Les médias
doivent donner la parole au peuple !
Un pan de plafond s’est effondré à la maternité de l’hôpital de Bordeaux.
Par bonheur la jeune accouchée sur le lit de laquelle le plafond est tombé
n’a pas été touchée, car elle se trouvait sur le côté du lit. C’est ainsi
que commence mon ouvrage « La révolution des termites », publié en 1990. A
ceci près que la poutre qui s’est effondrée dans ce récit se trouve au
ministère des finances. L’important est que tout commence, partout où les
choses vont mal, par un effondrement. Bien entendu ce genre d’évènement
suscite, toujours et partout les mêmes commentaires. Chacun y voit un
mauvais signe pour la société, s’alarme auprès de son entourage, et retourne
à ses occupations.
Lorsque, des années plus tard, les effondrements se multiplient, la crise
de la société ne fait plus de doute pour personne, et les ministres
s’égosillent chaque jour devant les ruines. Mais rien ne change dans
l’écoulement du temps. Tout continue comme d’habitude, à ceci près que les
citoyens se parlent en hochant la tête en signe d’inquiétude. La seule chose
que le pays ne parvient pas à faire est d’adopter une politique pour faire
face à la catastrophe. Et celle-ci déroule ses fastes sans que rien ne
vienne empêcher leur marche harmonieuse.
L’histoire, que nous avons tous étudiée à l’école, est faite de
catastrophes, dont la plupart sont des guerres. A l’ère moderne, il s’agit
plutôt de déroutes économiques, même si une bonne guerre est loin d’être
exclue. L’essentiel pour les esprits éclairés est que tout aille mal et
qu’il soit impossible d’arrêter le cours des évènements. Car sinon cela
signifierait qu’il faut que chacun se dresse face au désastre et l’affronte
avec courage. Mais que ferait-on alors de nos chères habitudes ?
La France est aujourd’hui en bonne voie d’effondrement. Rien de ce qui se
passe dans notre cher et vieux pays n’était imprévisible. Et il s’est trouvé
des observateurs avisés pour le prévoir. Bien entendu, personne ne les a
pris au sérieux. Non qu’on les eût traités de farfelus, mais parce que leurs
prévisions n’étaient jamais accompagnées d’actes. Pour qu’une révolution ait
lieu, il faut que des gens se décident à passer à l’action. C’est triste à
dire, mais c’est ainsi. Les hommes au pouvoir disposent de la force armée et
du droit de s’en servir. En France, par exemple, ils ne s’en privent pas en
ce moment, où les gendarmes et les CRS font un festival. Sans que personne
ne les en empêche vraiment. Il est vrai qu’à ce jour ils réussissent à
maintenir l’ordre, à condition de ne pas trop regarder du côté des
banlieues.
La dernière révolution, celles des gilets jaunes, a été brisée par les
forces de l’ordre, qui n’ont pas hésité à frapper et à éborgner les
manifestants, sur l’ordre de Macron. Exit les réformes. Les électeurs ne
savent plus où ils en sont et envoient n’importe qui à l’Assemblée. Du coup,
la France est ingouvernable. Elle ne supporte plus Macron, mais au lieu de
démissionner, il parade là où il peut et entretient le désordre. Tout cela
est le résultat d’un demi-siècle de mal-gouvernance, que la société civile
n’a pas su empêcher. Il ne nous reste plus que le chaos pour commencer à
entrevoir une issue.
Face à la paralysie de l’Etat, il y a encore les Français. C’est dire que
nous ne sommes pas désarmés car nos compatriotes sont des hommes et des
femmes de qualité. Il faut leur donner le pouvoir par le biais de comités
locaux qui se réuniront en Etats généraux. C’est ainsi que s’est faite la
révolution de 1789. Plus aucun corps constitué n’a le moindre crédit dans
notre pays. Cette crise des institutions est le résultat de la prise du
pouvoir par les hauts fonctionnaires. Ils n’ont aucune légitimité à le
détenir. Le lien entre gouvernants et gouvernés est rompu. Une crise de ce
type ne peut se résoudre que par une grande lessive.
Les médias ne jouent pas leur rôle, et ils ne le joueront pas. Tenus par
des capitaux d’Etat ou privés, ils n’ont aucun lien avec le peuple. Les
réseaux sociaux ont eux aussi perdu toute crédibilité. Il faudra que des
voix nouvelles les régénèrent. Et que ceux qui s’en sont immodestement
emparés laissent la parole aux autres. Le seul élément d’optimisme réside
dans une loi de la nature qui veut que les plus dynamiques guident les
autres. Il suffit qu’ils se décident à le faire. En deux siècles, l’humanité
à fait d’immenses progrès matériels. Les progrès moraux restent à faire. Que
les vrais penseurs se mettent au travail !
Au VIe siècle avant notre ère, à Milet en Ionie, il a suffi de quelques
esprits d’élite pour que l’homme apprenne à raisonner. Depuis, on n’a guère
progressé. Ce qui manque à l’homme actuellement, ce ne sont pas les
connaissances, c’est la logique. Or celle-ci ne peut s’épanouir qu’à
condition de refréner les passions. C’est tout l’enjeu de la situation
actuelle. Quand on entend sur les chaînes d’information des parleurs
professionnels s’écharper à coup d’arguments stupides, on ne peut qu’être
consterné de ce triomphe de l’obscurantisme. Or c’est celui-ci qui,
aujourd’hui, fait l’opinion. Première mission des gens de bien : chasser les
bavards du temple et donner la parole au peuple !
Claude Reichman
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