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3/4/10 Bernard Martoïa

Sarkozy va-t-il se retirer au château de Rambouillet ?

« N’oubliez jamais ce que vous dit un homme lorsqu’il est en colère. » Henry Ward Beecher

Des membres du Tea Party disent qu’ils peuvent évoquer le moment précis où ils ont fait comprendre au parti républicain qu’ils ne seront jamais leurs béni oui-oui.

Par un après-midi ensoleillé de la mi-février, avec au sol une épaisseur de neige conséquente après le blizzard qui avait frappé Washington la semaine précédente, Michael Steele, le président du Comité national du parti républicain, reçut une cinquantaine de membres du Tea Party, le mouvement conservateur né spontanément sur la Toile et qui est en train de refaçonner la vie politique américaine.

Une récupération avortée dans l’œuf

Steele les invita au club huppé de Capitol Hill, dans l’espoir sans doute de les amadouer et de les récupérer. Selon des témoins, la réunion venait à peine de commencer quand Jo Ann Abbott, une activiste de Virginie qui se considère comme la grand-mère du Tea Party, leva la main pour prendre la parole. Elle demanda pourquoi le Comité national républicain (RNC) se permettait d’inviter les visiteurs de son site à envoyer aux membres du Congrès une carte postale avec un sac de thé où figurent les lettres RNC. « Respectueusement, Monsieur, si nous n’avons pas de droits d’auteur sur un sac de thé, vous êtes bien conscient que les gens l’associent au mouvement du Tea Party. Si vous parrainez cette image, vous portez atteinte à notre mouvement. Qu’il n’y ait pas de confusion, ajouta--t-elle, cette image nous appartient ! »

Un moment historique de la vie politique américaine passé sous silence par nos médias serviles

Une heure après la réunion, l’image en question avait disparu du site Internet du RNC. « Le parti républicain sait à présent que nous ne sommes pas des endormis ! », déclara Abott à un reporter de l’agence Reuters.

Le lendemain de la réunion, Steele prit le chemin de Canossa. Sur la chaîne Fox News (celle qui a accueilli notre ami José Pinera), Steele battit sa coulpe devant des millions de téléspectateurs américains. « Cette réunion est une contrition envers les gens déçus par les chefs du parti républicain. Elle reconnaît que nous nous sommes trompés, que nous avons commis beaucoup d’erreurs en laissant croître la taille du gouvernement et en bafouant les principes et les valeurs qui sont le socle du parti républicain. »

Contrition : la grande absente de la vie politique française

Imaginez la scène suivante. Le 1er avril 1982, dans la salle des glaces du château de Versailles qu’il affectionne particulièrement, François Mitterrand est seul devant une caméra qui le rehausse et lui confère cet air altier qu’il aime arborer.

Sur un ton grave rappelant les heures sombres de l’histoire de France, il fait aux socialistes médusés qui l’ont élu l’année précédente ces annonces stupéfiantes :

- Il s’est trompé avec le plan keynésien de relance par la consommation des ménages (augmentation du SMIC et des prestations sociales), et avec le recrutement massif de fonctionnaires, alors que les autres grandes puissances se serrent la ceinture pour traverser la crise économique.
- Il compte remplacer Pierre Mauroy par un libéral jusqu’alors honni pour redresser les finances du pays.
- Il demandera le conseil de Margaret Thatcher pour privatiser la Société Nationale des Chemins de Fer (SNCF) qui fait tant de tort aux Français par ses grèves à répétition.
- Il consultera son ami Helmut Kohl, pour graver dans le marbre que le droit de grève sera désormais interdit aux fonctionnaires, comme c’est le cas en Allemagne. Et de citer ce proverbe français : «On ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre».
- Il consultera le très jeune ministre du Travail du gouvernement chilien (un certain José Pinera), qui a lancé avec succès le 1er mai 1981, le jour même de la fête du Travail, un plan de retraite par capitalisation.
- Il a été élu sur de fausses espérances portées par le programme commun de la gauche de 1972, et ne veut pas faire davantage de mal à une France éternelle qu’il aime par dessus tout (il ne parle aucune langue étrangère). Il entend donc finir son septennat à l’Académie française, dès qu’il aura trouvé un Premier ministre animé du seul désir de servir son pays !

