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9/12/12 Bernard Martoïa
 Nos entreprises crèvent, le temps des folles illusions
                                    s'achève !  

Après la bataille avec Mittal qui reçoit la couverture médiatique que l’on connaît, un autre drame se joue dans une autre grande entreprise française. Pour l’instant, les médias n’en parlent pas car il ne s’agit que d’une hémorragie financière. Le sort des actionnaires n’intéresse personne en France. Mais quand cette entreprise sera contrainte d’annoncer des licenciements massifs pour éviter la banqueroute, soyez certains que l’affaire fera grand bruit.

De qui s’agit-il ?

Cette société était un leader des communications avant la bulle Internet. Pour vous mettre sur la piste, le zénith de l’action fut atteint, le 5 septembre 2000, lorsque celle-ci clôtura à 85 $ à Wall Street. Galvanisés par cette ascension stratosphérique, ses dirigeants commirent l’imprudence d’acheter un concurrent américain. La fusion n’apporta pas la synergie escomptée, sauf pour le portefeuille des ex-dirigeants de l’entreprise qui furent remerciés. Aujourd’hui, l’action ne vaut plus que 1 $. Elle connaît la même descente aux enfers que l’action d’ArcelorMittal dont nous vous avons entretenus la semaine dernière. Même si la bourse n’est pas votre tasse de thé, vous avez peut-être deviné de qui il s’agit.

Poursuivons. Les dirigeants d’Alcatel, puisque c’est de cette société qu’il s’agit, sont confrontés aux mêmes problèmes que rencontrent toutes les entreprises françaises, à savoir qu’il est strictement interdit de licencier du personnel, même si les ventes sont en chute libre. N’osant pas braver cet interdit qui leur vaudrait, à coup sûr, les foudres du ministre chargé du « redressement productif », des syndicats et des médias, ces dirigeants terrorisés cherchent une voie de secours du côté de Wall Street, et plus précisément auprès de la banque d’affaires, qui est diabolisée non seulement en France mais aussi en Amérique. Les tractations sont lentes et difficiles car la somme demandée par les Français pour sauver leur entreprise est coquette : 1 milliard d’euros ou 1,31 milliard de dollars au taux de change actuel. Il est utile de donner la valeur en dollars en raison des pertes de change que subira l’une des deux parties contractantes.

Plus alarmant, cette somme pharaonique ne va pas servir à restructurer rapidement l’entreprise comme il conviendrait de le faire en coupant les branches mortes, mais à gagner du temps. « Donner du temps au temps », selon la formule de Mitterrand qui fait florès dans une France arc-boutée sur des « avantages acquis » déraisonnables mais qui ne sont pas négociables. Cela permettra à l’entreprise en péril de gagner une année au mieux, en maintenant des effectifs pléthoriques (environ 76 000 salariés), pour faire plaisir à tout le monde en France.

Même casse-tête pour Mittal. Les médias français ont passé sous silence que ce brave Lakshmi a laissé allumés pendant un an pour rien ses deux hauts fourneaux de Florange pour faire plaisir à tout le monde en France, à l’exception notoire de ses actionnaires à qui il a pourtant des comptes à rendre. Cela représente une perte sèche de 20 millions d’euros pour l’entreprise. Alors que celui-ci est devenu le bouc-émissaire idéal des Français, lequel d’entre eux, qui serait à sa place, accepterait de brûler son argent pour leur faire plaisir ? Comme 90 % de nos compatriotes ne sont pas concernés, car ils sont soit fonctionnaires, soit salariés ou chômeurs, ils rejettent la logique du marché qu’ils abhorrent.

