoire en son temps : "Dieu est ce genre de Créateur qui se sert autant d'une gomme que d'un crayon... Caïn va alors tuer Abel pour défier le Dieu destructeur et prouver à celui-ci qu'il n'est pas le seul à pouvoir anéantir ses créatures." Decoin dépoussière, investigue, rediscute, réinterprète le souffle hébreu et l'esprit grec. Et s'il semble divaguer, ce n'est que pour donner aux versets une valeur de modernité insoupçonnée. "Ma Bible d'homme parle du monde entier", explique-t-il. C'est vrai, et on s'y sent citoyen de la Création. Christian Makarian
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