Élu dans la foulée à l’Académie française, il annonce à ses nouveaux collègues que son vœu le plus cher est de réécrire la définition du mot « socialisme. » Puisant dans sa vaste culture, il décrit de sa belle plume les origines du socialisme en France, avec la Terreur de 1793 et la Commune de 1870. Ensuite, il se projette à l’extérieur des frontières avec la révolution d’octobre 1917 en Russie. Le communisme n’est qu’un avatar du socialisme. Puis il revient au berceau du socialisme en Allemagne, avec la révolution des Spartakistes, le 9 novembre 1918, qui entraînera, deux jours plus tard, l’effondrement du Reich par l’Armistice de Retondes, et la tentative de putsch du 9 novembre 1923 du Parti ouvrier allemand national socialiste (NSDAP) emmené par Adolf Hitler. (1) Il arrête là cette longue énumération et conclut que le socialisme est une utopie qui s’est toujours mal terminée pour les hommes épris d’égalité. Dieu n’a-t-il pas créé chacun de nous comme un être unique ?

Où en serait la France si elle avait mis en œuvre ces réformes ? Elle n’aurait pas à se soucier d’une dette publique qui obère toutes ses marges de manœuvre et la menace à présent de banqueroute.

Imaginez aujourd’hui la même scène à Versailles avec Nicolas Sarkozy. Il avoue avoir été mal conseillé par les énarques de l’Elysée et de Bercy sur ce qu’il convient de faire pour éviter la banqueroute de la nation. Il reconnaît avoir commis un énorme péché d’orgueil en se déclarant le défenseur du pouvoir d’achat des Français.

Comme il ne sait plus ce qu’il doit faire pour se sortir du pétrin, il est prêt à écouter maintenant les conseils de gens éloignés du sérail. Il ajoute, en pratiquant l’autodérision, que l’économie n’a jamais été sa tasse de thé et qu’il est donc à cet égard un Français comme les autres ! (La belle journaliste qui l’interviewe, et qu’il ne peut s’empêcher de draguer, éclate de rire).

Il se dit prêt à passer la main dès qu’il aura trouvé un Premier ministre compétent en matière économique (un oiseau rare en France).

Il invite le Front national à entrer au gouvernement et lui offre le ministère de l’Intérieur afin d’inverser les flux migratoires qui sont en train de détruire à grande vitesse le tissu de notre civilisation millénaire.

En contrepartie de cette énorme concession faite à la droite, il exige que le socialiste Claude Allègre ait carte blanche pour dépecer le mammouth de l’Education nationale qui fait tant de tort aux élèves ainsi qu’aux enseignants qui sont en première ligne face à la violence.

Il annonce son intention de finir son mandat au château de Rambouillet pour se faire pardonner par les Français les outrages et les trahisons qu’il a commis.

Suit un clin d'oeil à l’adresse des écolos : il promet de renoncer à son jogging matinal pour ne point effaroucher les canards et les oies qui se prélassent aux abords du grand canal.

Pour restaurer sa santé mentale, mise à rude épreuve par un activisme débordant mais dépourvu de méthode, il se dit prêt à étudier la philosophie allemande.

Plutôt que de donner de l’argent aux élèves pour lutter contre l’absentéisme, il propose à Bernard Pivot d’organiser une compétition hebdomadaire de dictée, ouverte aux jeunes des banlieues, dans une salle du château de Rambouillet. Le vainqueur de l’épreuve recevra en récompense non pas une station Nintendo, mais une pile de livres d’auteurs mis au rancart par l’éducation marxiste, comme Alexis de Tocqueville ou Frédéric Bastiat.

Et pour sauver son troisième mariage, et surtout son âme de l’enfer qui l’attend, il promet de ne plus s’approcher des belles créatures. La seule femme qu’il s’autorisera à fréquenter en dehors de son épouse, lors de sa retraite à Rambouillet, sera la pieuse Christine Boutin qui l’invitera à assister en sa compagnie à la messe dominicale célébrée en l’église de Saint-Lubin.

On se prend alors à rêver que le naufrage du paquebot France et une funeste guerre civile pourraient ainsi être évités. Mais ce sursaut national est plutôt réservé à l’autre rive de l’Atlantique. La modestie d’un gouvernement réduit à son carré régalien, la foi chrétienne et la contrition sont-elles encore de mise dans une France socialisée et islamisée, et dont tout démontre qu’elle est en voie de décomposition rapide ?

Bernard Martoïa

(1) Le 9 novembre est décidément une date maudite pour le socialisme, puisque c’est le 9 novembre 1989 qu’est tombé le mur de Berlin. C’est pourquoi les parlementaires allemands, qui n’ont jamais renié la social-démocratie (laquelle aurait été trahie par les Spartakistes de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht) lui ont préféré celle du 3 octobre pour commémorer la réunification allemande (Wiedervereinigung).

 

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