Que l’on aime ou non la loi d’airain du marché, nous en vivons et nous en dépendons tous les jours de notre vie. L’égalité parfaite dans tous les domaines (sexe, revenu, patrimoine, santé, vacances, etc.), à laquelle aspirent tant de Français, n’a jamais existé dans la défunte Union soviétique, avec sa nomenklatura qui était épargnée des affres de la crasse pauvreté de son peuple, à l’exception des goulags où la mort était assurée pour tous les déportés. Quelle satisfaction peut-on tirer de cette triste utopie collective, qui a perduré pendant soixante-douze longues années, si ce n’est de récompenser bassement une jalousie maladive de voir son voisin gagner plus que soi ? Dieu nous a créés chacun avec un capital différent à la naissance. La société parfaite à laquelle aspire toujours le socialisme n’est malheureusement pas de ce monde.

La Grande Illusion

Grâce à l’ingénierie financière de nos énarques, les Français baignent dans l’illusion qu’un pays soumis à une forte concurrence extérieure pourra conserver son modèle social. Il suffit pour cela de ponctionner l’argent de ceux qui triment à travers un impôt confiscatoire progressif (et non pas juste en le rendant proportionnel à tous les ménages, y compris pour les plus modestes, avec la flat tax, et en supprimant, au passage, toutes les niches fiscales qui entretiennent inutilement des parasites comme les groupes de pression, les élus et les experts fiscaux) pour assurer une redistribution équitable du butin. Tout le monde vit ainsi aux crochets de tout le monde en France, à l’exception des vrais créateurs de richesse qui prennent, eux, tous les risques pour nous assurer un revenu encore décent.

Mais la grande illusion se termine alors que les sociétés françaises déposent leur bilan à un rythme accéléré. A quoi bon trimer pour se voir confisquer 75% de ses revenus ? Une personne riche devra travailler gratuitement pour l’Etat-providence jusqu’au 29 septembre de l’année fiscale qui commence le 1er janvier dans notre pays. Le locataire de l’Elysée s’est fait élire sur ce pari risqué de ponctionner davantage les riches pour combler les brèches du Titanic. Nous pouvons affirmer, sans courir le risque de nous tromper, que les rentrées fiscales seront forcément moindres l’année prochaine, et toutes les autres années de son quinquennat.

Nous souhaitons beaucoup de courage, d’abnégation et de diplomatie à notre ministre délégué au « redressement productif » pour convaincre les chefs d’entreprise que cela vaut encore la peine de travailler dans notre enfer fiscal.

Trop d’impôt tue l’impôt !

En 1974, l’économiste Arthur Laffer dessina, sur une nappe de papier, une courbe de rendement de l’impôt en forme de cloche pour convaincre les conseillers réticents du président Gerald Ford de renoncer à leur idée farfelue de taxer davantage les riches pour combler le déficit budgétaire. Pour engranger des recettes fiscales plus importantes, il faut simultanément baisser drastiquement les impôts et les dépenses. C’est le paradoxe que comprend parfaitement le maire conservateur de Londres, Boris Johnson, qui est prêt à accueillir toutes les grandes fortunes de France. C’est une véritable aubaine pour sa ville surendettée par l’accueil des derniers Jeux olympiques.

Sur l’autre rive du Channel où règne une incroyable inculture économique entretenue par l’Education nationale et par les médias, il ne faut plus s’étonner de rien et de voir passer sous silence ces quelques vérités dérangeantes.

Sur l’autre rive du Pond, Mitt Romney a perdu l’élection présidentielle contre Barack Hussein Obama pour un tas de raisons. Mais il a commis, à notre avis, une erreur fatale en déclarant imprudemment pendant sa campagne que 47% des Américains ne voteraient jamais pour lui car ils dépendent, d’une manière ou d’une autre, des subsides de l’Etat.

Qu’on le veuille ou non, l’Amérique rêvée d’Obama a parfaitement assimilé et copié en quatre ans la mentalité d’assisté (entitlement mentality) prodiguée par un Etat-providence comme il en existait partout en Europe avant qu’un grain de sable sur une plage grecque ne vînt troubler cet éphémère paradis terrestre. Ce modèle est forcément périmé dans une mondialisation acharnée, mais nous vivons dans l’illusion que c’est encore aux autres (c'est-à-dire à 90% de la population mondiale) de s’adapter à nos idées reçues.

Bernard Martoïa

 

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