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23/12/11 Bernard Martoïa
 Comment Fannie Mae et Freddie Mac, organismes                  publics, ont fait exploser la bulle
                        immobilière américaine !

Les démocrates ont passé des années à faire croire que les prêteurs privés ont créé la bulle de l'immobilier, et que Fannie Mae et Freddie Mac n’ont fait que suivre le mouvement. Cela a toujours été une fiction politiquement commode, et maintenant grâce aux éléments apportés par la Securities and Exchange Commission (S.E.C), nous avons une série de preuves montrant comment les géants du crédit hypothécaire ont turbocompressé la crise. (1)

L’histoire a été révélée vendredi par la SEC, qui a engagé des poursuites civiles à l’encontre de six anciens dirigeants de Fannie et Freddie. La SEC affirme que les entreprises parapubliques ont abusé les investisseurs parce qu'elles «connaissaient et approuvaient les déclarations trompeuses» à propos de leur exposition aux prêts subprime et qu’elles développaient sciemment cette entreprise.

Les dirigeants nient ces accusations, et nous espérons qu’il n’y aura pas d’accord, car leur cas mérite d’être examiné par un tribunal afin que les Américains puissent voir en détail comment Fannie Mae et Freddie Mac étaient au centre de la bulle. Les poursuites elles-mêmes, combinées avec des informations admises comme vraies par Fannie Mae et Freddie Mac dans des accords conclus avec la SEC pour ne pas déférer devant la justice une procédure civile, sont certainement éclairantes.

L'histoire qui circule à Washington prétend que le mandat donné à Fannie Mae par le Congrès et consistant à fournir à chacun un logement abordable n'a rien à voir avec elle. Mais les poursuites de la S.E.C. indiquent que Fannie Mae a abaissé ses critères de souscription de prêts afin d'accroître sa part de marché dans les prêts subprime. D’après les documents de la SEC, par exemple en 2006, Fannie Mae a ajusté son système de souscription automatisée «Desktop Underwriter». Fannie l’a fait sciemment dans le cadre de sa stratégie consistant à augmenter les prêts accordés à des gens n’ayant pas de revenus suffisants.

La SEC montre également comment Fannie Mae a conduit les prêteurs privés vers le marché des subprimes. En juillet 1999, Fannie Mae et Angelo Mozilo de Countrywide Home Loans (2) sont entrés dans «un accord d'alliance» qui comprenait un programme de documentation réduite appelée le «prêt à Internet», plus tard appelé le «Fast and Easy». Comme le note la SEC, «au milieu des années 2000, d’autres prêteurs hypothécaires semblables ont réduit les documents d’enquêtes de prêts, tels que Mortgage Express et PaperSaver qui ont été refinancés en volumes toujours plus importants par Fannie Mae.»

M. Mozilo et Fannie Mae étaient essentiellement des partenaires d'affaires dans le secteur des subprimes. Countrywide trouvait les clients, tandis que Fannie Mae fournissait le capital sur le dos du contribuable. Et le reste de l'industrie a suivi.
Comme Fannie Mae élargissait ses rachats de prêt subprime avec les garanties adossées, la SEC allègue que les dirigeants cachaient le risque aux investisseurs. On peut considérer l’attitude de Fannie Mae comme son «initiative la plus importante pour servir des emprunteurs déficients».

A la fin de l’année 2006, Fannie Mae détenait 43,3 milliards de dollars de prêts, qui, selon la SEC, avaient un «taux de défaut particulièrement plus élevé» que les prêts subprime eux-mêmes. Le 30 juin 2008, Fannie Mae avait 60 milliards de dollars en prêts Expanded Approval et 41,7 milliards de dollars dans un autre programme très risqué «Mon hypothèque communautaire», mais elle n’a déclaré que 8 milliards de dollars de ces prêts à haut risque.

La SEC affirme que les dirigeants de Fannie Mae ont également omis de divulguer l'exposition totale de la société aux prêts à risque "Alt-A", parfois appelés «prêts menteurs», qui nécessitent encore moins de documentations que les traditionnels prêts subprimes. Fannie a créé une catégorie spéciale appelée «emprunteur sélectionné» et il leur a donné un code pour les séparer des prêts Alt-A qu’elle avait publiquement divulgués. Le 30 juin 2008, Fannie Mae a déclaré que son exposition aux prêts Alt-A représentait 11% de son portefeuille, quand il était près de 23%, soit une différence de 341 milliards de dollars !

