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1/11/07 |
Claude Reichman |
Avec la France de Sarkozy, la prise d’otages, ça marche ! C’est par sa faute que la France est prise en otage au Tchad. Certes, elle n’a pas été assez vigilante envers l’action de l’association L’Arche de Zoé, mais la véritable responsabilité de notre gouvernement n’est pas là. Ce qui aurait dû attirer l’attention de nos services de renseignements militaires et de notre diplomatie, c’est l’apparente bienveillance des autorités tchadiennes à l’égard de cette opération humanitaire. Elles ont en effet assisté, sans s’y opposer le moins du monde, au transport des enfants, par rotations aériennes de la ville frontière d’Adré jusqu’à Abéché … avant de hurler à l’enlèvement. Tout cela s’apparente à un piège grossier, dans lequel on ne conçoit pas qu’un pays comme la France ait pu tomber. Qui pouvait ignorer que le gouvernement tchadien était hostile au déploiement d’une force de paix européenne au Darfour, au sein de laquelle la France devait jouer un rôle majeur ? En instrumentalisant une action humanitaire menée par des amateurs, M. Idriss Déby s’est donné un important moyen de pression sur la France. Il a en outre été fortement aidé par les premières réactions des autorités françaises qui se sont empressées de condamner l’action de L’Arche de Zoé avant même d’avoir pris connaissance des conditions exactes dans lesquelles celle-ci avait agi. La sagesse eût consisté, pour M. Sarkozy et ses ministres, à indiquer que sans préjuger des torts éventuels de cette association, ils étaient hautement préoccupés par le sort réservé à nos compatriotes et aux citoyens européens qui les accompagnaient, et qu’ils invitaient le gouvernement tchadien à faire preuve de la plus grande retenue. Dans un pays où le pouvoir ne tient que par la présence d’une force aéro-terrestre française d’un millier d’hommes, le message eût été reçu cinq sur cinq. Au lieu de cela, on a multiplié les déclarations condamnant les agissements de L’Arche de Zoé et donnant donc raison au gouvernement tchadien, les pires de tous ces propos étant ceux de Mme Rama Yade, secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et aux droits de l’homme, affirmant bravement que « l’Afrique de papa, c’est terminé ». On a vu aussitôt, au Tchad, et comme en écho, des manifestations "spontanées" dénonçant le colonialisme et "l'esclavagisme" et proférant les pires accusations contre la France. Et que dire des propos de M. Sarkozy souhaitant que « personne ne perde la face » dans cette affaire, comme si nous avions à faire à des mandarins chinois et non à des preneurs d’otage patentés ? En réalité, cette affaire du Tchad n’est que la conséquence logique de celle des infirmières bulgares. M. Sarkozy, pour s’attribuer le beau rôle dans leur libération, a délivré un brevet d’honorabilité à M. Kadhafi, alors que celui-ci ne s’est jamais comporté qu’en digne successeur des pirates barbaresques qui ont infesté la Méditerranée pendant des siècles et rançonné à tour de bras tous les Chrétiens qui leur tombaient sous la main. M. Idriss Déby a parfaitement compris la leçon : avec la France de Sarkozy, la prise d’otages, ça marche ! Notre pays n’a pas fini de subir les conséquences d’une image aussi désastreuse. Quant au chef d’Etat qu’il a élu, il vient de faire la démonstration de son amateurisme diplomatique et de son inconséquence. Tant il est vrai que sa seule véritable ligne de conduite, son sésame, l’alpha et l’oméga de sa pensée et de son action, se résument à la formule magique : « Un évènement médiatique par jour ». Elle lui a permis de devenir président de la République, ce qui en dit long sur le manque d’esprit critique et la complaisance des moyens d’information français. Elle en fait aujourd’hui le chef d’un Etat pris, par sa faute, en otage et humilié aux yeux du monde entier. Difficile d’imaginer pire début de quinquennat ! Claude Reichman
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