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10/10/21 Claude Reichman
     
              Voici mon programme présidentiel !

« Et monsieur le curé de quelque nouveau saint charge toujours son prône. » Nous sommes au 17e siècle, sous le règne de Louis XIV, quand Jean de La Fontaine écrit le savetier et le financier. L’Eglise règne sur la société et notre savetier aimerait pouvoir travailler autant qu’il le souhaite, sans devoir chômer si souvent pour le culte des saints.

Nous sommes au début du 21e siècle et les artisans et autres travailleurs indépendants aimeraient pouvoir conserver pour eux et leur famille l’essentiel du fruit de leurs efforts, sans que la Sécurité sociale le leur confisque.

En fait, en France, rien ne change jamais. Il y avait, depuis des siècles, 38 000 paroisses dans notre beau pays. Il y a toujours 36 000 communes. Et le souci du pouvoir, quel qu’il soit, a toujours été de prendre un maximum d’argent aux sujets, devenus citoyens, afin de les rendre heureux (ce mot français veut dire « obéissant ») et d’assurer à ceux qui les gouvernent un train de vie glorieux.

La course folle aux dépenses de l’Etat et donc à ses prélèvements ne cesse de s’emballer. Aujourd’hui, on en est arrivé à jeter par les fenêtres de l’argent qu’on n’a pas en croyant qu’une telle conduite n’aura aucune conséquence néfaste.

J’observe les Français avec un étonnement qui ne cesse de croître. Ils n’ont pas l’air d’être inquiets. Un baladin nommé Zemmour les enthousiasme en ce moment en leur disant que leur pays va mourir. Ils lui font un triomphe et s’en vont de magasins en restaurants et en rencontres sportives célébrer le plaisir de vivre dans un pays béni des dieux. Pour ce qui est de la mort, nous verrons plus tard.

Je disais naguère à un économiste réputé que la fête devrait bien finir un jour. Il me répondit en souriant : « Vous voyez bien qu’elle dure. » Certes, toute heure gagnée sur l’éternité vaut de l’or pour les pauvres humains que nous sommes. Mais un auteur dramatique a eu un grand succès il y a quelques années avec une pièce intitulée « La facture ». Il s’agissait de sentiments, mais pour l’argent c’est la même chose et c’est en fait pire, car on peut se quitter tout en restant ensemble, mais les créanciers font preuve de moins de patience.

Je vois parfois sur de vieux magazines des photos de familles heureuses, célébrant un anniversaire ou une noce. Et je sais, sans mérite, qu’elles vont être brisées par l’histoire. Il suffit de regarder la date du journal. Ce genre de réflexion n’est pas agréable. Mais il est indispensable si l’on veut avoir une chance d’être utile à son pays.

Alors doit-on se lover dans la certitude que Paris (Fellini disait Rome) est le plus bel endroit pour attendre la fin du monde, ou doit-on plutôt, tel Diogène, se mettre à demi-nu dans un tonneau et prétendre qu’on cherche un homme ?

Rien de tout cela, à mon humble avis. Ce qu’il faut, c’est chercher la faille du système, et si on l’a trouvée, y concentrer ses efforts jusqu’à ce qu’elle cède. Et là, tout le système cèdera. Ce qui veut dire qu’on en reviendra à des idées plus saines, celles par exemple que les auteurs de la Déclaration de 1789 avaient si bien formulées, quand ils disaient que la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression sont les droits naturels et imprescriptibles de l’homme et du citoyen.

Si j’étais aujourd’hui candidat à la présidence de la République, mon programme se bornerait à ces mots : Liberté, propriété, sûreté, résistance à l’oppression. Pourquoi chercher plus loin ? Ils disent tout. Et ils sont le fondement de notre Constitution !

D’ailleurs faire un programme présidentiel est une stupidité. Seuls les principes comptent. Le reste s’accomplit naturellement, à la façon humaine, faite de tentatives, d’approximations, mais aussi d’éclairs d’intelligence et de longues périodes de volonté et d’effort. Bref, l’aventure humaine, commencée il y a deux millions d’années avec homo habilis et dont nous sommes les sept milliards et demi d’héritiers.

Dans un film célèbre, appelé en français « Bienvenue Mister Chance », le héros est en fait un demi-débile qui passe sa vie devant la télévision chez un bienfaiteur qui l’a recueilli. Laissé seul par la disparition de ce dernier, il se hasarde dans la ville, armé de sa seule télécommande. Plus tard, devenu le conseiller du président des Etats-Unis, il fera monter la Bourse d’une simple phrase toute faite, comme toutes celles qu’il prononce : « Le printemps succèdera à l’hiver. »

Voilà, nous sommes en France et ceux qui causent dans le poste pour nous convaincre de leur excellence n’ont même pas de télécommande. Heureusement j’en ai une et je les fait taire. Mais franchement, je ne sais pas si le printemps succèdera à l’hiver !

Claude Reichman


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