Pendant tout ce temps, les dirigeants de Fannie se sont efforcés de calmer les craintes croissantes concernant les subprimes tout en recevant des rapports internes sur l'exposition aux risques de l'entreprise. En février 2007, le directeur des risques financiers, Enrico Dallavecchia, a dit aux investisseurs que l'exposition subprime de Fannie était «immatérielle». Lors d'une audience devant le Congrès en mars 2007, le PDG, Daniel Mudd, a déclaré que «nous voyons cela comme une partie de notre mission et de notre charte de rendre les prêts hypothécaires sûrs et disponibles pour les personnes qui n'ont pas de crédit parfait», ajoutant que l'exposition subprime de Fannie était «relativement minime». Freddie Mac est également incriminée.

L’enquête de la SEC devrait embarrasser la commission des finances du Congrès qui a passé dix-huit mois à enquêter et qui a publié, en janvier 2011, un rapport qui blanchit Fannie Mae et Freddie Mac. Nancy Pelosi (3) avait créé une commission pour prouver que la crise était de la faute des banquiers privés, et le président de la commission, Phil Angelides, avait écrit ce qu'elle voulait.

Loin d'être périphérique à la crise du logement, le procès de la S.E.C. montre que Fannie Mae et Freddie Mac étaient au cœur même de celle-ci. Les prêteurs privés faisaient beaucoup d'erreurs, mais ils n'auraient jamais pu faire autant de mal si les sœurs jumelles parapubliques n’avaient pas fourni des dizaines de milliards de dollars subventionnés par les contribuables pour prêter à des conditions avantageuses à des emprunteurs qui ne pouvaient pas rembourser.

Le Congrès a créé les deux géants du crédit hypothécaire pour fournir un «logement abordable», et ni le système financier, ni les contribuables ne seront en sécurité tant que le Congrès n’aura pas réduit le champ d’action des deux jumelles toxiques, et ultimement mis fin à leur existence.

Bernard Martoïa

(1) J’avais vu juste le 30 août 2008 dans cet article intitulé «La responsabilité de deux administrations démocrates», publié sur mon blog droite-conservatrice, alors que tous les journalistes et politiques français accusaient à tort et à travers le libéralisme, thème qui fut repris à son compte par le président de la République dans son discours de Toulon. Il est tragique que ceux qui se trompent tout le temps en France ne soient pas sanctionnés un jour par les lecteurs ou par les électeurs.

(2) «Les Cendres d’Angelo», du 17 août 2009, un autre article intéressant sur mon blog à propos de cet homme d’affaires véreux qui a ruiné le contribuable américain mais qui est protégé par l’establishment.

(3) Il ne faut pas oublier que l’ancien speaker démocrate à la Chambre des Représentants est l’élue du cinquième district de Californie, qui est celui de la capitale, Sacramento, où la bulle immobilière a été l’une des plus grosses du pays. Par sa faute et celle de ses amis présidant aux destinées des deux entités parapubliques, des rues entières furent en vente après l’éclatement de la bulle, comme je l’ai appris d’une amie qui vit dans la capitale de la Californie. Relire aussi mon article cocasse » du 29 décembre 2008, sous le titre «Des millions de piscines individuelles converties en patinoires par la faute des keynésiens », où je raconte comment de jeunes patineurs utilisent les piscines des maisons abandonnées. On ne soulignera jamais assez le rôle néfaste de l’Etat et de ses épigones, comme la Fed et les sœurs jumelles, qui sont à l’origine de cette bulle immobilière. La S.E.C. vient de le prouver. Le candidat républicain Newt Gingrich, qui est passé très provisoirement en tête dans les sondages, a reçu de la part de Freddie Mac 1,5 million de dollars en tant que «consultant», mais l’intéressé ne se rappelle pas exactement combien il a touché. Ses contrats de consultant s’étalent sur une longue période allant de 1999 à 2007.


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