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27/12/09 Bernard Martoïa

Obama pense déjà à sa réélection !

« Le but de la science n’est pas d’ouvrir la porte à une sagesse infinie mais de mettre une limite à une erreur infinie. » Berthold Brecht

Dès son arrivée à la Maison Blanche, le président Barack Hussein Obama avait annoncé la couleur : un plan de relance keynésien d’un montant de 825 milliards de dollars, représentant 5,7 % du PIB américain. On allait voir ce qu’on allait voir ! Mais si cela n’avait tenu qu’à Paul Krugman, le prix Nobel d’économie 2008, il eût fallu doubler la mise…

L’administration considère que ce plan est un succès. Il a évité une sévère récession et contribué à la reprise économique du pays. Elle s’enorgueillit d’investir massivement dans les infrastructures, un secteur jugé prioritaire pour les dépenses d’avenir. Mais l’administration passe sous silence la question que se posent de nombreuses gens qui ont lu notre grand économiste Frédéric Bastiat : « Est-ce que les bénéfices d’une telle action surpassent les coûts ? »

Avant sa prise de fonction, Obama et son équipe de Chicago affirmaient qu’ils auraient une approche rigoureuse des politiques publiques qu’ils envisageaient de conduire.

Le sauvetage ahurissant d’une grenouille par les écologistes

Dans un papier intitulé « Government failure versus market failure » (la faillite de l’État opposée à la faillite du marché) Clifford Winston, de la Brooking Institution, a analysé le coût des politiques publiques en général. Ce vieux think tank de Washington est connu pour ses opinions modérées ; son président, Strobe Talbott, a été le secrétaire d’État, l’équivalent de notre ministre des Affaires Étrangères, du gouvernement Clinton.

Dans son introduction, Clifford Winston raconte une anecdote symptomatique de l’état d’esprit des médias si prompts à nous donner des leçons. Le président George W Bush avait pris dans son cabinet John Graham. Ce professeur de Harvard était connu pour ses positions fermes en matière de régulation d’environnement et de santé. L’agence de protection de l’environnement (EPA) avait proposé une régulation pour sauver une centaine de grenouilles appartenant à une espèce en voie de disparition, en modifiant le projet d’une autoroute, pour le coût astronomique d’un milliard de dollars. Graham s’était opposé à la régulation en question et avait exhorté l’agence à trouver une solution moins onéreuse pour sauver la grenouille. La vie de ce charmant batracien valait-elle les dix millions de dollars que l’EPA était prête à consentir à chacun d’entre eux ?

D’un point de vue démocratique, on ne pouvait que se féliciter qu’un débat contradictoire, au sein même de l’administration, eût pris en considération les intérêts légitimes des contribuables. Graham s’attira les foudres de la presse américaine. Par l’entremise du sénateur démocrate de l’Illinois, Dick Durbin, à qui il avait accordé une large place pour s’exprimer dans un op-ed (opposite editorial), l’édition du 16 juillet 2001 du Washington Post titra : «Graham flunks the cost-benefit test» (Graham a foiré le test du coût/bénéfice). Trois jours plus tard, The Los Angeles Times invita Linza Heinzerling, un professeur de droit de l’université de Georgetown, à donner, à son tour, son opinion. Comme son homologue de la côte Est, le grand quotidien ne fit pas dans la dentelle avec le titre suivant : «Don’t put the fox in charge of the hens!» (Ne confiez pas à un renard la garde du poulailler !)

Le mépris des journalistes à l’égard du peuple

Winston se contente de déplorer que le refus de débattre du coût des interventions gouvernementales ait un impact sur l’efficience microéconomique. Pour enfoncer le clou, j’ajouterai, pour ma part, que la réaction de la presse américaine, comme celle de sa consœur européenne après le référendum des minarets en Suisse, exprime un profond mépris envers le contribuable ou le concitoyen de son pays. Avez-vous entendu un seul de ces censeurs qui se soit interrogé sur le paquet fiscal du sommet de Copenhague à l’égard de la santé de nos entreprises ou de nos emplois qui en dépendent ? En Europe, il n’y a malheureusement pas que la sphère politique qui vit dans une bulle !

L’optimum de Pareto

L’efficience microéconomique est atteinte avec l’optimum de Pareto. Wilfredo Pareto (1848-1923) a laissé une grande empreinte dans la science économique. Cet optimum est atteint lorsqu’il n’est plus possible d’améliorer le sort d’une personne sans abaisser celui d’une autre. Malheureusement, cet outil microéconomique a été sorti de son contexte par les socialistes. Il a servi à légitimer des interventions publiques qui n’auraient jamais dû l’être. Si un marché échoue à établir un optimum pour un tas de raisons (monopole, imperfection de l’information disponible, externalité ou biens publics, etc.), l’Etat devrait intervenir pour corriger cette imperfection. Les énarques ne s’en privent guère.

Clifford Winston s’interroge : « Y a-t-il d’abord la preuve d’une faillite sérieuse du marché nécessitant une intervention publique ? » Sa réponse est un défi à notre temps : « Si une faute se produit, le marché a la capacité de la corriger alors que le gouvernement en est incapable en raison de l’inflexibilité, du court-termisme et du caractère conflictuel des agences gouvernementales qui se disputent ce marché, et aussi à cause des forces politiques qui autorisent des groupes d’intérêt à influencer des élus pour initier ou maintenir des politiques inefficaces mais qui leur permettent d’accroître leur rente. » Tout est dit.

