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11/5/10 Bernard Martoïa
           Merkel n’est pas Thatcher

          « La mort est juste une rumeur distante pour un jeune » Andy Rooney

Le plan de sauvetage de l’euro est la copie conforme du plan américain d’Henry Paulson (l’ancien Secrétaire du Trésor) dénommé TARP (Trouble Asset Relief Program). Dans l’urgence, il fallait frapper fort avant l’ouverture des bourses asiatiques. Un accord a été trouvé à 2h du matin à Bruxelles. Ce plan prévoit une aide d’un trillion de dollars. Il fallait bien parvenir à ce chiffre magique pour frapper l’imagination des Yankees. Pour reprendre la terminologie de la doctrine militaire américaine en vogue, la marquise de Bercy a accouché de la bombe «Shock and Awe. » La Bourse de Tokyo a bien accueilli le plan et les autres places ont suivi dans son sillage. Mission accomplie ! Cocorico à l’Elysée : Super Sarko a sauvé la planète ! Les hedge funds, spécialisés dans la vente à découvert, boivent la tasse aujourd’hui. Les banques françaises rebondissent après le massacre de la semaine dernière.

Serait-ce la fin de la crise de l’euro ?

Au risque de faire grincer les dents des béats et des collectivistes, je dis non. Ce n’est qu’une accalmie de quelques mois. Les requins n’ont plus besoin de se tenir embusqués en Mer Egée. Avec la caution apportée par les Quinze à la Grèce, ils peuvent à présent prendre des vacances méritées. Ils reviendront patrouiller en toute sérénité à l’automne dans les mers qui bordent aussi bien l’Europe méridionale que l’Europe septentrionale. Dès qu’ils flaireront le sang (défaut de paiement d’une cigale), ils n’auront que l’embarras du choix pour la curée.

Changement de capitaine à bord du sous-marin allemand en détresse

Dans l’épisode précédent, le commandant du sous-marin allemand en détresse avait la possibilité de condamner le compartiment inondé pour sauver son bâtiment. Le commandant irrésolu ne l’a pas fait. Il a écouté les injonctions de Washington. Deux coups de téléphone de Barack Hussein Obama, dans la seule journée de dimanche, ont eu raison de sa détermination. Le second officier matois (Paris) a profité de l’irrésolution du commandant pour pousser son programme : « Pour sauver la cigale grecque, nous prenons le risque de ne pas condamner le compartiment inondé. »

Question : « Et si la salle des machines est inondée, qu’est-ce qu’on fait chef ? »

Réponse : «Advienne que pourra ! » (L’économie n’a jamais été la tasse de thé des Français)

Le sous-marin allemand pourra-t-il refaire surface ?

La réponse ne dépend pas des marchés ou des spéculateurs mais des Européens eux-mêmes. En renonçant à fermer le compartiment touché (cigale grecque) et les autres à venir (Portugal, Espagne ou France), on ne donne pas cher des chances de survie du bâtiment. La discipline imposée par l’ancien commandant allemand appartient au passé. Le traité de Maastricht est mort dimanche. Comme la Fed à l’automne 2008, la Banque Centrale Européenne va pouvoir racheter des montagnes de produits toxiques (dettes pourries des cigales). Les Keynésiens jubilent d’avoir tordu le cou à l’orthodoxie monétaire allemande. La fourmi Angela a pris une double claque en perdant l’élection de l’important État de la Rhénanie du Nord et de la Westphalie (Nordrhein-Westfalen). Elle a perdu sur les deux tableaux par ses atermoiements. Margaret Thatcher manque beaucoup à l’Europe. La dame de fer n’aurait cédé ni au bagout de Paris ni au chantage de Washington. Le malheur des fourmis fait le bonheur des cigales.

L’erreur d’un trader a dévoilé un colosse aux pieds d’argile

Alors que la nervosité des marchés était à son comble jeudi dernier, un trader passablement surmené s’est trompé en passant un ordre électronique. Au lieu de vendre 1,6 millions d’actions de Procter & Gamble, il a tapé 1,6 milliards. En quelques minutes, l’index Dow Jones a plongé de 1000 points à la suite de cette erreur qui a provoqué une avalanche d’ordres de vente électronique.

C’est la faute du programme « high frequency trading » mis au point par Sergey Aleynikov pour le compte de Goldman Sachs. La firme maudite de Wall Street avait eu raison de porter plainte contre Sergey en disant que si ce programme tombait entre de mauvaises mains, cela occasionnerait des « manipulations malhonnêtes ». (1) On voit le résultat aujourd’hui. Le programme en question, qui permet de passer un ordre en une fraction de seconde, a été copié par d’autres firmes de Wall Street. Goldman Sachs a perdu son avantage comparatif par rapport à ses concurrents. Une autre explication truculente nous a été fournie par Alan Abelson (2) : « Yahoo a publié une dépêche d’Associated Press à 12h30 : la Fed mène une enquête à propos des démangeaisons provoquées par les nouvelles couches de bébé commercialisées par Procter & Gamble. » Ce serait la raison pour laquelle le trader se serait précipité sur son ordinateur pour passer l’ordre fatal à tout le marché.

Plus sérieusement, ce dévissage brutal a révélé l’extrême fragilité du cœur de la finance. Byron Wien, un vétéran de Wall Street qui est le vice-président de Blackstone Advisory Partners, a délivré la meilleure explication de cet épiphénomène : « Les États-Unis ne sont certainement pas la Grèce mais le monde développé a vécu trop longtemps au-dessus de ses moyens. On lui demande à présent des comptes. » Cela corrobore l’avertissement cinglant délivré par José Pinera sur la chaîne Fox News : « Si les Etats-Unis n’abandonnent pas leur cher modèle bismarckien (sécurité sociale), ils feront faillite en 2017 » (3)

Bernard Martoïa

(1) Archive du 18 juillet 2009 : « La théorie de la conspiration revisitée ».
(2) Barron’s Magazine, Alan Abelson « The Infant’s Intifada ».
(3) Archive du 16 mars 2017 : « La banqueroute des États-Unis en 2017 ».


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