La citadelle intouchable du Davis-Bacon Act de 1931

Comme tous les socialistes, le président Obama est convaincu que l’action publique est préférable à celle du privé. Winston cite le cas des infrastructures routières, fluviales, ferroviaires et aériennes, qui sont sous la coupe de l’État fédéral et des États fédérés. Cela représente la plus grande dépense publique avec un trillion de dollars par an. Pourtant, l’État n’a pas su corriger la congestion du trafic. Winston a établi une courbe de congestion. En 1980, un automobiliste américain était immobilisé sept heures en moyenne par an, il l’est pendant vingt-cinq heures en 2008. L’État n’a pas su non plus s’adapter à l’afflux du trafic aérien provoqué par la dérégulation initiée par Ronald Reagan. Les passagers devraient s’interroger sur la hausse ininterrompue des taxes d’aéroport qui représentent 50 % du prix d’un billet d’avion. Et pour quel bénéfice ? Les temps d’attente s’allongent inexorablement sur les pistes ou dans les aérogares.

C’est normal après tout, car d’un côté la demande explose à cause de la libération du trafic aérien, mais l’offre de piste stagne car la responsabilité incombe à des gouvernements locaux qui sont phagocytés par les syndicats et par une législation ancienne qui leur est très favorable.

Le 3 mars 1931, le président républicain Herbert Hoover signa la loi Davis-Bacon. Comme toute loi américaine, elle portait le nom de ses deux artisans au Congrès, tous deux républicains, faut-il le noter. Contrairement aux idées reçues en France, cela prouve que le parti démocrate et son illustre représentant en la personne de Franklin Delano Roosevelt qui n’était pas encore président, n’avaient pas le monopole de l’interventionnisme pour combattre la Grande Dépression qui s’était abattue sur le pays. James Davis, qui avait servi en tant que ministre du Travail sous trois présidents, était, à cette époque, le sénateur de Pennsylvanie ; quant à Robert Bacon, il était un député de l’État de New York. C’est en cette qualité qu’il sponsorisa, de son côté, la loi à la chambre des Représentants.

Cette loi s’appliquait à tous les contrats bénéficiant d’une aide fédérale avec un seuil de deux mille dollars. Cela ne laissait pas beaucoup de contrats hors du champ de la loi. Elle obligeait les parties contractuelles à verser un salaire aux ouvriers qui ne fût pas inférieur à celui en vigueur et fixé par les syndicats de l’État où se déroulait le chantier en question. L’idée était venue à Bacon lorsqu’un entrepreneur avait loué les services de noirs américains de l’Alabama pour construire un hôpital dans sa circonscription de Long Island. Son idée, partagée par ses collègues républicains au Congrès, voulait que les lucratifs emplois dépendant des fonds fédéraux profitent uniquement à la main d’œuvre locale sévèrement touchée par la Grande Dépression.

L’opposition démocrate déclara que cette loi était raciste. Bien qu’elle soit restée en vigueur malgré la fin de la Grande Dépression, ses opposants ne désarment pas. Dans un arrêt rendu en 2002, Brazier construction versus Elaine Chao, Secretary of the Department of Labor, le juge Bryant rejeta le caractère raciste de la loi.

Conscient du problème lancinant des attentes interminables dans les aéroports, Obama a voulu les corriger à sa manière. Ainsi deux villages d’Alaska ont obtenu 28 millions de dollars pour leur aéroport que personne ne connaît, alors que la ville de New York, qui gère tout de même les aéroports de La Guardia (vols domestiques) et de John Fitzegerald Kennedy (vols internationaux), n’en a pas reçu autant.

La dépense publique n’a pas pour but, comme le croient beaucoup de socialistes naïfs, à corriger des inégalités mais à acheter des voix. Ainsi, celle d’un électeur d’Alaska (un bastion républicain) compte vingt fois plus que celle d’un électeur de New York qui, quoi qu’il arrive, votera toujours pour le candidat démocrate. Tel est le calcul cynique du président Obama qui pense déjà à sa réélection.

La pédagogie pour sortir nos concitoyens de l’ornière socialiste

Dans un pays comme la France où le bien-être de la majorité des citoyens ne dépend pas de son ardeur au travail mais de la redistribution de la richesse par les énarques, les politiciens et les syndicalistes, il ne faut pas s’étonner que le libéralisme soit si mal compris.

La donne ne changera que lorsque l’État impécunieux fera faillite. Un immense travail de pédagogie attendra ceux qui auront alors la lourde tache d’expliquer à nos concitoyens que leur bien-être dépend désormais du travail accompli, de la liberté individuelle et du droit inaliénable de propriété.

C’est un José Pinera dont la France a besoin pour la sortir de l’ornière dans laquelle elle est tombée involontairement, le 27 mai 1974, avec l’élection de l’énarque Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République. Depuis cette date fatidique, les déficits budgétaires n’ont cessé de se creuser. Tout se tient…

Bernard Martoïa

 

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